Montréal

Amazon: les employés dénoncent les pratiques antisyndicales

[De gauche à droite] Shervin Rahmanian, ancien employé d'Amazon, David Bergeron-Cy, vice président de la CSN; Mostafa Henaway, organisateur communautaire au CTI et Ibrahim Alsaharg, ancien employé d'Amazon.

De gauche à droite: Shervin Rahmanian, ancien employé d'Amazon; David Bergeron-Cyr, vice-président de la CSN; Mostafa Henaway, organisateur communautaire au CTI; et Ibrahim Alsaharg, ancien employé d'Amazon.

Ingérence patronale dans la campagne de syndicalisation, harcèlement ou encore mesures disciplinaires injustifiées; voilà certaines des pratiques que dénoncent les employés des entrepôts d’Amazon de Montréal. La CSN et le Centre des travailleurs et travailleuses immigrants (CTI) décrient ces pratiques de la multinationale qui vont à l’encontre du Code du travail et de la Loi sur la santé et la sécurité du travail.

Plusieurs employés et anciens employés des six entrepôts d’Amazon de la région de Montréal ont témoigné ce matin de leur expérience.

Pierre* est employé depuis un an et quatre mois à l’entrepôt d’Amazon de Lachine, aussi connu sous le nom de YUL 2. Après avoir rapporté deux accidents de travail et entamé des mesures de syndicalisation auprès de ses collègues, Pierre a vu ses conditions de travail se détériorer. Il explique avoir reçu des mesures disciplinaires, y compris des suspensions non payées de deux semaines, et recevoir désormais une multitude d’avertissements non justifiés.

«Ils ont commencé à me cibler avec des avertissements, des avertissements au sujet de ma productivité et toute forme de type d’avertissements, dit-il. Ils nous traitent comme des soldats, mais nous ne sommes pas des soldats, nous sommes de la main-d’oeuvre.»

Amazon se croit au-dessus de la loi, mais on est au Québec et l’entreprise doit respecter la loi du Québec.

Pierre*, employé d’Amazon à Lachine

Pierre affirme souffrir de harcèlement psychologique de la part d’Amazon. Désormais sous traitement pour le sommeil, il confie faire des rêves la nuit dans lesquels ses supérieurs lui envoient des messages d’intimidation.

«Amazon contrôle tout, ils ne nous autorisent pas à parler trop entre employés, ils nous mettent de la pression, explique Pierre. Beaucoup de mes collègues ont fait des plaintes à la CNESST, mais beaucoup d’entre eux sont sur le point de se résigner, car ils sont immigrants et ont peur d’avoir des problèmes avec leur processus d’immigration.»

La CSN déterminée à réussir

Le vice-président de la CSN, David Bergeron-Cyr, s’est voulu clair. «Ça prendra le temps que ce que ça prendra, mais on va gagner nos campagnes de syndicalisation, on va gagner les négociations de convention collective et on va changer la vie des travailleurs et travailleuses d’Amazon.»

«Les travailleurs et travailleuses d’Amazon sont des esclaves salariés, dit-il. Il y a des envois de textos massifs pour diffuser de la propagande antisyndicale, et ils affichent dans la cafétéria des affiches de propagande antisyndicale.»

Exemples d’affiches dans les locaux d’Amazon. Photos: Gracieuseté, CSN

David Bergeron-Cyr explique que des personnes hors du Québec sont recrutées par Amazon pour détecter les employés en faveur de la syndicalisation et tenter de les convaincre d’arrêter, allant même jusqu’à des dénonciations auprès de l’employeur.

«Ces personnes-là sont suspendues, congédiées et intimidées sur les lieux de travail, dit-il. C’est exactement ce qu’ils font aux États-Unis, ce sont des exemples clairs de comment ils font. Tout ce qu’ils peuvent pour empêcher la campagne de syndicalisation.»

Il se dit inquiet du nombre d’employés qui n’osent pas faire valoir leurs droits à cause du «règne de terreur et d’intimidation qui existe dans les entrepôts d’Amazon».

L’employeur ne communiquerait pas adéquatement les démarches à suivre après un accident de travail, laissant les salariés ignorants quant aux procédures de signalement à la CNESST. Par la suite, plus les employés prennent de temps avant de signaler leur accident à la CNESST, plus il est difficile pour eux de démontrer le lien causal entre leur état de santé et leurs conditions de travail.

Amazon agit comme s’il était son propre gouvernement. Quand des employés demandent des indemnités, Amazon refuse simplement et donne rendez-vous devant les tribunaux.

Mostafa Henaway, organisateur communautaire au Centre des travailleurs et travailleuses immigrants

La CSN rappelle que l’ingérence patronale dans un processus de syndicalisation va à l’encontre du Code du travail.

Selon l’organisateur communautaire au CTI, Mostafa Henaway, certains employés se verraient même refuser toute promotion après avoir tenté de faire valoir leurs droits.

«Quand les employés rapportent leurs problèmes, ils sont souvent bloqués de toute promotion. D’un seul coup, tu ne peux plus postuler à des postes plus élevés», explique Mostafa Henaway.

Amazon Canada conteste «fortement» les allégations de licenciement ou de refus de promotion des employés ayant ayant formulé des plaintes.

«Nous encourageons les employés à nous faire part de leurs commentaires et, à cette fin, nous avons mis à leur disposition divers moyens de communiquer directement avec leurs supérieurs», explique la porte-parole d’Amazon Canada, Ryma Boussoufa.

La multinationale se défend aussi quant aux allégations de tactiques antisyndicales.

«Le fait de communiquer avec les employés au sujet des syndicats est un processus légalement reconnu depuis des décennies, explique Ryma Boussoufa. Comme beaucoup d’autres entreprises, nous nous entretenons avec nos employés à ce propos parce qu’il est important que tous comprennent les faits concernant l’adhésion à un syndicat et le processus électoral lui-même».

*Nom fictif

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