La directrice générale et artistique de l’Espace Go, Ginette Noiseux, a été nommée membre de l’Ordre du Canada en ce début d’année. L’occasion pour Métro de discuter avec cette ambassadrice et fervente défenseuse des arts vivants.
«Je suis très touchée par cette reconnaissance, dit Ginette Noiseux. C’est aussi une marque de respect et de crédibilité pour faire entendre ma voix à une heure où certaines oreilles ignorent nos revendications.»
La directrice générale et artistique de l’Espace Go, une institution théâtrale située sur Le Plateau-Mont-Royal, fait référence à la crise qui heurte le milieu culturel depuis le début de la pandémie.
«Les arts vivants sont particulièrement ignorés. On assiste à un exode massif des professionnels qui n’ont pas d’autres choix que de se réorienter. Nos dirigeants y sont trop peu sensibles, mais ça va faire un très grand vide quand nos salles de spectacles pourront réouvrir», explique-t-elle.
L’Espace Go a toutefois décidé de continuer à travailler. Une représentation théâtrale représente au minimum 200 heures de conception, il est impensable pour Ginette Noiseux d’abandonner ces processus créatifs.
«On jongle avec les différents scénarios de réouverture de nos lieux, mais un spectacle ne se prépare pas quelques jours à l’avance, dit-elle. On se tient prêt car on a hâte de retrouver le public.»
Mme Noiseux en profite pour souligner le travail acharné de son équipe. «Un capitaine de bateau ne peut pas être meilleur que son équipe. Je ne le dis pas par humilité, c’est vraiment comme ça que ça marche», assure-t-elle.
Une emblème du théâtre expérimental
L’engagement viscéral de Ginette Noiseux pour l’industrie théâtrale s’est bâti au cours de ses 40 années de carrière.
Celle qui se destinait à une profession scientifique confie avoir intégré l’École nationale de théâtre du Canada (ÉNT) sans se douter qu’elle y consacrerait sa vie. «J’ai eu la chance de travailler rapidement avec de grands maîtres et puis cette rencontre, à la fin des années 1970, avec le théâtre expérimental», se souvient-elle.
Conceptrice diplômée, Ginette Noiseux intègre alors le Théâtre Expérimental des Femmes (TEF), un collectif dont le but est de promouvoir «la différence, l’originalité et la recherche artistique» en création féminine.
Quinze ans plus tard, le TEF deviendra l’Espace Go dont Ginette Noiseux est aujourd’hui la directrice générale et artistique. «J’ai eu la chance de connaitre le théâtre expérimental à ses débuts, petit mais magique, avec la fervente volonté de montrer la contribution des femmes dans le changement de la société, dit-elle. J’ai aussi la chance d’être aujourd’hui contemporaine d’une nouvelle génération militante, décomplexée, qui se pose des questions essentielles.»
Reconnaissante des rôles successifs qu’elle a occupé dans sa carrière, elle confie pudiquement avoir aussi eu la chance d’incarner celui de maman. «Mes enfants sont mon thermomètre, j’ai avec eux des conversations passionnantes et ils font évoluer ma vision des choses. Être mère est un rôle dans lequel on ne peut jamais se prendre pour acquis», dit-elle.
Réfléchir autrement, regarder par une autre fenêtre le paysage qui s’offre à soi, laisser aller sa curiosité pour s’enrichir de nouvelles rencontres: tel est le moteur de Ginette Noiseux, qui confie pour finir avoir très hâte de faire revivre la scène de l’Espace Go.