Soutenez

L’art qui ramène à la vie

Photo: Diego Morales

Francine, une montréalaise de 58 ans, a fait au fil des ans au moins cinq tentatives de suicide. C’était avant de reprendre goût à la vie par le biais de l’art-thérapie.

Après une jeunesse difficile et de longues périodes d’instabilité à «errer dans la rue», Francine trouve l’amour. «Je vivais juste pour mon conjoint. Quand il est mort d’un cancer du poumon, après 13 ans d’union, je suis morte avec lui», se souvient-elle. C’est à ce moment qu’elle commence ses tentatives de suicide.

Aujourd’hui, le suicide est loin dans ses pensées. Francine a maintenant passé trois ans au sein des ateliers de création de l’organisme Les Impatients, qui promeut l’expression artistique auprès des personnes ayant des problèmes de santé mentale. «Et ça prendrait un très grand coup pour que je songe à nouveau à m’enlever la vie», se félicite-t-elle.

Chez Les Impatients, les cas comme celui de Francine ne sont pas rares. «C’est difficile à quantifier, mais nous avons beaucoup de cas de gens dépressifs, schizophrènes ou bipolaires qui restent avec nous pendant des années», estime l’art-thérapeute de l’organisme montréalais, Mélissa Sokoloff.

Dans le processus d’accompagnement en art-thérapie, il ne doit y avoir aucune attente esthétique envers les patients. «Que ce soit beau ou laid, il faut amener la personne à s’exprimer à travers ce qu’elle sait des matériaux artistiques», précise Mme Sokoloff.

André, qui fréquente lui aussi Les Impatients depuis 3 ans, a trouvé dans l’art une expérience libératrice. André a mené une longue carrière d’enseignant, pendant laquelle il s’est battu avec de graves troubles d’anxiété. Après 26 ans, il s’arrête pour cause de dépression. Les pensées suicidaires ont souvent fait surface dans sa vie, mais André s’arrête toujours avant de commettre l’irréparable. «C’est l’art qui m’a empêché de passer à l’acte, relate-t-il. C’est quelque chose qui émerge de moi, qui me montre que ça vaut la peine de vivre.»

«J’ai découvert que j’étais une artiste et que je suis bonne en bande-dessinée!», confie pour sa part Francine, qui met maintenant en images les aventures de son propre personnage de BD.

[pullquote]

Qu’il s’agisse de peinture, de dessin ou de sculpture, la création doit toujours être suivie de près par le thérapeute. «L’art-thérapeute est un témoin. La symbolique est importante; il faut savoir interpréter, par exemple, les liens entre les troubles du patient et les matériaux qu’il utilise, explique Josée Leclerc, directrice du programme de maîtrise en art-thérapie à l’Université Concordia. On ne fait pas juste de l’art plastique pour faire de l’art plastique.»

Pas question, donc, de s’improviser art-thérapeute, souligne Mme Leclerc. Le diplôme offert par l’Université Concordia comporte 60 crédits et exige 800 heures de stage en deux ans dans des hôpitaux, des écoles ou des centres communautaires. L’Université du Québec au Témiscamingue offre également une maîtrise en art-thérapie.

Or, malgré tous les résultats positifs et les formations universitaires, les arts-thérapeutes ne peuvent pas se donner le titre de psychothérapeutes, selon l’Ordre des psychologues du Québec. La pratique de l’art-thérapie est beaucoup plus répandue aux Etats-Unis ainsi qu’en Grande-Bretagne, où elle est officiellement reconnue par la loi.

Exposition-encan
Les Impatients présentent jusqu’au 25 février l’exposition Parle-moi d’amour, dans leur galerie du 100 rue Sherbrooke Est. Des œuvres d’artistes professionnels y côtoient les œuvres des artistes des Impatients. Elles sont mises en vente au profit de l’organisme.

Articles récents du même sujet

Mon
Métro

Découvrez nos infolettres !

Le meilleur moyen de rester brancher sur les nouvelles de Montréal et votre quartier.