Denis Coderre et son équipe ont présenté aujourd’hui leur plan en matière de logement. Le principal pari d’Ensemble Montréal: créer 50 000 logements sur 4 ans. Le parti de la mairesse Valérie Plante réplique que le «remède de cheval» promis n’est qu’un «retour en arrière».
Si élue, une future administration Coderre-Gelly s’engage à remplacer le règlement «20-20-20» pour une métropole mixte pour un nouveau règlement. Sous celui-ci les promoteurs immobiliers devront inclure 15% de logements sociaux et communautaires dans les nouveaux projets résidentiels de 25 unités et plus. Pour le chef d’Ensemble Montréal, le règlement 20-20-20 «pousserait les promoteurs vers la banlieue».
Toujours du côté de l’offre privée, le parti prévoit un «bonus de densité» pour pousser les promoteurs à construire plus en hauteur. L’objectif selon Denis Coderre est d’atteindre une «densité douce et intelligente» et «augmenter les milieux de vie». Des discussions avec la Communauté Métropolitaine de Montréal (CMM) seraient ouvertes pour d’appliquer ce règlement à l’ensemble de la CMM.
Le candidat a également laissé entrevoir la possibilité pour les propriétaires d’ajouter un étage aux plex.
En termes de logements sociaux, Ensemble Montréal veut développer 30% de logements sociaux, étudiants et familiaux sur les terrains municipaux sous-utilisés. À ce sujet, le parti aurait identifié une trentaine de terrains où développer 15 000 logements .
De plus, Ensemble Montréal souhaite créer un «Fonds d’investissement d’impact de Montréal pour l’habitation sociale, communautaire et étudiante». Un investissement de 25 M$ sera mis en place et le parti compte sur la contribution de «fondations philanthropiques, de fonds d’investissement privés ou syndicaux et des autres paliers de gouvernement».
Finalement, le parti entend «débloquer» le processus de développement résidentiel en simplifiant le mécanisme d’octroi des permis de construction et de rénovation. Plus tôt cette semaine, Ensemble Montréal a annoncé son intention d’établir un registre des loyers et une taxe à l’insalubrité.
Projet Montréal réplique
De son côté, Projet Montréal, le parti de Valérie Plante promet la construction de 60 000 logements abordables sur un horizon de 10 ans et de garantir leur abordabilité sur «au moins» 40 ans auprès de partenaires et d’OBNL.
Robert Beaudry, responsable de l’habitation pour Projet Montréal a fustigé la propsition de Denis Coderre. Pour l’élu de Projet Montréal, ce que propose le chef d’Ensemble Montréal c’est de faire un «retour en arrière».
Sa stratégie en habitation c’est de faire un retour en arrière et de faire un chèque en blanc à des promoteurs immobiliers pour développer encore plus d’offre de luxe qui va bénéficier aux acheteurs étrangers aux Airbnb, aux plus nantis de la société et qui va créer beaucoup de pression sur les loyers à la hausse.
Robert Beaudry, responsable de l’habitation au sein de l’administration Plante
Pour Projet Montréal, ces mesures «ratent complètement leur cible», en laissant «70% des terrains municipaux au privé». Parmi les 50 000 logements, Robert Beaudry s’interroge aussi sur «le type de logement que l’on veut».
Un problème d’abordabilité
Véronique Laflamme, porte-parole du FRAPRU se dit «déçue» des mesures proposées par Denis Coderre en matière de logement. Elle pointe du doigt le flou du programme d’Ensemble Montréal concernant le type de logement inclus dans les 50 000 logements prévus en 4 ans. «De quel type de logements s’agit-il?», s’interroge-t-elle.
Le FRAPRU salue cependant le fait que Ensemble Montréal ait finalement pris un engagement chiffré pour le développement de logements sociaux dans la plateforme dévoilée plus tard, soit 10 000 logements sociaux en 4 ans, même si ça demeure en deçà des besoins qui sont criants.
En effet, près de 23 000 familles sont sur liste d’attente pour les habitations à loyer modique (HLM).
«Attribuer une logique aux terrains municipaux – dont 30% seraient consacrés au logement social, familial et étudiant – sous-entend que 70% restent des logements privés?», se questionne Mme Laflamme. Le problème, selon elle, ne réside pas dans le manque de construction mais dans l’abordabilité de ce qui est offert.
On a l’impression qu’Ensemble Montréal ne compte que sur le marché privé, 50 000 ça peut être tout (type de logement) et le problème c’est pas les mises en chantiers mais la chèreté. Construire pour construire ça ne règle pas le problème […] des logements sociaux hors marché privé qui sont les seuls à garantir des loyers accessibles.
Véronique Laflamme, porte-parole du FRAPRU
De plus, le fonds proposé de 25 M$ est «insuffisant pour lancer un grand chantier» en matière de logement social. Cependant, Mme Laflamme conçoit que ce fonds représente une «bonne idée d’appoint», en appui au programme AccèsLogis.
Une «version édulcorée» de Projet Montréal?
Pour Jean-Philippe Méloche, ce que propose Ensemble Montréal en matière d’habitation est une «version édulcorée de ce que Valérie Plante propose, en renvoyant aux promoteurs privés la responsabilité de construire des logements sociaux.
Je suis sceptique sur la capacité du marché à produire du logement social et abordable. […] On est plus à la recherche de mécanismes plutôt que d’opportunités directes. On s’appuie sur l’idée que la marché va réguler l’offre abordable.
Jean-Philippe Méloche, Professeur à l’école d’urbanisme et d’architecture de paysage à l’UdeM.
Néanmoins, l’idée d’améliorer et faciliter l’émission de permis est une une proposition qui «va dans la bonne direction».