WASHINGTON — La participation de Donald Trump à une assemblée publique devant des électeurs indécis de la Pennsylvanie, mardi soir, a offert un aperçu de la prestation qu’il pourrait livrer au premier débat contre son rival démocrate, Joe Biden, dans deux semaines.
Lors de l’événement diffusé sur le réseau ABC, M. Trump a asséné des attaques prévisibles contre son adversaire, et a énoncé quelques promesses vagues. Mais il a aussi eu de la difficulté à défendre son bilan de la gestion de la pandémie de COVID-19 qui a fait près de 200 000 morts aux États-Unis.
Bien que les conseillers du président aient tenté d’éluder le sujet du virus, l’assemblée publique a clairement démontré que la campagne électorale sera un référendum sur le président et sa gestion de la pandémie.
Voici d’autres faits saillants de la soirée qui a mis la table pour le premier débat prévu le 29 septembre:
— Le déni
Tous se rappellent que le président Trump avait dit en février que le coronavirus disparaîtrait «comme un miracle». Son opinion n’a pas beaucoup changé sept mois plus tard.
M. Trump a remis en question certains principes scientifiques de base à propos du virus, notamment sur le port du masque, qui est fortement recommandé par les Centres pour le contrôle et la prévention des maladies.
«Il y a des gens qui ne pensent pas que les masques sont bons», a déclaré M. Trump, mentionnant les serveurs qui ont de la difficulté avec les couvre-visages.
Le président a encore une fois tenté de démentir l’admission qu’il a faite au journaliste Bob Woodward, selon laquelle il avait tenté de minimiser la menace de la COVID-19 aux Américains. «Ouais, eh bien, je ne l’ai pas minimisée. En fait, à bien des égards, je l’ai amplifiée en matière d’action», a-t-il plaidé.
Sur un autre sujet, il n’a pas reconnu les injustices historiques touchant la communauté afro-américaine.
«Eh bien j’espère qu’il n’y a pas de problèmes raciaux», a-t-il soutenu.
— Quelle préparation au débat?
Pour l’instant, Donald Trump ne s’est pas prêté à une préparation formelle pour ses débats contre M. Biden. Selon lui, ses échanges avec les journalistes suffiront à le préparer. Les sympathisants du président ont d’ailleurs été satisfaits mardi soir de la prestation de M. Trump, qui a pour une rare fois fait une démonstration d’empathie pendant la soirée.
Mais en privé, certains s’inquiètent que M. Trump ne subisse le même sort que beaucoup de ses prédécesseurs, qui ont tendance à devenir complaisants à la Maison Blanche et qui peuvent devenir agités lorsqu’ils affrontent pour la première fois leur rival aux élections générales.
Certains alliés ont gentiment conseillé à M. Trump de faire ses devoirs, mais le président a largement ignoré ces avertissements.
— Des plans politiques à long terme
«Nous signons un plan sur les soins de santé d’ici deux semaines», a annoncé Donald Trump le 19 juillet. Il sera présenté «espérons-le, avant la fin du mois», a-t-il précisé au début du mois d’août.
Aucun plan n’a été signé, et peu de gens s’attendent à ce qu’il arrive avant l’élection.
Les promesses non tenues du président Trump ont été beaucoup abordées, mardi soir, et le principal intéressé a martelé qu’il avait un plan — mais il a refusé de donner des détails ou d’expliquer pourquoi il a attendu trois ans et demi pour le dévoiler.
«C’est tout prêt, et c’est un bien meilleur plan pour vous, un bien meilleur plan», a-t-il répété.
M. Trump a fait des promesses semblables sur l’immigration, un autre sujet sur lequel il promettait d’agir.
«Nous faisons quelque chose sur l’immigration, qui je crois, sera très fort, parce que nous voulons que les gens viennent dans notre pays, a-t-il expliqué. Et dans très peu de temps, nous allons l’annoncer. Et je crois que cela aura un impact considérable.»
— De vrais problèmes, de vraies émotions
Les questions des électeurs indécis étaient beaucoup plus précises que celles que reçoit normalement le président.
Un homme diabétique a expliqué qu’il devait éviter les gens qui ne pratiquent pas la distanciation sociale ou qui ne portent pas le masque — ce qui arrive souvent dans les événements de campagne du président Trump. «Pourquoi avez-vous laissé tomber les gens comme moi?», a demandé Paul Tubiana, qui dit avoir voté pour le candidat républicain en 2016.
Le président décidait parfois de commencer sa réponse avant même que les participants aient fini de parler, mais Ellesia Blaque ne l’a pas laissé faire. La dame lui a demandé comment les gens avec des conditions préexistantes, qui travaillent fort, pouvaient rester assurés. «Arrêtez s’il vous plaît et laissez-moi finir ma question, monsieur», a-t-elle lancé.
Et Flora Cruceta a posé une question au nom de sa défunte mère, une immigrante de la République dominicaine qui est devenue citoyenne américaine. «Que changerez-vous pour que les gens comme moi, et comme elle, deviennent des citoyens et votent?», lui a-t-elle dit.
Donald Trump, qui a travaillé à réduire l’immigration légale et illégale, a promis un autre plan qui sera «populaire auprès de tout le monde». Il semble avoir mal compris les propos de la dame, qui disait que sa mère était morte du cancer du sein, puisqu’il a commencé à parler du coronavirus et d’un éventuel vaccin.
— Les modérateurs sont importants
L’animateur d’ABC News, George Stephanopoulos, a confronté le président Trump sur certains sujets, mais il n’a pas toujours relevé les inexactitudes dans ses affirmations.
En répondant à une question sur les conditions préexistantes, M. Trump a prétendu que les démocrates préféraient la médecine socialisée, plutôt que son plan «fort» pour protéger les Américains souffrant de maladies.
«Monsieur le président, je dois vous arrêter ici. Premièrement, Joe Biden s’est montré contre l’assurance santé pour tous dans les primaires», a nuancé M. Stephanopoulos.
L’animateur a poursuivi en disant que l’administration Trump tentait d’abolir l’Obamacare, qui assurait une couverture pour les gens ayant une condition préexistante. Il a rappelé que M.Trump avait promis un nouveau plan, qui n’est jamais arrivé.
Sur un autre enjeu important, M. Trump a affirmé que son adversaire démocrate «voulait augmenter les impôts de tout le monde».
M. Stephanopoulos est passé au prochain sujet sans mentionner que M. Biden avait promis de ne pas augmenter les impôts des Américains qui gagnent moins de 400 000 $ US. Moins de 2 % des ménages américains déclarent ce niveau de revenu.
Face à un modérateur et non à un adversaire, M. Trump a souvent pu donner le ton à la discussion. Il a montré sa tendance à donner des réponses sinueuses, qui n’abordent pas directement le sujet en question.
Malgré les questions pointues des électeurs sur son bilan et certaines sous-questions sur ses inexactitudes, le président Trump continuait de parler. Il a d’ailleurs évité de montrer son tempérament explosif comme il le fait parfois lors des conférences de presse avec les journalistes.
Dans un débat contre un adversaire, et avec une limite de temps, le défi sera bien différent pour Donald Trump. Devant M. Biden, il sera difficile pour lui d’éviter des questions plus corsées.
Jonathan Lemire et Kevin Freking, The Associated Press