Le sirop d’érable c’est un produit artisanal, une passion et une tradition, mais c’est aussi un sujet de recherche très intéressant. De nombreuses recherches scientifiques sont effectuées au département de chimie de l’Université Laval sur l’eau d’érable.
«C’est un art faire du sirop d’érable! C’est encore fait de façon traditionnelle, mais c’est aussi un sujet intense de recherches qui a commencé en 1932 avec Arthur Labrie qui était doctorant à l’école de chimie de l’Université Laval. Sa thèse portait sur l’identification des composés aromatiques du sirop d’érable», raconte Normand Voyer, enseignant au Département de chimie de l’Université Laval et docteur en chimie.
Ce n’est donc pas d’hier que les chercheurs se penchent sur les caractéristiques et les propriétés de notre sirop. Avec les avancées technologiques que l’on a connues au cours des 20-30 dernières années, aujourd’hui, on dispose d’équipements très sophistiqués qui nous permettent d’étudier le sirop d’érable sous toutes ses coutures moléculaires.
«Ce qui va faire la grande différence entre le sirop d’érable et les autres sirops, c’est qu’il contient beaucoup plus de polyphénols et il y a des glucides différents qui lui confèrent des propriétés différentes. D’ailleurs des chercheurs de McGill ont démontré que le sirop d’érable avait des effets synergiques avec les antibiotiques, ce qui rendrait ceux-ci plus efficaces en les mélangeant avec du sirop d’érable. Même s’il contient vitamines et minéraux, il ne faut tout de même pas oublier que le sirop d’érable est composé de 66% de sucrose.
D’un érable à l’autre, le goût de l’eau est vraiment différent ce qui donne des sirops aux arômes variés: floral, plus sucré, caramel, fumée, vanille, sucre brulé. Ce qui explique le sirop artificiel n’arrive jamais à gouter comme un sirop d’érable naturel.
«Chaque érable a sa propre génétique, son propre sol, qui va avoir un impact sur sa productivité, sur la concentration de sucre, de polyphénols, etc., et comme le sirop c’est la concentration de 40 litres d’eau d’érable pour produire un seul litre de sirop, on concentre énormément de substances chimiques naturelles», explique M. Voyer. Le sirop est donc extrêmement riche en minéraux, en polyphénols, et, en plus, comme le procédé se fait à haute température, il y a plusieurs réactions chimiques qui se produisent lorsque l’on fait bouillir l’eau d’érable. «L’une de ces réactions est celle de Maillard, un chercheur qui a découvert que cette réaction en cuisine permet de générer des dizaines de substances aromatiques qui vont faire que chaque sirop est unique à cause de sa composition chimique.»
Si vous êtes pour mettre du sirop sur vos crêpes, mettez de l’unique et véritable sirop d’érable! Vous allez vous sentir moins coupables parce que vous allez avoir une bonne dose de minéraux et de polyphénols.
Normand Voyer, chimiste
Les pouvoirs du québécol
Dans le laboratoire de l’Université Laval, les chercheurs s’intéressent surtout à une substance unique qui se retrouve dans le sirop d’érable, le québécol, nom donné par l’Américain qui a identifié cette molécule. Le québécol apparaît pendant le processus de fabrication du sirop d’érable, à la suite de réactions chimiques qui transforment les polyphénols naturellement présents dans l’eau d’érable, ce qui lui confère de très bonnes propriétés anti-inflammatoires.
Mais, ne nous emballons pas trop vite! Boire une tasse de sirop ne guérira aucune inflammation! «Il y a trop peu de québécol dans le sirop. Par contre, c’est une avancée pour étudier le potentiel anti-inflammatoire du québécol qui pourrait être utilisé éventuellement dans différentes formules. Notre objectif c’est de démontrer que le sirop d’érable ce n’est pas un sirop ordinaire, mais un sirop qui est riche en polyphénols et qui a une activité antioxydante.»
Les études se poursuivront donc pour répondre à diverses questions telles: Que se passera-t-il avec les changements climatiques? Est-ce qu’il y aura une variation dans la saison des sucres? Est-ce qu’on sera capable de prédire le meilleur moment pour récolter l’eau fin d’obtenir un sirop de plus grande qualité? Est-ce que l’on pourra prédire le déclin de l’érable? Est-ce planter d’autres espèces d’arbres dans une érablière la rendrait plus résiliente? Toutes les réponses à ces questions serviront à protéger cette activité économique du Québec qui rapporte 130 millions de livres de sirop annuellement par nos 13 000 producteurs acéricoles.