Les voies cyclables et piétonnes que la Ville de Montréal aménage sur plusieurs artères de la métropole sèment l’inquiétude auprès des paramédics d’Urgences-santé, qui craignent que la qualité de leur service en écope.
«Quand on veut se rendre sur les lieux d’une intervention, c’est toujours plus dur quand il y a des fermetures de rues ou des changements, que ça devienne une rue piétonnière ou réservée aux vélos», souligne à Métro le porte-parole d’Urgences-santé, Stéphane Smith. Ce dernier oeuvre depuis 2001 comme paramédic pour l’organisme, qui offre des services préhospitaliers d’urgence et de transport par ambulance à Montréal et à Laval.
Dans les dernières semaines, la Ville a procédé à l’aménagement de nombreuses pistes cyclables et corridors piétons prévus à son Plan de déplacements estival. Annoncé le 15 mai par la mairesse Valérie Plante, celui-ci prévoit la mise en place temporaire de 200 km de «voies actives sécuritaires» sur plusieurs artères de la métropole cet été. C’est notamment dans le cadre de ce plan que la Ville a réservé l’avenue du Mont-Royal aux piétons et aménagé un corridor pour piétons et cyclistes sur la rue Rachel Est et l’avenue Christophe-Colomb.
Des secondes qui comptent
Ces aménagements, qui s’ajoutent aux multiples chantiers routiers qui auront lieu tout l’été dans la métropole, entraîneront plusieurs détours pour les automobilistes, et donc pour les paramédics. Une situation qui risque d’augmenter le temps de déplacement de ceux-ci pour se rendre sur les lieux d’une intervention d’urgence.
«Le stress augmente pour le patient, qui est en détresse, mais aussi pour les paramédics, qui peinent à se rendre rapidement sur les lieux de l’intervention», constate M. Smith.
«C’est certain que ça augmente le degré de difficulté pour nous parce que ce sont des secondes qui comptent.» -Stéphane Smith, porte-parole d’Urgences-santé
Rues piétonnes
Parmi les aménagements de la Ville, les rues piétonnes sont celles qui causent le plus de maux de tête à Urgences-santé. Lorsqu’une personne résidant au milieu d’un tronçon piétonnier est en détresse, les paramédics doivent souvent stationner leur ambulance sur une rue transversale. Ils doivent ensuite marcher avec leur équipement pour se rendre jusqu’au chevet du patient.
De telles interventions, les employés d’Urgences-santé en réalisent déjà depuis plusieurs années, en été, sur le tronçon piétonnier de la rue Sainte-Catherine Est, notamment. Ces situations pourraient toutefois se multiplier cet été alors que la métropole comptera beaucoup plus de rues partiellement piétonnes.
«La rue Sainte-Catherine, on est habitués. Maintenant, il faut s’habituer aux nouvelles rues piétonnes», constate M. Smith. Ce dernier assure toutefois qu’Urgences-santé saura «s’adapter» à ces nouveaux aménagements. «On n’a pas le choix», laisse-t-il tomber.
Contacté par Métro, le cabinet de la mairesse Plante «[s’explique] mal cette réaction d’Urgences-santé», l’organisme faisant partie du Centre de coordination des mesures d’urgence, «où toutes ces décisions sont discutées et approuvées».
«Nous les invitons à contacter leur représentant présent à temps plein au centre des mesures d’urgence pour faire part de leurs observations et nous nous ferons un plaisir de les considérer, comme nous l’avons toujours fait», a indiqué une attachée de presse, Laurence Houde-Roy.
Hausse des appels à Urgences-santé
À la mi-mars, le nombre d’appels à Urgences-santé a rapidement chuté de moitié avec la mise en place par le gouvernement Legault de mesures de confinement. L’organisme a alors pu se concentrer sur les appels d’urgence de citoyens atteints ou craignant d’être atteints du coronavirus. Des interventions complexes qui nécessitent beaucoup de temps parce que les paramédics doivent appliquer plusieurs mesures sanitaires.
Alors que la métropole procède à son déconfinement progressif, le nombre d’appels réguliers à Urgences-santé reprend de la vigueur. Une situation à laquelle contribue également la vague de chaleur actuellement en vigueur, qui implique entre autres un plus grand nombre d’interventions auprès de personnes âgées «qui ont des problèmes respiratoires», explique M. Smith.
«On retourne progressivement à notre moyenne de 1000 appels [par jour] et on peut penser qu’on va dépasser cette moyenne au cours de l’été», appréhende-t-il. «Aujourd’hui, c’est occupé», constate-t-il d’ailleurs.
Après avoir connu une baisse pendant la pandémie, l’achalandage a repris de plus belle dans les urgences de la métropole, selon des données officielles. Vendredi matin, le taux d’occupation des civières était de 108% au CHUM, de 103% au CIUSSS de l’Est et de 120% au CIUSSS du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal.