Alors que l’éclosion de coronavirus se répand dans les étages de l’hôpital Maisonneuve-Rosemont, contaminant patients et employés, des voix s’élèvent pour affirmer que l’établissement n’était pas prêt à faire face au tsunami.
La COVID-19 a atteint huit unités sur douze cette semaine dans le centre hospitalier, confirme le CIUSSS de l’Est-de-l’Île-de-Montréal.
Envoyée au front, Florence*, infirmière affectée aux urgences de Maisonneuve-Rosemont, a vite constaté l’ampleur de la propagation.
«Il y a beaucoup d’éclosions dans les étages», affirme-t-elle en entrevue avec Métro Média.
«On se demande si nos collègues ont été assez protégés», laisse tomber celle qui a préféré taire son nom pour éviter les représailles.
Entrer pour une chirurgie et attraper la maladie
L’éclosion de COVID-19 fait des victimes collatérales à Maisonneuve-Rosemont. Arrivé à l’hôpital pour une chirurgie dans les dernières semaines, Raymond* a bien malgré lui subi les contrecoups du virus.
À la suite de son opération, le patient s’est retrouvé dans la même chambre qu’une dame qui s’est plus tard révélée infectée au coronavirus. Dans les jours suivants, Raymond a commencé à ressentir des symptômes de fièvre.
La nouvelle est tombée comme «une claque en plein visage», raconte-t-il: COVID positif.
Alors que la situation continue d’alerter la santé publique dans les CHSLD, le Conseil pour la protection des malades (CPM) fait désormais allusion à un «cafouillage» dans les hôpitaux montréalais.
«Un hôpital, ça doit être un lieu sacré, l’endroit de la plus grande et de la meilleure protection», souligne le président du CPM, Paul Brunet.
«Quand on entre dans un hôpital, on ne s’attend pas à en sortir malade.» – Paul Brunet, président du CPM
Florence* exhorte malgré tout les malades de se présenter à l’hôpital.
«On a eu des patients qui ont attendu une semaine avant de venir malgré des douleurs au cœur. Ils arrivent dans des états beaucoup plus graves», lance l’infirmière.
Mesures suffisantes?
À l’hôpital depuis quelques temps, Raymond* a constaté les effets néfastes du manque de personnel.
«La semaine dernière, il y avait vingt et quelques employés absents. Tu voyais qu’ils étaient inquiets», relate-t-il.
«J’entendais les employés dire: on est chanceux, on est chanceux. Là, ils se mettent à dépister et, pouf, le virus apparaît.» – Raymond*, un patient de l’hôpital Maisonneuve-Rosemont
Les syndicats d’employés affectés à l’établissement de soins de santé ont également été avertis de la situation.
«À Maisonneuve-Rosemont en fin de semaine, il y a manqué beaucoup de monde. On a des gens en attente de résultats, des gens infectés, des gens anxieux», souligne le président du Syndicat des travailleuses et travailleurs du CIUSSS de l’Est de l’île de Montréal (STT-CEMTL), Éric Clermont.
Selon le CIUSSS de l’Est-de-l’Île-de-Montréal, 636 employés du secteur ont testé positifs au coronavirus.
S’ajoutent à cela des mesures de protection inefficaces, selon M. Clermont. «Le deux mètres, là, ça n’existe pas dans nos hôpitaux», ajoute le syndicaliste.
Confronté à cette hémorragie d’employés hospitaliers, le Syndicat des professionnelles en soins de l’Est-de-l’Île-de-Montréal (SPS-ESTIM) demande d’ailleurs des transferts de personnel en provenance des régions moins touchées par la COVID-19.
Contacté mercredi, le CIUSSS a indiqué que «le personnel disponible est suffisant et qu’aucun transfert de ressource n’est prévu».
En raison des éclosions à Maisonneuve-Rosemont et à l’hôpital Santa Cabrini, un peu au nord, le CIUSSS de l’Est-de-l’Île de Montréal a procédé mardi à la suspension de toutes les chirurgies qui nécessitent une hospitalisation dans ces établissements.
*Les noms des intervenants ont été modifiés pour protéger leur identité.