Deux jours après la fusillade pendant les festivités de Hanouka à Bondi Beach, en Australie, la communauté juive de Montréal s’inquiète du climat qu’ils vivent ici et ailleurs au Canada. Certains se posent la question: un tel attentat antisémite pourrait-il avoir lieu ici?
«Oui. Absolument oui», affirme Steve Sebag, ancien président de la Fédération CJA. «On se dit tous que c’est une question de « quand », pas de « si ». On est extrêmement vigilants, on doit l’être.»
M. Sebag estime que le climat est tendu depuis l’attentat du 7 octobre 2023 qui a déclenché le plus récent conflit entre Israël et le Hamas. Il voit une normalisation de certains discours qui dépassent la critique des actions de l’État hébreu.
«Quand les gens scandent « from the river to the sea« , ils ne se rendent pas compte que ce qu’ils réclament c’est un génocide. […] À un moment, il y a un sans dessein qui va prendre ça littéralement.»
Ce slogan, qui évoque la création d’un état unique qui couvre le territoire entre le Jourdain et la Méditerrannée, est fort controversé. Certains mouvements pro-palestiniens l’utilisent comme cri de ralliement pour la paix, mais de nombreux Juifs le voient comme un appel à la destruction d’Israël et à l’expulsion de la communauté juive du Proche Orient.
Des gestes antisémites dans toutes les sphères
Les commentaires de Steve Sebag surviennent alors que l’organisme B’nai Brith Canada publie une lettre ouverte dénonçant l’augmentation des gestes antisémites au Canada.
L’organisme a recueilli des commentaires de personnes juives ayant vécu de la discrimination ou de la violence à cause de leur appartenance religieuse. En 2024, un total de 6219 incidents ont été répertoriés.
J’ai quitté la France avec ma femme et mes deux filles il y a dix ans parce que l’antisémitisme était devenu trop lourd à porter au quotidien. Je suis venu à Montréal pour offrir une vie normale à ma famille. Mais depuis le 7 octobre, je reconnais des réflexes que je pensais avoir laissés derrière moi… se taire, observer, faire attention.
Laurent Saumon, extrait d’une lettre ouverte diffusée par B’nai Brith Canada
La lettre note que toutes les sphères de la société sont affectées par cette situation. Environ 45% des médecins juifs subissent des incidents antisémites en milieu hospitalier, indique-t-on. La tension est aussi à son comble dans les universités, théâtres de nombreuses manifestations pro-palestiniennes, mais aussi d’incivilités diverses.
La tension affecte aussi les Musulmans de Montréal et du Canada. Il y a quelques jours le Forum musulman canadien dénonçait la montée de l’islamophobie après une agression à Mississauga.
Le FMC a déploré l’attaque de Bondi Beach et a exprimé ses condoléances aux familles des victimes. L’organisme a aussi souligné le fait qu’un homme musulman a réussi à désarmer un des assaillants.
«Cet horrible geste haineux nous rappelle que lorsque la haine n’est pas contrée, aucune communauté n’est à l’abri», affirme le FMC.
Présence policière accrue
Dimanche, la mairesse Soraya Martinez Ferrada a demandé au Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) d’augmenter la surveillance policière autour des institutions juives et des événements entourant la célébration de Hanouka.
«En prenant connaissance de l’attentat, j’ai parlé au chef du SPVM, Fady Dagher, pour que nos policiers augmentent leur niveau de vigilance auprès des communautés juives de Montréal. Ces communautés ressentent de l’inquiétude et avec nos policiers, on est là pour les appuyer», a-t-elle dit sur X.
Steve Sebag se réjouit de cette décision. Il souligne d’ailleurs que Mme Martinez Ferrada était présente dimanche lors d’une activité soulignant Hanouka au Chabad de NDG.
Lundi, la Ville de Montréal a adopté une résolution dénonçant l’attentat de Bondi Beach et réitérant sa volonté de combattre les actes haineux. La résolution a été adoptée à l’unanimité.
