Craig Dykers n’a plus besoin de présentation dans la communauté architecturale. Récipiendaire du World Architecture Award et du Prix Mies van der Rohe de l’Union européenne, il aurait toutes les raisons de jouer au «starchitect».
Son enviable portfolio compte notamment la conception de la bibliothèque d’Alexandrie, en Égypte, le nouveau pavillon muséal du mémorial pour le 9/11 à New York et le sublime Opéra et ballet national d’Oslo.
Mais Craig Dykers est tout sauf imbu de lui-même. C’est la première chose qui m’a frappée lorsqu’il s’est timidement présenté, jeudi dernier, à la galerie l’Arsenal, dans Griffintown. Avec son chapeau melon et sa douce voix qui enterrerait à peine le son d’une mouche, il semblait bien fier d’avoir réussi à étendre en sol canadien les tentacules de sa firme norvégienne, Snøhetta, avec l’ouverture du Isabel Bader Centre for the Performing Arts en Ontario.
«Sur la scène architecturale, le Canada est un pays fascinant, lance-t-il. Pour avoir été membre de plusieurs jurys de concours internationaux, je peux affirmer que les architectes canadiens et mexicains se démarquent très souvent par la force de leurs concepts et par leur sensibilité au contexte environnant. J’avais hâte de participer à cette effervescence.»
Inauguré le week-end dernier sur le campus de l’Université Queen’s, le nouvel espace culturel de 45 M$ était sur la table à dessin depuis presque six ans, à la suite d’une compétition d’architecture. Un échéancier relativement long pour l’envergure du projet, mais qui aura certainement valu l’attente. Notre arrivée dans l’édifice est marquée par un hall entièrement vitré, offrant un sublime panorama sur le lac Ontario. Des lamelles de bois, récupérées d’un bâtiment qui se trouvait sur le site, viennent compléter l’espace. Une fois plongé dans la salle de spectacle de 566 sièges, on se laisse rapidement séduire par son atmosphère très intime, avec ses chaleureuses strates de bois couleur chocolat.
Craig Dykers compare son arrivée au pays à une délicate opération chirurgicale. Comme l’architecture est intimement liée à la culture d’un peuple et à son identité, un minutieux travail de recherche s’est imposé avant d’insérer le «scalpel» dans le tissu urbain. «Je peux marcher des heures et des heures dans une ville avant d’y travailler, poursuit-il. On apprend beaucoup en observant ce qui s’y déroule et en discutant avec les gens qu’on croise. […] On travaille également avec des architectes de partout dans le monde chez Snøhetta, ce qui nous aide à mieux comprendre les contextes locaux.»
L’équipe compte notamment des architectes canadiens qui contribuent actuellement à la réalisation de deux prochains projets de la firme au pays, soit un Learning Center pour l’Université Ryerson, à Toronto, et la nouvelle bibliothèque municipale de Calgary.
«Je ne sais pas si je travaillerai un jour à Montréal, s’est-il empressé d’ajouter. Les étoiles ne se sont pas encore alignées pour ça, mais j’aimerais beaucoup.»
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