Québec solidaire (QS) souhaite créer «un ministère Femmes et égalité des genres [MFEG]» s’il est porté au pouvoir. Il serait doté de 20 M$ par an. À l’intérieur de ce ministère, QS nommerait une ou un ministre qui serait entièrement responsable des enjeux des personnes issues de la diversité sexuelle, de genre et corporelle.
«Pour nous, c’est évident que ça prend une personne responsable de tous les enjeux LGBTQIA+. À l’intérieur du MFEG, la ou le ministre délégué.e aura cette seule responsabilité», explique Manon Massé, co-porte-parole féminine du parti.
Pour Québec solidaire, les luttes touchant les personnes LGBTQ2S+ ont toujours été importantes et on s’assurera de leur donner l’importance qu’elles méritent. Pour ce qui est de qui sera la ministre, on verra en temps et lieu!
Vincent Marissal, député de Québec solidaire dans Rosemont
Rappelons qu’il existe, sous la coupe du ministère de la Justice, un Bureau de lutte contre l’homophobie et la transphobie. Mais pour Mme Massé, ce n’est pas suffisant. «Il y a eu un manque de leadership ces quatre dernières années, sur un certain nombre de dossiers. C’est ça qu’on veut régler en assurant qu’une ou un ministre soit absolument délégué.e à cette responsabilité-là», précise l’ex-cheffe parlementaire solidaire.
«Il y a encore beaucoup de chemin à faire sur ces enjeux-là au Québec, même s’il y a plusieurs acquis», reconnaît Pascal Vaillancourt, directeur de l’organisme Interligne. «L’arrivée d’un ministre doit comprendre la volonté claire d’améliorer les choses. Ça indique une priorité de vouloir rendre l’égalité à tout le monde.»
Il souhaiterait par ailleurs que ce ministère soit transversal, et qu’il collabore avec ceux de la Santé, de l’Éducation ou de la Sécurité publique. Dans le cas de ce dernier ministère, des mesures pourraient être prises pour éviter le profilage social et rétablir un lien de confiance entre les communautés et les forces de l’ordre.
Une situation qui se dégrade au Québec
Interligne offre un service de soutien téléphonique et en ligne aux personnes issues de la diversité sexuelle et de genre. Il forme et sensibilise aux réalités vécues par ces communautés. Depuis deux à trois ans, Pascal Vaillancourt a cependant noté «un recul des choses».
«On voit l’homophobie et la lesbophobie remonter à la surface de façon beaucoup moins cachée que dans le passé. Je l’explique avec la polarisation des discours, des nouveaux styles de politique qui se permettent d’attaquer les gens en minorité, une tendance à utiliser le mot “woke” pour invalider les propos de gens pour la défense des personnes aux droits minoritaires», fait valoir le directeur.
Cette radicalisation se retrouverait dans la population, poussée par les réseaux sociaux, mais serait aussi politique. «J’ai vu [beaucoup] de choses en commission parlementaire, du mégenrage, notamment», témoigne Manon Massé.
Quant au terme «woke», la co-porte-parole solidaire y voit une insulte venant «des gens de la droite». «C’est ce que je sais, comme lesbienne qui s’est fait traiter de “boutch”, c’est que c’était une insulte. C’est un peu ça l’enjeu avec le mot “woke”.»
Pascal Vaillancourt croit que pour apaiser les discours et protéger les communautés LGBTQ+, plus d’éducation est nécessaire. «Les gens ne connaissent pas [leurs] réalités. Une des choses essentielles est de ne pas cesser l’éducation et de financer les ressources communautaires», estime-t-il.
Donner plus aux organismes
Selon différents organismes travaillant pour ces communautés, leur financement est le nerf de la guerre. D’après Pascal Vaillancourt et Manon Massé, ils seraient d’ailleurs bien moins financés que des organismes plus généralistes. Le premier y voit un clair manque de leadership de la sphère politique.
«Il y a du rattrapage à faire», affirme la députée de Sainte-Marie–Saint-Jacques. QS souhaite augmenter de 290 M$ par an le financement à la mission des organismes. «Avec le fonds de lutte, sauf pour les groupes au financement plus récurrent [en santé publique par exemple], on est par projet, des fois juste sur un an», observe-t-elle.
Le service téléphonique de nuit offert par Interligne est même menacé par ce sous-financement. «Après 42 ans existence, et malgré qu’il ait été de plus en plus en demande ces trois dernières années, avec beaucoup d’appels suicidaires, on va devoir le fermer le 15 novembre prochain», regrette le directeur de l’organisme.