Le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres s’est dit «déçu» dimanche par la COP25, regrettant «une importante occasion ratée» après l’adoption par la conférence d’un accord a minima sur le climat.
«La communauté internationale a perdu une occasion importante de faire preuve d’une ambition plus grande, en matière d’atténuation, d’adaptation et de financement face à la crise climatique», a-t-il déploré dans un communiqué. «Nous ne devons pas abandonner», a-t-il ajouté.
Le chef de l’ONU a assuré de sa détermination «à travailler pour que 2020 soit l’année où tous les pays s’engagent à faire ce que la science nous dit être nécessaire pour atteindre la neutralité carbone en 2050 et une augmentation de la température ne dépassant pas 1,5 degré».
La COP25 a échoué
Réunie à Madrid, la COP25 a souligné dimanche lors de sa séance de clôture le «besoin urgent» d’agir contre le réchauffement, mais sans parvenir à un accord sur des points essentiels pour répondre à l’urgence climatique et aux appels pressants des militants écologistes, notamment en raison des réticences de certains États.
Au terme de deux semaines de négociations difficiles, la conférence organisée à Madrid a échoué à trouver un accord sur les règles des marchés carbone internationaux, dernier volet du manuel d’utilisation de l’Accord de Paris de 2015.
Après une année marquée par des catastrophes climatiques tout azimut, les appels vibrants de millions de jeunes descendus dans la rue derrière la jeune Suédoise Greta Thunberg, et des rapports scientifiques toujours plus glaçants, les quelque 200 signataires de l’Accord de Paris étaient sous une pression sans précédent pour cette COP25 présidée par le Chili mais délocalisée à Madrid en raison de la crise qui frappe le pays d’Amérique du sud.
Mais au terme de cette conférence qui a débordé de plus de 40 heures son programme initial, tout le monde n’a pas vu dans les textes adoptés dimanche le reflet de cette demande d’actions radicales et immédiates.
Le texte final appelle effectivement à des «actions urgentes» pour réduire l’écart entre les engagements et les objectifs de l’accord de Paris de limiter le réchauffement à +2°C, voire +1,5°C. Mais le langage est «tortueux» et le résultat «médiocre», a estimé Catherine Abreu, du Climate Action Network.
«Les principaux acteurs dont on espérait des avancées n’ont pas répondu aux attentes», a déclaré Laurence Tubiana, architecte de l’Accord de Paris, notant toutefois que l’alliance des États insulaires, européens, africains et latino-américains, avait permis d’«arracher le moins mauvais résultat possible, contre la volonté des grands pollueurs.»
Le premier texte sur les ambitions présenté samedi par la présidence chilienne avait provoqué une levée de bouclier de ces États, forçant à un nouveau round de consultations.
«Aujourd’hui les citoyens du monde nous demandent d’aller plus vite et mieux, que ce soit en matière de finance, d’adaptation, de réduction des émissions», a déclaré la ministre chilienne de l’Environnement Carolina Schmidt.
«Ces discussions reflètent le décalage entre les dirigeants d’un côté et l’urgence montrée par la science et les demandes des citoyens dans les rues», résume Helen Mountford, du think tank World Resources Institute, estimant que l’esprit de l’Accord de Paris n’était plus qu’un «lointain souvenir».
Au rythme actuel des émissions de CO2, le mercure pourrait gagner jusqu’à 4 ou 5°C d’ici la fin du siècle. Et même si les quelque 200 signataires de l’Accord de Paris respectent leurs engagements, le réchauffement pourrait dépasser les 3°C.
Alors pour tenter de réduire cet écart, tous les Etats doivent soumettre d’ici la COP26 à Glasgow l’année prochaine une version révisée de leurs plans de réductions d’émissions. Mais les deux semaines de discussions ont mis en pleine lumière une division flagrante au sein de la communauté internationale en matière d’ambition.
«Nous n’abandonnerons pas»
Sans surprise, quasiment aucun des grands pays émetteurs n’a fait d’annonce significative pour réhausser ses ambitions, ni donné de signe clair d’une telle intention pour 2020. Évidemment pas les États-Unis qui quitteront l’accord de Paris en novembre prochain, mais pas non plus la Chine ou l’Inde.
Ces deux grandes économies insistent, avant d’évoquer leurs propres engagements révisés, sur la responsabilité des pays développés de faire plus et de respecter leur promesse d’aides financières aux pays en développement.
Également dans le collimateur des défenseurs de l’environnement, l’Arabie Saoudite, ainsi que le Brésil et l’Australie tous deux accusés de vouloir introduire des dispositions décriées dans les règles sur les marchés carbone, dont l’adoption a été à nouveau reportée.
Parmi les grands émetteurs, nombre d’observateurs ont au contraire souligné le rôle positif de l’Union européenne (UE) qui a endossé cette semaine à Bruxelles l’objectif de neutralité climatique d’ici 2020, malgré les réserves de la Pologne.
L’UE doit maintenant s’atteler à la tache de présenter en 2020 un réhaussement de ses engagements pour 2030.
Prendre ce «rôle de leader» lui «donnerait la capacité de travailler avec d’autres gros émetteurs comme la Chine et l’Inde pour qu’ils augmentent leurs ambitions également», a commenté Alden Mayer, de l’Union for Concerned Scientist.
Les Britanniques qui ont officiellement été désignés pour organiser la COP26 ont eux promis de tout faire pour que Glasgow soit un succès.
«Nous avons bien entendu que vous vouliez que nous construisions à partir des efforts de nos amis chiliens pour faire écho à l’urgence de la science et aux voix de ceux qui nous demandent d’aller plus loin, plus vite», a déclaré leur représentant Archie Young.
Greta Thunberg a d’ores et déjà prévenu que cette année de préparation se ferait sous la pression de la rue.
«La science est claire, mais la science est ignorée. Quoi qu’il arrive, nous n’abandonnerons pas. Nous ne faisons que commencer», a-t-elle lancé sur Twitter.