La réforme de la santé amorcée en 2015 par le précédent gouvernement libéral aura eu pour effet de privatiser les services, de restreindre leur accessibilité tout en ouvrant la porte à des sous-traitants « peu qualifiés », selon une étude.
C’est ce que révèle une équipe de chercheurs de l’Université du Québec en Outaouais (UQO) et de l’Université McGill dans un rapport commandé par le Comité des usagers du Centre de santé et de services sociaux (CSSS) Lucille-Teasdale.
Ceux-ci se sont penchés sur les services offerts auprès des aînés dans les Centres hospitaliers de soins de longue durée dans les arrondissements de Rosemont – La Petite-Patrie et de Mercier – Hochelaga-Maisonneuve. Usagers, intervenants, cadres et gestionnaires ont tous été interrogés pour donner un portait de la situation.
« On a constaté que pour les usagers, la relation avec la personne qui administre les soins est très importante. Or, dans le secteur public, le personnel manque de plus de temps avec les tâches qui s’accumulent. Il est difficile d’établir de telles relations dans les conditions actuelles », souligne Mélanie Bourque, professeure du Département de travail social à l’UQO et coauteure du rapport.
Selon son enquête, le Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux (CIUSSS) de l’Est-de-l’Île-de-Montréal « se dégage de ses responsabilités en attribuant les périodes difficiles de recrutement (soirs et fins de semaine) aux agences privées ».
« C’est là que le bât blesse. On a vu l’arrivée de plusieurs agences avec les employés surchargés, trop occupés. Il y a beaucoup de roulement de personnel et ça fait en sorte que les usagers perdent une certaine stabilité, alors qu’ils sont dans une situation de vulnérabilité. La touche d’humanité nécessaire manque », indique Jeannelle Bouffard, présidente du comité des usagers du CSSS Lucille-Teasdale.
En effet, les heures de soutien à domicile fournies par le personnel du CSSS sont passées de 49% à 34% entre 2015-16 et 2018-19.
À l’inverse, les heures de soutien à domicile payées par les personnes à l’aide d’une subvention appelée « chèque emploi service » sont passées de 1% à 24% des heures totales durant la même période.
Toutefois, ces heures de soutien à domicile ont augmenté de 73%, principalement grâce à cette subvention et aux fournisseurs externes, telles que les agences de placement.
Cette dégradation de la qualité des services se fait dans un contexte où la population des 65 ans et plus vivant seule sur le territoire du CSSS Lucille-Teasdale atteint 47,5%, comparativement à 36,3% à Montréal.
On recommande dans le rapport entre autres de repenser « les indicateurs de qualité sur la base de l’expérience et des besoins des personnes et non seulement sur le nombre de services rendus » et de « mettre en place des mécanismes connaître la satisfaction » des usagers.