De passage en Allemagne, j’ai mis la main sur les plus récents plans du futur Insectarium de Montréal, que je vous présente aujourd’hui. Récit de mon périple.
Me voilà, debout, à côté d’un édifice anodin dans un secteur industriel déstructuré de Berlin, adjacent à des voies ferroviaires.
Tout semble indiquer que je me suis trompé d’adresse pour mon rendez-vous, jusqu’au moment où j’aperçois sur une boîte aux lettres les mots Kuehn Malvezzi.
C’est ce cabinet d’architecture allemand qui a remporté, en 2014, conjointement avec les firmes montréalaises Pelletier de Fontenay et Jodoin Lamarre Pratte, le concours de design international qu’avait lancé Espace pour la vie pour reconstruire l’Insectarium de Montréal.
Leur pratique, qui se concentre en grande partie depuis 15 ans sur les concours, s’est largement développée autour de la conception de pavillons muséaux et de galeries d’art. Mais oubliez les architectures tape-à-l’œil et monumentales qui caractérisent tant de musées du monde: la sobriété et les lignes épurées définissent mieux leur ADN.
«On est irrité à force de voir tous ces musées plus grandioses les uns que les autres, m’explique Wilfried Kuehn, associé principal. On construit ces grosses structures coûteuses pour qui, pour quoi? Pour mettre en valeur l’art ou les collectionneurs, les gouvernements, qui se cachent derrière? […] Notre pratique est plutôt basée sur l’architecture invisible, c’est-à-dire une architecture qui s’efface au profit du contenu.»
C’est d’ailleurs cette approche qui prévaut actuellement dans la conception de la nouvelle mouture de l’Insectarium, qui s’apparentera à une extension du paysage naturel avoisinant plutôt qu’à un objet architectural déposé à la frontière du parc Maisonneuve. Son design simple, mais efficace visera à stimuler nos cinq sens au fil d’un parcours métaphorique qui nous plongera dans la peau – ou la carapace, devrais-je dire – des insectes.
Concrètement, le visiteur sera progressivement isolé du contexte urbain pour s’infiltrer sous terre, dans la pénombre et l’humidité, où vivent des milliers de petites bêtes. Plus loin, entre les espaces éducatifs et immersifs, la lumière jaillira en pénétrant dans le jardin des papillons, qui se trouvera sous une immense serre de verre.
«C’est excitant, mais complexe, de bâtir un Insectarium, car ça représente quatre éléments en même temps, indique M. Kuehn. C’est un musée avec ses papillons et d’autres spécimens épinglés [aux murs]. Un zoo avec les insectes vivants qui se promènent. Un espace de recherche pour les scientifiques. Mais c’est aussi, et j’avoue avoir sous-estimé cette partie initialement, un jardin botanique avec de nombreux végétaux nécessaires au cycle de vie des insectes. En fait, les plantations représentent la moitié du musée.»
L’équipe du concepteur travaille ainsi de concert, depuis des mois, avec des architectes de paysage et plusieurs scientifiques d’Espace pour la vie afin de mieux saisir le mouvement des insectes, leur alimentation et leur cycle de reproduction. Des éléments cruciaux pour assurer leur survie. «Le défi est de générer un paysage cohérent qui sera, en réalité, créé de toutes pièces», ajoute-t-il.
Faisant l’aller-retour pratiquement chaque mois entre Berlin et Montréal, l’architecte a bon espoir de pouvoir terminer son chantier en 2019. Il sera d’ailleurs de passage à l’École d’architecture de l’Université McGill lundi prochain pour exposer le projet au grand public.