Lorsque Maxime Sauvé a enfourché son vélo, la nuit du samedi 7 juillet, il croyait profiter d’une paisible promenade nocturne. Au détour de la 27e avenue, il s’est plutôt retrouvé, extincteur en main, au milieu d’un immeuble en flammes, réveillant les résidants endormis.
«Je roulais sur Notre-Dame lorsque j’ai senti le feu; la rue était pleine de fumée, raconte le héros du jour. J’ai été surpris d’être le premier sur les lieux, il n’y avait personne du tout.»
Après avoir appelé les services d’urgences, il a tenté de pénétrer dans le bâtiment pour réveiller les résidants. «La porte était barrée, mais j’avais accès aux sonnettes, j’ai sonné et crié jusqu’à ce qu’on m’ouvre».
Mais ses faits d’armes ne s’arrêtent pas là. «J’ai pris l’extincteur et suis monté au 3e étage, raconte-t-il. J’ai essayé de défoncer la porte de l’appartement en feu, mais elle restait fermée».
La voisine, une dame de 88 ans, lui a ouvert la porte de son appartement. «Je suis passé par le balcon de cette voisine pour accéder au balcon de l’appartement en feu, et j’ai réussi à y défoncer la porte, résume M. Sauvé.
Personne n’était présent dans l’appartement. «J’ai ouvert la porte de la pièce du foyer d’incendie, j’ai vidé l’extincteur, en vain.»
Les flammes prenant de l’ampleur, l’homme a décidé de quitter l’appartement, mais la porte est restée bloquée. «J’ai donc dû ressortir par le balcon. Juste comme je sortais, une grosse boule de feu est passée par la porte du balcon; quelques secondes de plus et je ne serais pas là pour raconter l’histoire.»
L’homme a ensuite aidé la dame âgée de l’appartement voisin à sortir, en s’assurant que tout le monde était sorti.
L’humilité du héros
Sylvie Milot dormait avec son mari lorsque Maxime Sauvé est entré dans l’immeuble. «Il cognait à toutes les portes. C’est grâce à lui qu’on est vivants», raconte-t-elle, encore émotive.
La femme affirme qu’elle vouera une reconnaissance éternelle à Maxime Sauvé. «Ma fille vient de perdre son père, et M. Sauvé vient permettre que le seul parent qui lui reste soit en vie. J’avais également l’urne de son papa chez moi. Que dire de plus?»
Mme Milot affirme avoir été impressionnée par l’attitude de celui qu’elle qualifie de héros: «Il était très calme. Lorsque nous étions à l’extérieur, les gens ne réalisaient pas que c’était lui qui venait de sauver tout le monde!»
Lorsque mis au courant des éloges, Maxime Sauve a affirmé être convaincu que tous auraient agi ainsi. «Je suis surpris de tous les commentaires. Je suis fier, bien sûr, mais je n’ai fait que ce que j’avais à faire. J’ai tendance à minimiser ce que j’ai fait: je suis arrivée en premier, mais les voisins ont aidé aussi.»
Une cause inconnue
Selon le Service de sécurité incendie de Montréal, les causes de l’incendie sont toujours sous enquête.
Le feu n’a causé aucun blessé, mais plus de 100 000$ de dommages; 3 appartements demeurent pour le moment inhabitable. Huit personnes ont dû être relocalisées.
L’intervention a nécessité le déploiement de plus d’une quarantaine de pompiers, qui ont eu besoin de plus de 1h30 pour maîtriser les flammes.
L’ange qui l’accompagnait
Maxime Sauvé a perdu son fils Danyk, 13 ans, le 25 mai dernier, après un long combat contre un glioblastome multiforme de stade 4, une tumeur au cerveau.
«Je suis convaincu que Danyk tirait les ficelles», affirme le père. Sa promenade nocturne est un rituel qui lui permet de parler à son fils, et de se retrouver avec lui-même. «Mais je ne passe habituellement pas dans ce coin, c’est assez spécial. Je crois que c’est lui qui m’a montré le chemin.»
De plus, le héros du jour a composé le 911 à 1h34 du matin. Son fils, joueur du hockey et capitaine de son équipe, portait le numéro 34. «Lors de mes promenades, je demande à mon fils de m’envoyer des signes. C’est peut-être une coïncidence, mais…»
Pendant le combat de l’enfant, plusieurs personnes sur les réseaux sociaux ont d’ailleurs changé leur photo de profil pour un autocollant du numéro 34 de celui qui était «le fils de tout Pointe-aux-Trembles depuis 2 ans», selon son père. Certains l’ont fait dans les derniers jours pour rendre hommage au père, et à l’ange qui a guidé ses actes.
Il admet volontiers que le souvenir de son fils a été un facteur qui l’a poussé à l’action. «La minute que j’ai vu les flammes, il était clair que je n’attendais pas les pompiers. Si je peux faire quelque chose pour éviter à quelqu’un de perdre un enfant et de vivre ce que j’ai vécu, je n’hésiterai sûrement pas!».