L’Arrondissement de Rivière-des-Prairies-Pointe-aux-Trembles devra évaluer cet été s’il y a présence du chevalier cuivré sur le site de la plage de l’Est, et, le cas échéant, prendre des mesures pour assurer la protection du poisson menacé d’extinction. Alors que l’enjeu de décontamination des sédiments est loin d’être résolu sur le site, les baigneurs devront attendre encore quelques années avant de se baigner au bout de l’île.
C’est lorsque l’Arrondissement a fait la demande d’installation d’un quai pour la pêche à la plage de l’Est qu’il a été avisé par le ministère des Pêches et Océans Canada de la possible présence possible du chevalier cuivré.
«On nous a demandé de procéder à des travaux de caractérisation pour savoir s’il y a présence d’herbiers qui nourrissent le poisson, et qui pourraient être un endroit où se localiseraient plusieurs chevaliers cuivrés», souligne la mairesse d’arrondissement, Caroline Bourgeois.
Un arrêté ministériel pour la protection de l’habitat essentiel du chevalier cuivré a été signé par le gouvernement fédéral en mai 2021. Il faisait suite à un recours judiciaire entrepris par la Société pour la nature et les parcs du Canada (SNAP) et le Centre québécois du droit de l’environnement (CQDE).
Une espèce à protéger
Pour Alain Branchaud, directeur général pour SNAP Québec et biologiste, il est positif que le gouvernement du Canada s’assure qu’il «n’y a pas d’impact sur cette espèce, compte tenu du capital critique de sa situation».
«Le chevalier cuivré est un poisson qui non seulement est unique au Québec, mais on le retrouve uniquement dans la grande région de Montréal», explique-t-il.
La «bonne nouvelle» pour le poisson et le projet de plage de l’Est résiderait à son avis dans la carte des habitats essentiels qu’on retrouve le Programme de rétablissement du chevalier cuivré du Canada, publié par le gouvernement fédéral en 2012.
«Notre compréhension est qu’il n’y a pas d’habitat essentiel désigné au site du projet de plage de l’Est […], il ne devrait pas avoir d’impact majeur sur l’espèce pour ce projet-là», croit-il.
Selon Caroline Bourgeois, advenant la présence d’herbiers sur le site de la plage de l’Est, «toutes les options seront évaluées». Cela comprendrait notamment d’évaluer la possibilité d’aménager de nouveaux herbiers à l’écart du site de la plage.
Cette mesure de compensation a également été mise de l’avant par l’Administration portuaire de Montréal dans le cadre du projet de terminal portuaire à Contrecœur, qui menacerait de détruire une partie de l’habitat essentiel du chevalier cuivré.
Or, pour M. Branchaud, on n’aurait pas présentement «de connaissances scientifiques nécessaires pour aller de l’avant avec des mesures de compensation» de la sorte.
«Dans un écosystème dynamique comme le fleuve Saint-Laurent, créer ou aller déplacer des herbiers, ce n’est pas une tâche facile. Certains projets de compensation sont documentés scientifiquement. Mais pas dans ce cas particulier», croit celui qui a d’ailleurs collaboré à l’écriture d’un avis scientifique abordant cet enjeu.
Pas de baignade avant quelques années
L’arrondissement devra donc faire réaliser une étude de caractérisation de l’habitat du poisson sur le site de la plage cet été, et adapter ses plans en conséquence.
La seconde étape sera de poursuivre les démarches pour déterminer le type de travaux qui devront être menés pour la décontamination des sédiments sur le littoral. Un premier appel d’offres pour réaliser cette étude a été lancé il y a environ un an, mais n’a pas reçu de soumissionnaire.
La mairesse Caroline Bourgeois reconnaît que plusieurs étapes restent à compléter avant la décontamination du littoral, et qu’il faudra attendre encore quelques années pour se baigner. Elle refuse cependant de s’avancer sur un échéancier en la matière.
Malgré les embûches, le projet de la plage de l’Est et le choix de son site restent toujours pertinents à ses yeux.
«Je sais que les gens ont hâte de se baigner. Mais avant tout, c’est un parc qu’on a complètement retransformé. Encore hier soir, il y avait des dizaines de personnes qui jouaient au volleyball, des gens qui profitaient de la plage de galets, des enfants dans les jeux d’eau. C’est un lieu que les gens se sont approprié.»
Une espèce menacée
Le chevalier cuivré a été désigné espèce faunique menacée par le gouvernement du Québec en 1999. Le poisson, qui pourrait peser jusqu’à environ 5 kg, a été désigné «en voie de disparition» en 2004 par le gouvernement fédéral.
«Sa reproduction plus tardive, avec toutes les perturbations des écosystèmes qu’on a, le rend particulièrement vulnérable », précise Alain Branchaud.