Mantisse, rappeur et membre du sextuor hip-hop LaF, sort vendredi un premier album solo, Colin-Maillard, un opus d’introspection et de guérison qui lui permet de se questionner sur le sens de sa vie et de faire la paix avec son passé.
Retour en arrière. Début mars 2020, LaF est sur une lancée fulgurante. Après avoir remporté les Francouvertes en 2018 et sorti un album acclamé par la critique en 2019, le groupe s’apprête à remplir le mythique Club Soda le 14 mars, sauf que la veille, une déclaration importante du gouvernement vient freiner son élan.
Enfermés chacun chez eux pendant de longs mois, les rappeurs Bkay, Jamaz et Mantisse se mettent à écrire chacun de leur côté, eux qui avaient l’habitude de toujours tout produire en groupe, sur des beats envoyés par l’un de leurs producteurs, Bnjmn.lloyd.
Dans la dernière année et des poussières, Jamaz et Bkay ont chacun sorti un EP solo, fruits de cette période d’isolement. C’est maintenant au troisième rappeur du groupe, Mantisse, de son vrai nom Thomas Thivierge-Gauthier, de se dévoiler au monde.
L’écrivain solitaire
«Ça fait deux ans que j’écris tout seul dans mon sous-sol», raconte l’artiste, visiblement très excité de pouvoir enfin sortir son projet.
La solitude, le changement de rythme, l’attente, la séparation d’avec ses ami.e.s et la pandémie ont entraîné beaucoup de remises en question pour Mantisse. Ses textes en ont été grandement affectés.
«Avec le groupe, on a tendance à être dans l’instantané. On travaille tous ensemble dans le studio. On fait quelque chose dans l’énergie du moment. On écrit en faisant les beats, raconte-t-il. Pour le projet solo, j’ai pris plus de temps pour écrire, je revenais souvent sur mes textes.»
Les paroles de cet album se révèlent ainsi plus recherchées et personnelles, estime Mantisse. Il y parle de ses hauts et de ses bas des dernières années. Il aborde son rapport aux amitiés, à la drogue, au travail, aux ambitions et aux rêves. Il a aussi beaucoup écrit sur son passé, l’adolescence et le début de la vie adulte, une période où il était perdu et troublé, et dont il avait envie de parler avec le recul d’aujourd’hui.
Un vrai mélomane
Mantisse l’affirme haut et fort, «le rap, c’est [sa] vie». C’est la culture qui l’a accueilli dans la musique, qui lui a permis d’avoir un travail. Mais ce style n’est pas son premier amour ni celui qu’il écoute nécessairement dans la vie de tous les jours.
Alors que ses comparses Jamaz et Bkay baignaient dans la marmite du hip-hop dès leur plus jeune âge, Mantisse a plutôt grandi en écoutant du rock américain, des artistes comme Jimi Hendrix, Red Hot Chili Peppers ou Metallica. Il a ensuite découvert Les Colocs, Mes Aïeux puis surtout Karkwa, le groupe qui, pour lui, «a tout changé».
Aujourd’hui, il trippe sur le rock alternatif québécois, des chanteuses comme Ariane Roy et Lou-Adriane Cassidy, sur le jazz et sur le rock psychédélique de la fin des années 60.
Sortir des codes
Avec ses préférences musicales, sa longue chevelure et son look vestimentaire (il porte, lors de l’entrevue, un t-shirt noir à l’effigie du groupe rock québécois Ponctuation), on est à mille lieues de l’image stéréotypée qu’on peut se faire d’un rappeur.
«Oui, je peux clasher, mais je ne pense plus qu’on est surpris de voir du rap différent partout dans le monde. Mon but est de faire du rap comme ça me tente, de prendre cette culture et de l’amener ailleurs. Il est important que cette identité puisse être multiple», dit-il.
Sa spécificité a toujours été une force au sein de LaF. On reconnaît tout de suite ses parties chantées, plus mélodieuses.
«Je suis le visage différent dans le groupe. Ça a un pouvoir. On en est conscient et on l’utilise.»
Mantisse a envie d’être libre. C’est d’ailleurs dans ses plans de sortir éventuellement de la musique folk, avec seulement lui à la guitare.
Mais en attendant, le rap l’appelle: il doit quitter l’entrevue, il a rendez-vous en studio avec les autres membres de LaF. Ils préparent un nouvel album.
Les adresses de Mantisse dans Rosemont–La Petite-Patrie
- Le parc des Carrières: « Lieu mythique. On a toujours fait des gros chillings basket et barbecue dans ce parc.»
- Isle de Garde: « J’ai travaillé là, c’est les personnes les plus fines.»
- Le Système: « C’est crazy! Il y a des DJ sets, de la bonne bouffe, des bons vins, des bons cidres.»
- Le Nouveau Système Beaubien: « Le spot par excellence pour des hot-dogs et des déjeuners. Ça ne vieillira jamais.»
Sur les plateformes d’écoute dès le 16 septembre.
Lancement le 7 octobre au Ministère.