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Immunité confirmée pour un agent américain qui a tué un adolescent mexicain à la frontière

Sergio Hernandez

Maria Guadalupe Guereca visite la tombe de son fils Sergio Hernandez à Ciudad Juarez au Mexique, tombé sous les balles d’un garde-frontière américain

Rédaction - Agence France-Presse

La Cour suprême des États-Unis a refusé d’accorder le droit à une famille mexicaine de poursuivre en justice un garde-frontière américain qui avait tué leur fils alors qu’ils se trouvaient chacun de leur côté de la frontière.

Cette décision, très sensible diplomatiquement, a été prise à une courte majorité des cinq juges conservateurs, contre les quatre magistrats progressistes.

Le gouvernement du Mexique a aussitôt réagi en affirmant regretter la décision de la Cour et en exprimant sa «profonde préoccupation» quant au précédent que cette mesure pourrait créer.

Le 7 juin 2010, Sergio Hernandez, 15 ans, jouait avec trois amis dans le lit asséché du Rio Grande, qui sépare El Paso au Texas de Ciudad Juarez au Mexique. Selon sa famille, ils s’amusaient à toucher le grillage américain.

L’agent américain Jesus Mesa, qui se trouvait sur le sol américain, avait ouvert le feu sur le petit groupe. Touché mortellement, Sergio Hernandez était mort sur le sol mexicain.

Le garde-frontière avait bénéficié d’une immunité de fait, les tribunaux estimant que la loi américaine ne pouvait s’appliquer pour un Mexicain mort au Mexique.

Les parents de Sergio Hernandez, soutenus par le gouvernement mexicain, avaient réussi à faire monter l’affaire jusqu’à la Cour suprême une première fois en juin 2017. Celle-ci avait refusé de trancher, renvoyant le dossier devant une cour d’appel de la Nouvelle-Orléans.

Cette cour avait ensuite confirmé l’immunité du garde-frontière. Mais, saisi dans un dossier comparable, un autre tribunal avait ensuite rendu une décision contradictoire, forçant la Cour suprême à intervenir à nouveau.

Le gouvernement de Donald Trump, qui a fait de la lutte contre l’immigration illégale une de ses priorités, avait demandé à la Cour suprême de garantir l’immunité du garde-frontière. «Imposer une responsabilité pénale à des agents qui exercent une fonction importante pour la sécurité nationale pourrait compromettre leur action», avait-il plaidé.

La haute Cour lui a donné raison, en estimant que «des tirs à la frontière avaient des implications en terme de diplomatie et de sécurité nationale».

Pour sa majorité conservatrice, ce genre de litiges doit être réglé par voie diplomatique. «Si le Congrès a décidé de ne pas créer de recours en justice, il ne nous revient pas de nous mettre à sa place», a-t-elle également avancé.

Les quatre magistrats progressistes ont exprimé leur désaccord, sous la plume de la doyenne Ruth Bader Ginsburg. «Ni la politique étrangère des États-Unis ni leur sécurité nationale ne sont menacés par ces poursuites», a-t-elle écrit en leur nom.

La puissante organisation de défense des droits civiques ACLU a déploré une décision «d’autant plus grave que l’administration de Donald Trump a développé une rhétorique militaire à la frontière».

Selon son avocat Lee Gelernt, «les gardes-frontières ne devraient pas avoir une totale immunité pour tuer des adolescents mexicains de l’autre côté de la frontière.»

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