Le trajet de train reliant la métropole québécoise à la Grosse Pomme prend au minimum 10 heures, ce qui est long par rapport à l’avion, ou même la voiture. Cette ligne, nommée l’Adirondack, bénéficiera d’ici six ans d’un train plus rapide et plus efficace. Mais aucun TGV ne se profile à l’horizon.
Une amélioration du service de l’Adirondack est prévue par la société d’État américaine responsable de cette ligne, Amtrak. Cette dernière, qui jouit d’investissements ferroviaires records de l’administration Biden, a annoncé en décembre le lancement du Airo, une nouvelle rame de train. Entre 2026 et 2029, les Airo prendront d’assaut la ligne Adirondack et remplaceront la flotte vieillissante qui y roule actuellement.
Ces trains nouvelle génération sont plus rapides et peuvent atteindre une vitesse maximale de 200 km/h, contre 177 km/h actuellement, et la locomotive est intégrée aux voitures passagers. Avec la flotte actuelle, l’Adirondack change de locomotive à Albany, une perte de temps qui disparaîtra avec l’arrivée des Airo.
Ces nouvelles rames seront par ailleurs plus modernes, universellement accessibles et confortables. Elles comporteront une classe Affaires, actuellement inexistante. Les rames auront de plus grandes vitres, ce qui permettra aux passagers de profiter des paysages, alors que la ligne Adirondack passe entre le massif des Adirondack et le lac Champlain ainsi que par la vallée de l’Hudson.
Quels gains de temps?
L’impact du passage de la vitesse maximale à 200 km/h et de l’élimination du changement de locomotive sur le temps de trajet entre New York et Montréal n’a pas encore été évalué, révèle Amtrak dans un courriel à Métro. Notons qu’au Canada, VIA Rail déploie le même type de rame que l’Airo, une Siemens Venture, sans gain de temps pour le trajet Toronto-Montréal. Cette ligne roulait cependant déjà à une vitesse plus importante.
Notons qu’en Amérique du Nord, les temps de trajet sont souvent longs en raison de la priorité donnée au fret sur les chemins de fer. Amtrak n’a pas été en mesure d’expliquer précisément la lenteur actuelle de l’Adirondack à Métro.
Pour améliorer l’efficacité des trains américains, le gouvernement de Joe Biden a investi une somme historique de 66 milliards $ US (90,3 milliards $ CA) dans les infrastructures ferroviaires américaines. Lorsqu’elle est interrogée à ce sujet, Amtrak affirme que c’est au New York State Department of Transportation de décider si ces investissements pourraient améliorer le tracé de l’Adirondack et permettre d’augmenter la vitesse de croisière du train.
Le lancement du train Airo et des investissements en infrastructures pourraient déjà améliorer le temps de trajet de la ligne Montréal-New York, mais il reste un dernier obstacle, les douanes. Le projet de déplacer les douanes ferroviaires de Lacolle à la gare Centrale de Montréal est dans les cartons depuis plusieurs années, mais ne s’est jamais concrétisé.
«Une zone de dédouanement à la gare de Montréal devrait être envisagée», croit Michel Leblanc, président de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, qui ajoute que cela s’apparenterait aux douanes américaines déjà présentes à l’aéroport Trudeau de Montréal.
Le gouvernement du Québec consacre ainsi chaque année une somme à l’étude de ce projet. Dans le budget 2022-2023, Québec dépensait 1 M$, sur deux ans, pour «accélérer le transport de passagers par train entre Montréal et New York», dans le but de l’aménagement de services de prédédouanement. Reste à voir si la province profitera du retour de l’Adirondack pour aller de l’avant avec ce projet.
Un train très lent
En l’absence de train rapide, si l’Adirondack est un agréable trajet pour le tourisme, il ne fait pas le poids pour les voyages d’affaires et ne concurrence pas l’avion, constate Michel Leblanc. Pour cause, le trajet de 613 km prend environ 10h50 à parcourir, le train roulant ainsi à une vitesse moyenne de 60 km/h. C’est sans compter que le train peut parfois être à l’arrêt pendant près de deux heures à la frontière.
En voiture, le trajet prend entre 6h et 6h30 – sans compter le temps à la douane. À titre de comparaison, Toronto est située à 5h15 de voiture de Montréal et à 5h de train. De surcroît, sept trains partent de Montréal pour Toronto, contre un tous les deux jours de Montréal vers New York.
Malgré la basse vitesse actuelle, «la réouverture de cette route peut faciliter les déplacements touristiques», analyse M. Leblanc, qui rappelle que l’Adirondack dessert aussi le nord de l’État de New York. Les citoyens américains pourront ainsi venir visiter Montréal plus facilement et, inversement, les citoyens canadiens pourront se rendre plus aisément dans des centres touristiques desservis par le service, comme Saratoga Springs.
La rame actuellement utilisée peut pourtant atteindre 177 km/h. Un TGV, comme ceux en France, pourrait, lui, atteindre 320 km/h et ainsi réduire le temps de trajet à 1h55, dans le meilleur scénario, sans arrêt ni ralentissement.
Un TGV Montréal-New York?
Pour répondre aux besoins du milieu des affaires, M. Leblanc perçoit la discussion sur les TGV en Amérique du Nord comme intéressante, car le train, lorsqu’électrique, émet considérablement de gaz à effet de serre que l’avion. Si les débats sur un train grande vitesse (TGV) vers Toronto et Québec vont bon train, celui qui pourrait relier Montréal et New York ne fait pas autant parler.
Un TGV qui relierait ces deux métropoles majeures du continent a pourtant été abordé pour la première fois il y a près de 50 ans, par le maire Jean Drapeau. Depuis, le projet de TGV a déraillé et n’a jamais vraiment démarré. Il est jugé complexe, le tracé devant passer dans le massif des Adirondack, une zone protégée.
De plus, un TGV est un projet très coûteux. Actuellement, les débats au Canada portent surtout sur le TGV dans le corridor Windsor-Québec, en passant par Montréal et Toronto. Sollicités sur la possibilité d’un TGV Montréal-New York, ni le cabinet de la mairesse de Montréal, Valérie Plante, ni la délégation générale du Québec à New York ne se sont exprimés sur leur soutien à ce projet, souvent évoqué, mais jamais réalisé.