Comme la meute, j’ai suivi religieusement la confession de Lance Armstrong chez Oprah. Et maintenant, qu’allons-nous faire face à une telle dérive?
Depuis l’affaire du dopage de Ben Johnson lors du 100m aux JO de Séoul, et surtout la rumeur du dopage de la majorité des finalistes de cette même épreuve, notamment le Dieu Carl Lewis, j’ai perdu toutes mes illusions. J’ai, alors, fini par bouder les JO de Barcelone en 1992, et d’Atlanta en 1996.
Et puis, de la brume a surgi Lance Armstrong, en 1997, comme un sauveur. L’exploit d’un rescapé du cancer dominant après sa rémission, m’a redonné la foi du sport, celle du dépassement de soi et du respect des adversaires et du public.
J’ai été incroyablement ému par la conquête des sept maillots jaunes en ligne. J’ai même accumulé les enregistrements, sur VHS, des trois derniers exploits de Lance sur le Tour. Ne pouvant pas suivre en direct les retransmissions des épreuves sur Canal Évasion, j’enregistrais les étapes. Et le soir, après le boulot, je rentrais chez moi très excité à l’idée de pouvoir voir au complet l’étape du jour.
Malgré le déclenchement d’autres scandales de dopage, je suis resté fidèle à Lance. Malgré l’acharnement médiatique, notamment celui du quotidien français, l’Équipe, pour attirer l’attention sur l’épidémie du dopage et les invraisemblables victoires d’Armstrong, j’ai persévéré dans le déni. Pour me protéger, je me disais que c’était juste des Français qui n’arrivaient pas à digérer la suprématie d’un Américain sur les Champs-Élysées.
Même quand les premiers coureurs et coéquipiers de Lance l’ont confronté, comme Tyler Hamilton et Floyd Landis, j’ai continué à croire en son innocence. Jusqu’au jour où George Hincapie, le fidèle parmi les fidèles lieutenants de Lance, son inséparable copain depuis l’adolescence, celui qui connaissait l’histoire mieux que tout le monde, ait fourni des informations à charge contre son vieux pote. Et il n’était pas le seul, Leipheimer, Vande Velde, Zabriskie, trois de ses anciens coéquipiers lui ont emboîté le pas. Bien avant la sortie de chez Oprah, j’ai été lessivé.
À cause de l’argent, des sponsors et de leurs enjeux financiers dopés par le marketing à outrance, le sport de compétition est à la dérive. Tous les athlètes repentis l’ont avoué. Dans cet environnement mal sain et opaque où l’usage de produits dopants est répandu, il est devenu de plus en plus clair aux athlètes que pour faire face aux «meilleurs», au plus haut niveau, il fallait recourir à des produits et des techniques «favorisant» la performance.
Certains se plairont à stigmatiser Lance, mais l’enjeu et le défi sont ailleurs. Comme l’a si bien vulgarisé l’invité d’Oprah dans ses aveux télévisés : «De mon point de vue, se doper ça faisait partie du métier. (…) C’est comme gonfler des pneus ou mettre de l’eau dans les bouteilles.»
Si Lance Armstrong a contourné facilement tous les contrôles, c’est que d’autres athlètes ont réussi à passer entre les mailles du filet. Les ravages du dopage dans le sport sont incommensurables, pourtant, tout le monde fait l’autruche en tirant sur le messager!