Jeudi matin, à quelques heures de la clôture des candidatures, la scène municipale a été secouée par un coup de théâtre: les partis Ralliement pour Montréal et Mouvement Montréal ont annoncé leur fusion. Une décision prise la veille au soir lors d’une discussion entre les deux chefs, Balarama Holness et Marc-Antoine Desjardins, a appris Métro.
Selon nos informations, M. Holness aurait contacté M. Desjardins durant la soirée du 29 septembre. La décision aurait été prise le soir même.
Les membres du parti ont été avisés le lendemain matin, peu avant l’annonce faite aux médias. Et la décision a pris plusieurs candidats au dépourvu. Jean-François Cloutier, ex-candidat à la mairie de Lachine avec Ralliement pour Montréal, a même quitté le navire.
Jean-Pierre Boivin, candidat avec Ralliement pour Montréal dans Verdun-Île des Sœurs, explique à Métro «que tout le monde a été surpris» après avoir appris la nouvelle tardivement. Néanmoins, le candidat se réjouit.
Les gens étaient déçus, mais finalement comme tout le monde ils ont réfléchi. Tout le monde a fait son deuil. […] On nous considère maintenant comme un vrai parti, les gens ne voulaient plus jouer à pile ou face.
Jean-Pierre Boivin, candidat
Contacté par Métro, Balarama Holness a affirmé que la décision a été mûrie plus longuement. Certes, si la question d’une fusion est devenue «sérieuse» en «quelques jours», le candidat affirme que des discussions informelles avec Marc-Antoine Desjardins avaient débuté «il y a quelques mois».
J’ai pris la décision pour mettre mes candidats dans la meilleure position pour gagner le 7 novembre prochain, une décision dans le meilleur intérêt de notre parti. […] Pour nous, comment survivre dans cette élection? On doit s’allier.
Balarama Holness
Des différences idéologiques importantes existent entre les deux partis. Leur plateforme commune, présentée sous la bannière de Mouvement Montréal, devrait être présentée mardi.
«Le choix de fusionner les partis doit être compris comme faisant partie d’un plus grand projet d’unification; une décision prise pour combler les fossés politiques de personnes qui, malgré leurs différences, travaillaient (et travaillent toujours) dans le même but : faire de Montréal une métropole plus forte», peut-on lire dans un communiqué de Mouvement Montréal transmis aux médias.
Un choix motivé par les chiffres?
Selon nos informations, les récents sondages, dont un sondage CROP-Métro publié deux jours avant l’annonce de la fusion, ont joué sur la décision de MM. Holness et Desjardins. Ce sondage accordait 17% d’intentions de vote aux deux candidats réunis, soit 9% pour Balarama Holness et 8% pour Marc-Antoine Desjardins.
La Ville de Montréal rembourse seulement les dépenses de campagne des candidats de partis ayant obtenu au moins 15% des voix.
Interrogé sur la question, Balarama Holness ne s’en cache pas : les sondages ont «absolument» joué un rôle. «Si ça améliore la chance de gagner de mes candidats et mes candidates, c’est important». Le candidat dénonce le fait que même à la suite de la fusion, Culture Montréal n’a pas invité Mouvement Montréal à prendre part au débat sur les enjeux culturels, tenu hier.
Autre élément comptable qui a été considéré, selon Jean-Pierre Boivin, a été le nombre de candidats. Alors qu’avant la fusion «chacun des deux partis n’avait pas assez de candidats», et «ça aurait été difficile d’avoir un pourcentage», après la fusion, Mouvement Montréal en compte 74 (sur les 103 sièges que compte la ville).
M. Holness, tout comme M. Boivin, se réjouit de former désormais «la troisième voie» aux élections municipales.
Attention au cynisme et à la personnalisation
La fusion des partis de Balarama Holness et Marc-Antoine Desjardins ne surprend pas Danielle Pilette, professeure à l’UQÀM et experte en administration municipale.
«Je ne suis pas du tout surprise. C’est difficile de faire campagne quand il n’y en a que pour les deux grandes candidatures. Unir les forces peut permettre de faire élire quelques conseillers», dit-elle en entrevue avec Métro.
«L’importance des différences idéologiques» pourrait toutefois jeter une ombre sur le parti fusionné, ajoute-t-elle.
«Ça montre comment les programmes électoraux ont peu d’importance en politique municipale. C’est vraiment une personnalisation des formations politiques», souligne la politologue. «On commence à varier, à réunir des forces qui avaient des programmes différents. On commence à jouer avec les variations, ça alimente le cynisme.»