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L’anglais exigé dans près de deux tiers des entreprises montréalaises

Montréal

Le centre-ville de Montréal

Demander à ses employés de maîtriser la langue de Shakespeare s’impose comme une pratique courante à Montréal. Selon une nouvelle étude, 63% des entreprises métropolitaines exigeaient en 2018 des compétences linguistiques en anglais.

Dans le reste du Québec, cette proportion s’élevait à environ 38%, conclut ce rapport de l’Institut de la statistique du Québec (ISQ) mené pour le compte de l’Office québécois de la langue française.

En entrevue avec Métro, le ministre responsable de la Langue française, Simon Jolin-Barrette, évoque une tendance «extrêmement préoccupante». Le député de la Coalition avenir Québec se dit d’ailleurs prêt à «agir pour corriger cette situation-là».

«Au cours des prochains mois, on pourra déposer le fruit de notre travail», affirme-t-il, en référence à un plan d’action imaginé par le gouvernement.

«Durant des années, le Parti libéral a abandonné la défense, la promotion et la valorisation de la langue. On ne trouve pas ça normal que les travailleurs québécois ne puissent pas travailler en français.» – Simon Jolin-Barrette, ministre responsable de la Langue française

Selon le président général du Mouvement Québec français (MQF), Maxime Laporte, les Québécois ont désormais besoin d’une «nouvelle Loi 101». «L’article 46 de la Charte de la langue française doit être bonifié de manière à ce que les exceptions en cette matière cessent d’être la règle», observe-t-il.

Cette section de la Loi 101 interdit à une entreprise d’exiger à l’embauche une langue autre que la langue officielle.

Il y a un peu moins d’un an, M. Jolin-Barrette avait avancé en mêlée de presse qu’il était prêt à «légiférer» sur l’utilisation du «Bonjour-Hi», cette expression bilingue d’accueil des clients utilisée en particulier au centre-ville de Montréal. Quelques jours plus tard, l’avocat de formation était revenu sur ses pas.

Et à la Ville?

L’anglais s’infiltre aussi chez les travailleurs de la fonction publique à la Ville de Montréal. Le document de l’ISQ précise que la moitié des arrondissements et des municipalités de l’Île demandent au minimum des connaissances en anglais et en français, ou bien en anglais seulement.

Un «enjeu», estime le ministre Jolin-Barrette. «Il faut faire en sorte que les municipalités soient exemplaires et que la langue de travail à l’intérieur des municipalités soit le français», martèle l’élu de Borduas.

«On travaille bien avec la mairesse de Montréal. […] Nous comptons sur elle pour prendre les mesures nécessaires», lance le député caquiste.

L’anglais comme langue de communication

Autre conclusion du rapport publié mardi: c’est surtout pour les communications orales à l’externe – avec un client par exemple – que les employeurs de la région de Montréal demandent la maîtrise de l’anglais.

Dans la métropole, 61% des entreprises qui demandent des notions d’anglais le font pour les contacts à l’extérieur de l’entreprise.

Or, plus de la moitié de ces compagnies (55%) ont aussi affirmé que la maîtrise de l’anglais servait à la communication orale «à l’intérieur de l’entreprise», soit dans les échanges entre employés.

«Il faut se réveiller. L’anglicisation de notre société est une réalité et il va falloir un sérieux coup de barre pour enfin se faire respecter», s’inquiète le secrétaire général de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ), Denis Bolduc.

Les oppositions veulent une intervention

Les groupes d’opposition à l’Assemblée nationale ont réagi mardi à l’émission des statistiques de l’OQLF.

Le Parti québécois craint d’importantes ramification aux données présentées par l’ISQ. «Le mouvement indépendantiste l’a toujours dit: si on perd Montréal, pour ce qui est du français, c’est foutu», affirme au bout du fil le chef intérimaire de la formation, Pascal Bérubé.

Chez Québec solidaire, on demande rapidement une réponse de Québec. «Le gouvernement Legault attend quoi pour mettre en œuvre des mesures spécifiques?», demande dans un communiqué de presse le député de Jean-Lesage, Sol Zanetti.

«Nous sommes toujours en attente du plan ambitieux promis par le gouvernement de la CAQ en avril 2019 en matière de promotion et de protection du français», ajoute dans une déclaration la critique libérale en matière de français, Hélène David.

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