À l’approche du hall d’entrée de la salle Émile-Legault, les murmures étaient à peine perceptibles, même quelques minutes avant le début du spectacle de l’humoriste Philippe Laprise. Pourtant, l’endroit était bondé et tout le monde gesticulait. En s’y attardant, on comprenait qu’ils échangeaient en langue signée. La voix était devenue l’exception, pour un soir seulement.
Spectacle Interface traduit sur scène, en simultané, des spectacles pour les personnes sourdes. Humoriste comme interprète sont vêtus de la même manière. Comme si Philippe Laprise montait sur les planches avec son ombre.
Martin Asselin a toutefois beaucoup de mérite. Avec toute son énergie et son dévouement, il fait littéralement des pieds et des mains pour que l’assistance ne manque aucune blague. La chimie sur scène est palpable et chacun prend un malin plaisir à profiter des quiproquos résultant de cette traduction.
«Entendre les rires décalés entre ceux qui écoutent et ceux qui regardent le spectacle» a été un des moments savoureux de la soirée pour Philippe Laprise.
Julie Lafleur, qui a assisté à la soirée à Saint-Laurent, signe son appréciation et «lève son chapeau à la compagnie pour l’importance de l’accessibilité dans leur travail.» La résidente de la Rive-Sud se déplace régulièrement aux événements proposés.
Nouvelles possibilités
Philippe Laprise n’a pas hésité avant d’accepter le projet. En tant qu’ancien éducateur spécialisé, il y a vu «l’occasion d’offrir de nouvelles possibilités à un public dont les choix sont souvent restreints».
Son spectacle a été filmé au préalable afin d’en connaître les moindres détails. «La charge de travail n’augmente pas, ils sont très bien préparés», soutient l’humoriste. Seulement 15 minutes ont suffi avant l’entrée en scène pour faire quelques petits ajustements.
«C’est l’une des rares sorties où personnes sourdes et entendantes peuvent profiter du même événement», explique Martin Asselin, un des fondateurs de Spectacle Interface. Avec Joëlle Fortin, ils ont voulu améliorer l’offre d’activités disponibles pour la communauté des mal-entendants.
Pour Isabelle Dubé, c’est une occasion rêvée. «J’adore pouvoir profiter de ces sorties avec ma mère et mon oncle, sourds tous les deux, sans avoir à jouer les interprètes. Les traducteurs de langues signées sont rares pour les activités culturelles ou pour aller voir les baleines par exemple». Elle insiste sur le fait qu’elle ne s’en plaint pas, mais qu’elle apprécie cette nouvelle possibilité.
Dans l’assistance, les gens étaient nombreux à souhaiter l’accès à plus de spectacles de ce genre. Le prochain, Les Morissette, aura lieu en décembre. D’ici là, Phillippe Laprise assure déjà que son futur one man show sera présenté en duo signé.