Alors que Montréal-Nord peine encore à rattraper son retard vaccinal, une étude financée par Ottawa tentera de comprendre pourquoi ce secteur du nord-est de Montréal a été si durement frappé par la COVID-19.
«L’étude vise à comprendre les facteurs de risque et le niveau d’immunité des résidents de Montréal-Nord face à la COVID-19 », explique Simona Bignami, l’une des chercheuses principales du projet.
La professeure agrégée de démographie à l’Université de Montréal collaborera avec des chercheurs de l’Association d’études canadiennes pour mettre en lien les caractéristiques du quartier, les comportements individuels des résidents ainsi que leur niveau d’immunité, obtenu soit par la vaccination, soit après avoir contracté la maladie.
En tout, 8000 Montréalais répondront à un questionnaire en ligne dans la prochaine année, dont la moitié à Montréal-Nord. Ils auront aussi la possibilité de subir un test sérologique.
Affichant un taux de 10 794,9 cas COVID-19 confirmés par 100 000 résidents depuis le début de la pandémie, Montréal-Nord est l’une des communautés les plus touchées au Canada. Malgré les efforts des autorités pour faire fondre le retard vaccinal, le taux de vaccination reste le plus bas à Montréal. À ce jour, à peine 57% de la population a reçu une première dose de vaccin. |
Facteurs de risque
Financé à hauteur de 767 000$ par Ottawa, le projet sera mené en partenariat avec le CIUSSS du Nord-de-l’Île-de-Montréal et des organismes du quartier.
Paroles d’exclues participera au comité de pilotage pour s’assurer que la recherche soit bien ancrée dans la communauté.
Plusieurs facteurs de vulnérabilité de la population du quartier sont déjà connus, souligne Grégoire Autin, chargé de la recherche au sein de cet organisme de lutte contre l’exclusion sociale.
«Montréal-Nord, c’est un désert médical et alimentaire. Les logements sont trop petits pour les familles, ça fait en sorte que les mesures sont difficiles à respecter», énumère le sociologue de formation.
Malgré cela, le projet de recherche n’en demeure pas moins nécessaire, selon lui, puisqu’il abordera davantage l’angle épidémiologique.
«Ça va nous permettre de comprendre au niveau individuel comment des caractéristiques comme l’appartenance à un groupe ethnique peuvent interagir avec des variables contextuelles comme le taux de pauvreté», fait pour sa part valoir Simona Bignami.
Appels à l’action
L’étude est importante, mais elle doit s’accompagner d’actions concrètes, prévient le conseiller de ville du district Marie-Clarac, Abdelhaq Sari, qui agit en tant que maire suppléant de l’arrondissement de Montréal-Nord en l’absence de Christine Black.
«Ça va fournir des données probantes pour prendre des décisions, mais il y a un travail concret qui doit être réalisé, des actions qui doivent être entreprises», insiste-t-il.
La directrice générale des Fourchettes de l’espoir, Brunilda Reyes, abonde dans le même sens. «Il y a une partie du problème qu’on connaît tous: c’est la fragilité des citoyens. Une étude c’est bien, mais pour que les jeunes collaborent à la vaccination, il faut qu’il y ait aussi un plan pour améliorer les conditions de vie du secteur», souligne celle qui a fondé l’organisme implanté dans le quartier depuis 25 ans.
Pour sa part, la députée libérale d’Henri-Bourassa-Sauvé, Paule Robitaille, demandait depuis des mois des données qui associent COVID-19 et marginalisation. Elle salue donc la tenue d’une étude sur le sujet.
«Si on veut parer à une autre situation comme celle-là, il faut mieux comprendre le phénomène, même si on a des indices. Santé publique et pauvreté, c’est souvent lié», a-t-elle commenté.