Le Contrôleur général de la Ville de Montréal, Alain Bond, a déposé vendredi une plainte devant la Commission municipale du Québec à l’égard de la mairesse de Côte-des-Neiges–Notre-Dame-de-Grâce, Sue Montgomery, dans la foulée des allégations de harcèlement au sein de son cabinet.
Mme Montgomery a été expulsée du caucus de Projet Montréal le mois dernier pour avoir refusé de se plier aux demandes de Me Bond.
Deux semaines plus tard, elle a reçu une mise en demeure de la Ville de Montréal pour avoir tenu des propos «mettant en cause la probité et l’intégrité» des fonctionnaires et du directeur de l’arrondissement.
Harcèlement psychologique
Le Contrôleur général a entamé en septembre dernier une enquête concernant des allégations de harcèlement psychologique à l’endroit de la directrice de cabinet de l’élue, Annalisa Harris. Celle-ci a conclu que Mme Harris a commis du harcèlement psychologique auprès de deux employés de l’arrondissement à sa charge.
Or, Mme Montgomery nie ces allégations et refuse de se départir de Mme Harris. En entrevue à Métro, le 27 janvier, la mairesse a même déclaré qu’elle ne remerciera «jamais» Mme Harris.
«En conséquence des effets de la non-intervention de la mairesse d’arrondissement, le Contrôleur général a déposé une plainte auprès de la Commission municipale du Québec et lui a demandé d’enquêter sur ce dossier», a indiqué la Ville dans un communiqué vendredi.
La plainte sera contestée, dit le clan Montgomery
Joint par Métro, l’avocat de Sue Montgomery, Éric Oliver, promet de contester la plainte.
«Ce n’est que le début d’un processus, car la CMQ doit faire enquête. Mais c’est certain qu’on va faire valoir que Mme Montgomery a enquêté et obtenu des opinions légales. On est convaincus que les faits dénoncés ne peuvent pas mener à une conclusion de harcèlement psychologique», tonne-t-il.
Selon le juriste, la mairesse de Côte-des-Neiges-Notre-Dame-de-Grâce aurait demandé au contrôleur général de lui fournir des «exemples de faits reprochés».
«Ça a été un refus sur toute la ligne, tranche Me Oliver. On lui a dit de s’adresser à la Commission d’accès à l’information.»
L’avocat invite par ailleurs la Ville à se tourner vers les bonnes instances pour les bons enjeux, si elle est bien intentionnée. «Ils refusent de soumettre leurs allégations à l’examen du tribunal compétent, soit le Tribunal administratif du travail», ajoute-t-il.
«Ce n’est pas parce qu’une plainte est déposée qu’elle va nécessairement être reçue à la CMQ. Il faut investiguer.» -Me Éric Oliver, avocat de Sue Montgomery
Me Oliver dénonce que cette attitude peu professionnelle des autorités municipales révèle un manque de transparence global. «À ce jour, on ne nous a pas encore donné le rapport complet, ni d’exemples concrets de ce qui est reproché à Mme Montgomery. Pourquoi on refuse?», s’interroge-t-il.
Un problème de structure
«On fait appel à la Commission municipale parce qu’on espère régler un problème de structure qui est réel», a réagi à Métro l’experte en gestion municipale et professeure è l’Université du Québec à Montréal, Danielle Pilette.
Selon elle, le «nerf de la guerre» sera de savoir si l’enquête de la Commission municipale du Québec entraînera la démission de Mme Harris.
«Est-ce que vraiment, dans un arrondissement, on a besoin d’un chef de cabinet?» -Danielle Pilette, experte en gestion municipale
Dans le cadre de l’enquête du Contrôleur général, 12 employés de l’arrondissement ont été rencontrés, incluant Mme Montgomery et sa directrice de cabinet.
Normes du travail
Alain Bond a demandé à Mme Montgomery de s’assurer que sa directrice de cabinet «ne soit plus en contact avec les fonctionnaires de l’arrondissement». Projet Montréal aurait d’ailleurs proposé à Mme Harris d’occuper un poste au sein du parti. Mme Montgomery aurait toutefois rejeté cette possibilité.
Me Bond estime donc que la mairesse d’arrondissement a contrevenu à la Loi sur les normes du travail. Celle-ci prévoit en effet que tous les employés ont le droit à un milieu de travail exempt de harcèlement psychologique.
Pour la suite des choses, Mme Pilette ne croit pas que cette plainte aura des conséquences majeures pour Mme Montgomery.
«Je doute beaucoup qu’il lui arrive quelque chose de très grave. L’enquête va se faire sur le comportement de sa chef de cabinet», souligne l’experte.
Selon elle, il aurait été préférable que le Contrôleur général fasse une plainte à la Commission municipale du Québec avant que l’administration Plante décide d’expulser la mairesse d’arrondissement de son caucus.
«Il y a peut-être eu une politisation trop rapide de ce dossier», conclut la spécialiste.