Pour les manifestants qui bloquent depuis trois jours la ligne Candiac d’exo, la pression ne fait que commencer. Certains se disent même prêts à rester «quelques semaines, quelques mois» en soutien à leurs «cousins de la communauté Wet’suwet’en».
Trois jours après l’installation d’un blocus à Kahnawake, non loin du pont Mercier, des protestataires continuent d’assurer une présence en bordure du chemin de fer du Canadien pacifique (CP). Des drapeaux iroquoien et mohawk flottent au vent près d’un «feu sacré» qui brûle désormais depuis lundi.
Des sympathisants de tous les horizons apportent du café, des beignes, des mots de soutien, se disant inquiets par la situation. S’il n’y a pas toujours foule près des rails, au moins une personne assure constamment une présence sur le site, relate Bill, un résident de la réserve qui a préféré taire son nom de famille.
«Quelqu’un doit se lever de temps à autre, indique-t-il, tôt mercredi matin. Il y a des manifestations chez vous, n’est-ce pas?»
Dans la nuit de mardi à mercredi, un homme se faisant surnommer «Snow wolf», est resté près du feu. «Habituellement, nous sommes plus qu’un, avance ce non autochtone, qui dit agir en soutien à la communauté. Nous alternons nos présences en « quarts ».»
«C’était rempli hier après-midi, constate pour sa part Bill, qui se réchauffait mercredi matin dans une remorque en bordure du rail. Les gens sont là pour faire don de leur temps.»
Depuis lundi, une énorme butte de neige entrave le passage des trains sur la route ferroviaire. Exo a conséquemment dû suspendre sa ligne de train de banlieue de Candiac «jusqu’à nouvel ordre». Mercredi, pour une troisième journée consécutive, les usagers du train ont dû emprunter des navettes spéciales pour se rendre sur l’île.
Attirer l’attention
Les manifestants de Kahnawake campent dans le secteur en soutien à la communauté autochtone de Wet’suwet’en, en Colombie-Britannique. L’an dernier, le gouvernement provincial approuvait un projet de pipeline – le Coastal GasLink – sur le territoire non cédé de cette collectivité des Premières Nations.
Depuis, les démonstrations d’opposition au projet se succèdent sur le territoire. Au cours des dernières semaines, les relations entre la Gendarmerie royale du Canada et les manifestants se sont envenimées. Partout au Canada, des blocus sur les voies ferroviaires s’improvisent pour s’opposer à l’intervention policière.
Les membres de la communauté se disent prêts à rester «tant qu’il le faudra», souligne «Snow Wolf». «Ça pourrait être des semaines, des mois. Tant que les gens de Wet’su’we’ten reçoivent le respect qui leur est dû», lance-t-il.
Bill convient que la barricade érigée à Kahnawake «ne fait pas le bonheur de tous». «Mais si on attire l’attention, certains vont regarder la situation de plus près», avance-t-il.
C’est que la manifestation se base avant tout sur des valeurs environnementales, souligne Bill, qui affirme revenir le plus souvent possible près du blocus.
«Nous comprenons le mécontentement. Cependant, nous ne sommes pas uniquement là pour les Premières Nations, mais pour tous.» – «Snow Wolf», un manifestant
Intervention policière
Mardi, les gouvernements du Québec et du Canada s’étaient lancé la balle quant à la manière d’intervenir sur le territoire. CP possède une force policière qui agit habituellement sur les voies que la compagnie possède. Sa juridiction s’étend techniquement dans un rayon de 500 mètres autour du rail.
Les Peacekeepers de Kahnawake, le corps policier qui a juridiction sur le territoire de la réserve, n’ont pas non plus demandé aux manifestants de mettre fin à leurs activités.
«Ils viennent ici pour s’assurer que nous ne sommes pas en danger», affirme Bill.
Contacté par Métro mercredi, le chef des forces de l’ordre de Kahnawake, Dwayne Zacharie, dit suivre la situation de près.
«Nous portons notre aide à la police de CP s’ils ont un problème», souligne-t-il.
«Nous soutenons les gens de Wet’suwet’en. Notre but demeure d’assurer la sûreté de ceux qui vivent dans notre communauté», ajoute-t-il.
Soutien
Lors du passage de Métro, mercredi matin, les manifestants ont reçu la visite de plusieurs passants. Non loin du feu, deux résidents de Kahnawake patientaient aussi dans leur voiture pour maintenir une présence dans les environs.
«Plusieurs gens de l’extérieur viennent», raconte Bill.
Un citoyen non autochtone de Montréal a d’ailleurs tenu à faire sa part.
«Je trouve ça dégueulasse, ce qui se passe à Wet’su’we’ten», a convenu Robert, qui a lui aussi tenu à taire son nom de famille.
«Ils se font piler sur les pieds, tout le temps, tout le temps. Si le gouvernement pousse, il va y avoir une guerre», soutient-il.