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Peut-on se déshabiller sur scène et être féministe?

Photo: Michel Poulin - DeCourval Art & Photo

Lulu Les Belles Mirettes – artiste burlesque et créatrice de la troupe Burlesgeek – veut avoir du fun, vit son militantisme féministe sur scène et se fout de beaucoup de choses.

Lulu me donne rendez-vous sur son lieu de travail, un laboratoire de l’Université McGill. Je l’avais imaginée travailler dans un bar speakeasy, dans le Mile End, se réveillant tous les matins avec un maquillage flamboyant. Elle porte un pull rose bonbon, un noeud rose bonbon dans les cheveux et un collier à grosses boules turquoises, sans maquillage. Je m’attendais à parler à une femme rentre-dedans, ultra dynamique. Elle est plutôt calme et posée. «Je ne suis pas bonne pour argumenter.»

Qu’est-ce que le burlesque?
«Le burlesque, c’est du strip-tease théâtral. Burlesgeek fait du néo-burlesque.» Ce sont des personnages de la culture geek adaptés sur scène: Godzilla, Buffy contre les Vampires, Deadpool, etc. Lulu ne se prend pas au sérieux. La nudité? Les artistes de Burlesgeek gardent un cache-sexe et des cache-mamelons.

Le copain de Lulu fait partie de la troupe. «Moi, j’aime bien qu’il y ait un homme. Tout le monde est content. Ça fait changement». Lulu aime le changement. «On essaie d’être le plus diversifié possible», m’explique-t-elle simplement, comme une évidence, juste parce que ça tombe sous le sens pour elle.

Son audience est composée de femmes en très grande majorité. Ça crie très fort! Tout le monde est respectueux. «Il y a eu un débordement, une fois, à Montréal. Tout le monde en a parlé.» Lulu ne boit pas et n’est pas très amicale. «J’ai l’air bête». Lulu ne se fait pas achaler.

Un costume peut prendre des mois à préparer, car Lulu est une perfectionniste. Vous vous dites qu’au nombre d’heures passées à travailler ce costume, elle le porte plusieurs fois? Eh non! Parce que Lulu, elle se tanne. Faire deux fois le même spectacle, ça ne lui apporte pas assez de fun. Lulu, elle respecte son audience. Comme ce sont des habitués qui viennent la voir, elle ne veut pas les décevoir. Ce n’est pas économique, mais c’est l’fun. Lulu aime le fun.

Lulu ne chorégraphie pas. Elle connaît ses chansons par coeur et sait quand elle va retirer son gant, défaire sa fermeture éclaire (etc.), mais elle ne programme pas ses pas de danse. La plupart des autres performeurs ont une chorégraphie, mais Lulu est différente.

Le burlesque est-il féministe?
«On est tous féministe. J’espère…» dit-elle avec une toute petite voix, à moitié c’est-une-évidence, à moitié ce-n’est-pas-ma-zone-de-confort. Elle soupire. «Dans le burlesque, tu contrôles tout de A à Z. Je ne cherche pas à séduire. Je suis zéro sexuelle, je ne suis même pas sensuelle. C’est de la comédie.»  Il reste qu’elle peut contrôler ce qu’elle fait mais elle ne peut contrôler pas comment elle est perçue.

Les gens sont impressionnés parce que Lulu est une femme taille +, et ça ne lui plaît pas.

«Les gens me félicitent, mais c’est pas comme si j’allais me cacher dans une cave parce que j’ai une shape forte! S’ils ne sont pas contents, ils peuvent continuer à regarder L’Arbitre!» – Lulu Les Belles Mirettes.

Et l’objectivation de la femme dans tout ça?
Pour la seule fois des 50 minutes de l’entrevue, son ton monte. «Ceux qui pensent que j’encourage l’objectivation de la femme en retirant mes vêtements sont les premiers à se faire prendre en photo avec les butt girls pendant la Formule 1! Ils sont contre la porno mais ils en consomment. C’est beaucoup d’hypocrisie, mais je ne l’intellectualise pas plus que ça.» Elle hausse les épaules. Son ton redescend. «Dans le fond, mon féminisme c’est laisser les femmes faire ce qu’elles veulent.»

Son militantisme à elle se fait sur scène.

Lulu veut avoir du fun sur scène dans des costumes déjantés. Elle s’en fout de vos commentaires Facebook dégueulasses sur son corps «qui n’est pas aux normes» et elle s’en fout probablement également de ce billet de blogue. Lulu fait ce qu’elle veut.

On a le droit de se dire féministe et de ne pas avoir envie de brûler sa brassière ou de crier des slogans pendant une manifestation. On peut être féministe dans son salon, auprès de son entourage, dans ses actions, ou bien même en montant sur scène et en retirant ses vêtements.

Burlesgeek se produit au Geekfest
Les 5 et 6 novembre
Au Collège de Maisonneuve

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