Montréal-Nord

Le CJE confronté à de nouvelles priorités

Bouchra Klaoua, directrice du Carrefour jeunesse-emploi Bourrassa-Sauvé.

Le Carrefour jeunesse-emploi (CJE) Bourrassa-Sauvé craint de devoir favoriser la clientèle qui bénéficie déjà de l’aide gouvernementale au détriment du 75% de jeunes «sans chèque» (comme Stéphanie) qui fréquentent l’organisme, si la réforme du gouvernement Couillard va de l’avant.

Dès le 1er avril, la réforme prévoit que l’organisme devra se concentrer sur les jeunes qui reçoivent de l’aide sociale ou de l’assurance-emploi. La directrice du CJE Bourassa-Sauvé craint que cette mesure mette de côté les jeunes de 16 et 17 ans et ceux qui occupent un emploi précaire.

«Ces jeunes ont de réels besoins et ils sont souvent plus mal pris que ceux qui sont sur l’aide sociale, souligne Bouchra Klaoua. Ils n’ont nulle part où aller. Est-ce qu’on va aussi leur fermer la porte?»

Plusieurs intervenants du milieu reconnaissent d’ailleurs le manque de ressources pour les jeunes couples.

«Les mineurs peuvent difficilement recevoir de l’aide sociale et c’est encore pire pour les garçons», explique Adela Saez, directrice de Rayon de Soleil, un organisme qui vient exclusivement en aide aux mères célibataires qui vont à l’école.

Les jeunes oubliés
En octobre dernier, le gouvernement Couillard a annoncé qu’il modifiera le fonctionnement et la mission des carrefours jeunesse-emploi (CJE). Jusqu’à maintenant, l’organisme était dédié à l’intégration sociale et économique des jeunes de 16 à 35 ans.

«Je veux recentrer leur mission, a affirmé le ministre de l’Emploi, François Blais, lors d’une conférence de presse en novembre. Il n’est pas question d’exclure des clientèles, mais je veux concentrer leurs efforts, et donc le financement qui vient de mon ministère, vers des jeunes qui sont plus éloignés du marché du travail, notamment les jeunes qui sont sur l’aide sociale ou des jeunes qui sont éligibles à l’assurance-emploi.»

Selon Monique Sauvé, présidente du Réseau des CJE du Québec, cette réforme «fragilisera des jeunes qui sont déjà à risque».

Une position que partage Mme Klaoua du CJE Bourassa-Sauvé.

«Jusqu’à maintenant, on pouvait aider tous les jeunes qui se présentaient à nous, quels que soient leur âge et leur statut socio-économique. On pouvait aider les jeunes étudiants, qui parfois ne savent pas vers quel programme aller; les jeunes travailleurs précaires qui gagnent des salaires de misère et qui voulaient améliorer leur condition. On pouvait aussi aider un jeune à retourner aux études.»

Réels besoins
Dorénavant, Mme Klaoua croit que des quotas seront imposés par catégorie de jeunes afin de prioriser ceux qui bénéficient de l’aide financière du gouvernement. Elle craint que cette mesure nuise à la prévention dans un quartier où le taux de décrochage scolaire est parmi les plus élevés de la métropole (36%).

«Nous rencontrons souvent des jeunes qui ont décroché et qui ne savent plus quoi faire. Nous voulons faire de la prévention pour éviter qu’ils se retrouvent sur l’aide sociale, soit qu’ils retournent aux études ou qu’ils se trouvent un emploi», explique-t-elle.

Mme Klaoua souhaite donc que les besoins réels du quartier soient pris en compte avant de définir les exigences. Elle invite d’ailleurs le ministre Blais à venir constater la situation sur le terrain.

«Si ces jeunes n’ont pas de lieu pour aller chercher de l’aide et d’intervenants capables de leur redonner confiance en eux, ils risquent d’aller vers la drogue et la prostitution», prévient Mme Klaoua.

Une rencontre entre les directions des CJE et Emploi-Québec aura lieu au cours de la semaine.

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