Bronx. Ce nom d’arrondissement new-yorkais évoque des images caricaturales de violence et de criminalité. Lorsqu’il est utilisé pour désigner un quartier de Montréal-Nord, il devient carrément stigmatisant, plaident des acteurs politiques du secteur.
Pour rapporter la récente opération antidrogue majeure du SPVM, des médias ont employé le surnom Bronx pour désigner le quartier nord-est de Montréal-Nord dans laquelle elle s’est entre autres déroulée. La formulation n’est pas passée inaperçue.
«Les gens font des efforts pour changer la perception du quartier. Il ne faut pas toujours qu’on associe Montréal-Nord à ce qui va mal», soutient le président du Parti québécois, Dieudonné Ella Oyono. C’est d’abord sur Twitter que ce résident de l’est de la métropole a dénoncé le recours à cette expression. Sa publication a généré des dizaines de commentaires, dont certains rappelant que le surnom est utilisé depuis des années.
En effet, en 2008, le témoignage d’une policière impliquée dans l’intervention qui a mené à la mort de Fredy Villanueva révélait que Bronx était utilisé par les policiers qui patrouillaient dans le quartier du nord-est. Douze ans plus tard, l’expression est encore employée dans les milieux policiers, selon La Presse.
«Peu importe d’où ça vient, il faut faire un effort collectif pour ne pas faire des associations douteuses», répond Dieudonné Ella Oyono.
Une autre réalité
Le terme suscite aussi l’indignation de Paule Robitaille, députée de Bourassa-Sauvé. L’ancienne journaliste croit que la réalité du Bronx lui est propre, et qu’elle ne colle pas à celle de Montréal-Nord.
«Pour une fille qui est déjà allée dans le Bronx, ça n’a absolument rien à voir avec le nord-est. Ça fait juste encore une fois stigmatiser Montréal-Nord. On tombe dans les clichés.»
Dans une déclaration écrite, la mairesse de l’arrondissement, Christine Black, a joint sa voix pour demander qu’on cesse d’associer ce secteur à l’arrondissement new-yorkais.
«En cette période où le poids des mots est autant discuté sur la place publique, renommer un de nos quartiers « Le Bronx » est pour le moins inacceptable. Ce quartier, c’est bien autre chose que les incidents qui causent de la peur et de l’insécurité. Ce quartier, c’est un milieu de vie vivant et diversifié, c’est des femmes et des hommes fiers, c’est des jeunes qui ont des rêves, c’est des familles qui souhaitent s’épanouir.»
Mauvaise cible
Des termes comme Bronx, «on relie ça à des endroits où il y a beaucoup d’interventions policières», souligne l’ex-policier Guy Ryan, confirmant que les agents du SPVM utilisent parfois des surnoms pour parler de certains secteurs ayant un taux élevé de criminalité.
Mais pour ce résident de Montréal-Nord, ce débat est avant tout politique. Si le terme peut être choquant pour certains, c’est surtout la réalité sur le terrain qui est stigmatisante et qui devrait capter l’attention.
«S’il n’y avait pas autant de trafic de stupéfiants, d’actes violents et d’interventions policières dans ces endroits-là, on ne qualifierait pas ces secteurs de cette façon-là. On pourrait utiliser d’autres mots dans les médias. Mais s’attaquer à ça, c’est une approche politique. J’y vais avec une approche pratique. On pourrait utiliser d’autres mots et ça va quand même cibler ce secteur.»