Le mandat d’enquête sur l’amiante du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) a pris fin vendredi. Après onze mois de consultations, l’organisme indépendant recommande à Québec de mettre en place une «entité administrative québécoise pour la gestion et l’élimination sécuritaires» du dangereux produit.
Cette instance se fonderait sur une «approche intégrée» et aurait pour objectif la valorisation des millions de tonnes de résidus amiantés sur le territoire québécois.
Le BAPE estime d’ailleurs qu’«une révision de l’encadrement et de la gestion de l’amiante doit être entreprise» dans la province.
Au Québec, les villes d’Asbestos et de Thetford Mines illustrent le passé d’exploiteur d’amiante du Québec. Là-bas reposent d’immenses amoncellements de ce matériel controversé. «On retrouve environ 800 millions de tonnes de résidus miniers amiantés accumulés dans des haldes [monticules de résidus miniers]», avance le BAPE.
Mandaté en octobre dernier, l’organisme affilié avait amorcé de longues consultations en décembre. Plusieurs centaines d’individus ont fait part de leur avis sur le futur de l’amiante, qui, selon la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST), a tué plus de 600 Québécois de 2014 à 2018.
La substance, qui gît en périphérie de quelques municipalités du Québec, a déjà été utilisée en grandes quantités en construction. La CNESST lui appose aujourd’hui l’étiquette «tolérance zéro», car elle peut causer une maladie chronique des poumons, l’amiantose, et des cancers.
Valoriser le matériel
Selon les conclusions du BAPE, il existe trois moyens viables de disposer de l’amiante et de ses résidus.
D’abord, les commissaires proposent de «végétaliser» les larges monticules d’amiante encore exposés à l’air. Cette méthode «réduirait sensiblement le niveau de contamination tant aquatique qu’atmosphérique», peut-on lire dans l’épais rapport du Bureau.
Le président de la commission d’enquête, Joseph Zayed, et son équipe proposent aussi d’extraire des résidus miniers les métaux et les matières premières utilisables. Ce processus devra toutefois «entraîne[r] la destruction totale des fibres d’amiante».
Selon le BAPE, une portion importante de l’amiante exploitée au XXe siècle s’est retrouvé dans l’asphalte «jusqu’en 2011». L’équipe de commissaires demande désormais au ministère des Transports du Québec d’en disposer.
«Considérant les coûts élevés de leur disposition par enfouissement, le MTQ souhaite d’abord stabiliser ces enrobés pour éviter la libération d’amiante et ensuite les utiliser dans l’aménagement de buttes et de structures visant à améliorer la sécurité routière», écrit-on.
«Traçabilité»
La mise sur pied d’une instance administrative de gestion de l’amiante permettrait selon le BAPE une meilleure «traçabilité» du matériel.
«La valorisation [de l’amiante et de ces résidus] doit se faire sans aucun compromis pour la santé des travailleurs et de la population», martèle-t-on dans le rapport.