Alors que Montréal veut étudier les mesures à prendre pour améliorer l’aide d’urgence offerte aux personnes itinérantes, deux organismes réclament plus de lits et de ressources dédiés uniquement aux femmes sans-abri de la métropole.
«Pour nous, le bilan est déjà fait. On l’a vécu tout l’hiver. Il y a effectivement un manque de places et ce ne sont pas que des lits d’urgence dont on a besoin, ce sont aussi des places où elles reçoivent de l’aide dans leurs démarches», a affirmé à Métro mercredi la directrice clinique au sein de l’organisme La rue des femmes, Suzanne Bourret. Cette dernière a indiqué que son unité d’hébergement d’urgence dédiée uniquement aux femmes, la Maison Jacqueline, peine à répondre à une demande sans cesse croissante.
«On refuse une quinzaine de femmes chaque soir», a quant à elle soupiré la directrice générale du Chaînon, Marcèle Lamarche, dont l’organisme dispose d’une unité d’hébergement d’urgence de 12 lits réservés aux femmes sans-abri.
Actuellement, 160 des 1012 lits d’hébergement d’urgence en itinérance de la métropole sont dédiés aux femmes, soit 16% d’entre eux.
«On sait que les besoins des femmes en situation d’itinérance sont souvent différents de ceux des hommes. Par exemple, au Royal-Victoria, on est à pleine capacité, mais on voit que sur les 80 lits, il y en a 10 seulement qui sont occupés par des femmes. Donc, les ressources doivent s’adapter aux différentes clientèles», a affirmé la mairesse de Montréal, Valérie Plante, en marge d’une conférence de presse au centre-ville mercredi.
Une unité de débordement de 80 lits ouverte tant aux hommes et aux femmes qu’aux personnes transgenres et aux animaux a été aménagée jusqu’à la mi-avril dans l’ancien Hôpital Royal-Victoria. Depuis son ouverture le 15 janvier, 323 femmes ont fréquenté cette ressource, mais les deux organismes contactés par Métro estiment que celle-ci ne répond pas aux besoins des femmes sans logis.
«Ça ne correspond pas aux besoins des femmes. Les femmes ont besoin de se sentir en sécurité», a estimé Mme Bourret. Cette dernière a souligné que plusieurs d’entre elles ont subi «des chocs post-traumatiques» liés aux abus physiques ou sexuels qu’elles ont vécus, faisant en sorte qu’elles ont besoin de ressources d’hébergement leur étant uniquement dédiées et qui leur offrent les services psychologiques dont elles ont besoin.
Même son de cloche pour la directrice générale du Chaînon. «Ça prend un environnement féminin et propre. Ça prend un aménagement qui est adapté aux femmes itinérantes, ce qui n’est clairement pas le cas au Royal Victoria où il n’y a pas de couverture et pas de douches», a critiqué Mme Lamarche.
«Une femme qui est à la rue se détériore très rapidement dans sa santé physique et mentale.» -La directrice clinique au sein de l’organisme La rue des femmes, Suzanne Bourret
«Chaque ressource répond à des types bien particuliers. C’est normal qu’il y ait des femmes qui ne se retrouvent pas dans certains types de ressources, mais le premier devoir qu’on a, c’est de s’assurer que personne passe la nuit dehors», a réagi la directrice adjointe au partenariat au CIUSSS Centre-Sud-de-l’île de Montréal, qui a collaboré avec la Ville de Montréal et Québec à la réalisation de cette unité de débordement, Julie Grenier.
Cette dernière a d’ailleurs rappelé que plusieurs ressources d’hébergement de plus longue durée sont à la disponibilité des femmes en situation de précarité. Ainsi, 334 places dans ces ressources sont dédiées aux femmes et 135 aux enfants à Montréal.
Valérie Plante n’a d’ailleurs pas fermé la porte mercredi à ce qu’une nouvelle unité d’hébergement d’urgence uniquement dédiée aux femmes voit éventuellement le jour à Montréal.
«Des ressources dédiées spécifiquement aux femmes dans les périodes de grand froid, je pense qu’il va falloir en avoir davantage», a-t-elle déclaré.
Bilan
D’ici la fin de l’année, la Ville de Montréal réalisera en collaboration avec le CIUSSS du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal une étude qui permettra de dresser le bilan de la situation des services d’hébergement d’urgence dans la métropole. Une subvention de 25 000$ du centre hospitalier pour financer cette étude a d’ailleurs été approuvée mercredi matin par le comité exécutif.
«Je ne vous cacherai pas que pour moi, cette somme arrive à point parce que les besoins sont croissants, ils ne cessent d’augmenter et j’ai définitivement une attention particulière pour les femmes en situation d’itinérance puisqu’on sait qu’il y a moins de lits qui sont disponibles à Montréal [pour elles]», a déclaré mercredi matin la mairesse Valérie Plante, pendant la séance du comité exécutif.