Rivière-des-Prairies–Pointe-aux-Trembles

Le stigmate «territorial» du délinquant de Rivière-des-Prairies décortiqué

Jade Bourdages et Izara Gilbert.

La professeure à l’École de travail social de l’UQAM, Jade Bourdages, et l’étudiante à la maîtrise Izara Gilbert.

La médiatisation de la violence dans Rivière-des-Prairies–Pointe-aux-Trembles accentue la «stigmatisation territoriale» dont sont victimes les jeunes du secteur. Une violence symbolique qui se répercute de manière concrète et qui fait souffrir jeunes et intervenants, révèlent les témoignages recueillis par Izara Gilbert dans le cadre de son mémoire de maîtrise.

«Peu importe ce qu’ils font, les jeunes se sentent toujours vus comme des délinquants potentiels, que ce soit à l’école et dans les parcs. Ce regard-là porté sur eux, ça les affecte énormément, à plein de niveaux», explique Mme Gilbert.

L’étudiante en travail social à l’Université du Québec à Montréal (UQAM) a recueilli les témoignages de 15 intervenants et jeunes de l’arrondissement, tous immigrants de deuxième génération.

Elle a constaté que le regard porté sur eux était indépendant du fait qu’ils soient judiciarisés ou non.

Ce qui revient le plus souvent, c’est qu’ils se sentent comme des personnes de sous-classe. Ils ne se sentent pas considérés comme des membres à part entière de la société. C’est très fort.

Izara Gilbert, étudiante à la maîtrise en travail social à l’UQAM

Méfiance

Lorsqu’elle a commencé sa recherche sur le terrain, Izara Gilbert s’est heurtée à une méfiance généralisée des jeunes, mais aussi des intervenants.

Une méfiance bien documentée dans son mémoire de maîtrise, selon sa directrice de recherche, Jade Bourdages.

«C’est une méfiance généralisée à l’égard des gens qui viennent de l’extérieur. Ils sentent que leur parole est toujours utilisée contre eux», souligne la professeure à l’École de travail social de l’UQAM.

Une discrimination «territoriale»

Si, au départ, Izara Gilbert pensait décortiquer les récits de vie des jeunes, elle a plutôt rendu compte de récits de quartier pour témoigner de la discrimination vécue par les jeunes à Rivière-des-Prairies–Pointe-aux-Trembles.

«Lorsque les jeunes occupent les parcs ou des coins de rue spécifiques, on pense immédiatement qu’ils vont participer à des activités délinquantes, mais ce n’est pas le cas», explique l’étudiante.

Ce stigmate du délinquant de Rivière-des-Prairies concerne les policiers, mais il est aussi intériorisé par les intervenants, qui le reproduisent par un certain discours employé avec les jeunes, renchérit Jade Bourdages.

Pour la chercheuse, étudier les mécanismes de discrimination spécifiques à un territoire permet une compréhension plus fine des rapports sociaux.

«On aimerait explorer d’autres quartiers, pour voir comment d’autres types de discours affectent les relations sociales», conclut-elle.

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