En comparaison avec leurs voisins, les Québécois semblent beaucoup moins inquiets de contracter le coronavirus ou encore de devoir affronter une potentielle deuxième vague de la COVID-19. C’est du moins ce que révèle un nouveau sondage paru mercredi, réalisé auprès de plus de 2500 citoyens canadiens et américains entre le 12 et le 14 juin dernier.
«On est la population la moins inquiète en Amérique du Nord, et ça se reflète dans quasiment tous les indicateurs, que ce soit par rapport au taux d’anxiété, la fin de la première vague, ou l’incidence d’une deuxième. Un Québécois sur trois pense que le virus est carrément parti», explique à Métro le président de l’Association d’études canadiennes (AEC), Jack Jedwab. C’est son organisme qui a commandé l’étude.
Derrière nous?
Réalisé par la firme Léger, le rapport conclut que 54% des Québécois – et 57% chez les francophones – estiment que la première vague de COVID-19 est derrière nous. Un chiffre beaucoup plus élevé qu’en Ontario (41%), dans les provinces de l’Atlantique (39%), en Alberta (47%) ou aux États-Unis (33%).
Quand on leur demande s’ils pensent qu’une deuxième vague de coronavirus surviendra, 67% des Québécois répondent que oui, alors qu’en Ontario, ce chiffre frise les 80%. Les sondeurs notent également que les résidents du Québec craignent très peu de contracter la maladie, dans une proportion de 40%, alors qu’aux États-Unis, en Ontario, ils sont au moins 60% à l’appréhender.
Pour M. Jedwab, il y a là un paradoxe clair. «D’une part, on a vraiment bien géré la crise de santé mentale, ce qui fait en sorte que la population a été rassurée. On a bien communiqué, ce qui est très positif. Sauf que trois mois après, c’est préoccupant de voir le relâchement que ça provoque», dit-il.
«On est peut-être trop relax. On le voit au centre-ville de Montréal, dans le comportement des gens. Il faut que nos décideurs soient plus fermes, sans pour autant alarmer la population. Il y a un équilibre à trouver, parce que le virus persiste, et on le voit à travers le monde.» -Jack Jedwab, de l’AEC
«Enthousiasme collectif»
Pour l’expert en virologie de l’UQAM, Benoit Barbeau, ce relâchement peut très certainement s’expliquer par le traumatisme «particulièrement sévère» que les Québécois ont vécu. «On a été plus frappés qu’ailleurs, et donc, on considère que le pire est passé, que c’était notre grosse vague. Ça donne des gens beaucoup plus optimistes, surtout que le nombre de cas ralentit et qu’on a été très agressifs dans les mesures, ce qui joue dans l’enthousiasme collectif», explique-t-il à Métro.
Dans les derniers jours, le directeur national de santé publique, Horacio Arruda, a souvent rappelé que ce «relâchement» était inquiétant.
«De la même façon que les commerces vont rouvrir de façon différente, on se doit aussi d’essayer de suivre les consignes, par respect pour les travailleurs de la santé, et ceux qui sont morts.» -Horacio Arruda, lors d’une conférence de presse le 11 juin dernier
S’il dit comprendre que la population ait envie de «revenir à la normale», le spécialiste appelle lui aussi à la prudence. «On veut que ce soit réglé, donc on se convainc soi-même. Mais il faut quand même comprendre que ce virus va faire partie de nos vies pendant un bout encore, qu’il est encore présent dans la population, et qu’on doit rester sur nos gardes», dit-il.
Malgré tout, cette perception «très optimiste» n’est «pas si fausse», nuance M. Barbeau. «On peut s’attendre à une baisse de la transmission cet été, parce que les gens seront davantage à l’extérieur. Cela dit, on peut s’attendre à ravoir des cas d’éclosion ici et là, cet automne», précise l’universitaire.
Une deuxième vague «très probable»
Aux yeux de la santé publique, les Québécois doivent se préparer pour une deuxième vague de la pandémie. Devant une résurgence des cas en Chine, le directeur national de santé publique, Horacio Arruda, a convenu qu’il s’attendait «très probablement» à voir une situation similaire au Québec.
«Sans être en panique, je suis toujours en train de me demander quand ça va réapparaître. Je pense très honnêtement qu’il va y en avoir une, deuxième vague», a-t-il indiqué.
Il invite à nouveaux les résidants de la province à la «collaboration».
Par ailleurs, alors que le dépistage est en chute libre, Dr Arruda réitère qu’ils souhaite voir les tests augmenter à nouveau. La Santé publique montréalaise mettra notamment fin à ses autobus de dépistage vendredi.