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Mon pays, c’est l’hiver

En mars 2002, j’ai foulé pour la première fois le sol montréalais. Il faisait un froid de canard! Pourtant, j’avais entendu parler des affres de l’hiver québécois, toute une épreuve pour un nouvel arrivant. Hélas, je me croyais prêt.

Et pour cause : sur mon autre planète, j’avais passé une grande partie de ma vie dans un patelin perché à presque 1 000 m au-dessus du niveau de la mer. Alors, les températures sous zéro et la neige, j’en avais l’expérience. Je me disais qu’avec la qualité de vie au Québec l’hiver serait vivable.

À l’école primaire, on s’organisait en duos pour allumer un chauffage au bois de fortune afin d’élever la température de la classe. Il fallait nous voir, accroupis à même le sol, souffler dans les tiges des stylos Bic pour attiser le feu avant l’entrée du maître et des élèves.

Je connaissais aussi les tempêtes de neige, qui causaient des fermetures d’école salvatrices. On bricolait alors des luges artisanales à base de tige de sabra, un cactus de notre région! Sans skis, ni bottes, ni autre équipement de circonstance, on faisait joyeusement des glissades improvisées dans les descentes montagneuses du Moyen-Atlas marocain.

Fort de mon vécu hivernal, je croyais avoir bien préparé mon immigration. J’avais acheté un manteau d’hiver, qui s’est avéré une quelconque veste printanière à ma descente d’avion.

Après une course dans les corridors de Dorval entre bagages, police de frontière et immigration, j’ai été giflé rageusement par une masse invisible de froid pur dès que j’ai mis les pieds au-delà du portail de l’aéroport.

Dans la voiture de mon hôte, le chauffage crachait à plein régime. Entre le bruit de la radio, le chauffage et le spectacle lunaire de la portion de l’autoroute 520 qui relie la A-40, j’étais horrifié et plié en deux pour frotter mes genoux gelés.

Ici, mon expérience hivernale de naguère ne m’a été d’aucune utilité. J’ai découvert à mes dépens l’écart abyssal entre un -4oC et les autres -15oC. Avec mes soi-disant habits d’hiver, j’ai passé un premier mois horrible.

Le matin, du salon de mon hôte, je voyais le ciel azur et le soleil qui brillait. Un leurre! Une fois dehors, comme on dit en bon québécois, «sacrifice qu’il faisait frette». Je n’en revenais pas! Les gens marchaient dans la rue; moi, je courais carrément entre la maison et l’arrêt de bus. Ce furent des moments intenses et hallucinants.

Quatre hivers plus tard, je me suis surpris en train de creuser fièrement la neige pour dégoter une place de stationnement en face de chez moi. À temps pour ne pas rater le début d’une partie des Canadiens.

Les opinions exprimées dans cette tribune ne sont pas nécessairement celles de Métro.

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