Se trémousser dans un bar est déjà interdit, chanter à pleins poumons pourrait bientôt le devenir. Après une éclosion qui a fait au moins 40 cas de COVID-19 dans un bar de Québec, le directeur national de santé publique, Horacio Arruda, a convenu mercredi qu’il réfléchirait à interdire le karaoké.
«C’est clair que c’est une activité, à mon avis, qui est de même nature que la danse. Sur la question d’interdire le karaoké, on va voir ce qui en est», a indiqué Dr Arruda, de passage au Saguenay–Lac-Saint-Jean pour une activité de presse.
Pour le moment, il recommande aux Québécois d’éviter ce type d’activité, qui rend le respect de la distanciation physique «très difficile», selon lui.
«Faites le en Zoom, en Skype», a proposé le porte-parole principal de Santé publique.
Le karaoké à l’origine d’une éclosion à Québec
Depuis la réouverture des bars et des clubs, en juin, il est strictement interdit d’utiliser la piste de danse. Or, les bars karaoké ont le champ libre. Mercredi, la Santé publique de Québec a confirmé qu’une éclosion dans un de ces établissements, le Kirouac, a généré une quarantaine de cas de COVID-19.
D’ailleurs, trois des cas de coronavirus apparus dans cinq écoles de Québec sont liés à cette éclosion. Le directeur de santé publique par intérim, le Dr Jacques Girard, est formel à ce sujet. Un client infecté par la COVID-19, qui a fait la tournée de six bars durant la journée, est responsable de cette situation.
Lors du point de presse tenu aujourd’hui aux locaux du CIUSSS de la Capitale-Nationale, le Dr Girard a parlé d’une situation où un seul cas a permis au virus d’infecter un bon nombre d’individus.
Il a profité de l’occasion pour demander à tous les clients qui ont visité l’un des bars dans le secteur Saint-Sauveur le 23 août de passer un test de dépistage de façon préventive, qu’ils aient ou non des symptômes. «On va espérer qu’il n’y ait pas de nouveaux cas.»
Invité à commenter la situation du bar le Kirouac, le Dr Girard précise que le propriétaire a été très collaboratif. «Il y avait une situation problématique, mais on ne voudrait pas que cela se reproduise. Quant aux autres propriétaires, on les a informés qu’ils avaient la visite d’un porteur du virus.»
Sans parler d’une transmission communautaire, le directeur de santé publique par intérim mentionne qu’il y a eu 10 cas secondaires, tous issus du milieu familial.
D’autre part, il souligne que le karaoké peut représenter un danger important. «Lorsqu’on fait du karaoké, il est absolument nécessaire et indispensable d’avoir une barrière très efficace telle que le plexiglas. Il faut faire en sorte que lorsque les gens chantent, qu’ils ne contaminent pas leur voisin.»
Le CIUSSS a dû émettre des ordonnances afin de forcer deux clients du bar qui ne collaboraient pas avec la santé publique. «Nous avons dû utiliser ce levier qui nous permet d’isoler une personne pendant 14 jours et c’est ce que nous avons fait hier.»
Coup de grâce?
Les propos des Dr Arruda et Girard sèment l’inquiétude dans le milieu. À peine relevé des impacts de la première vague, le populaire bar karaoké Au Vieux Saint-Hubert, dans le Quartier latin de Montréal, craint que d’interdire ce loisir lui soit fatale.
«Ça mènerait sûrement à une fermeture définitive. Je trouve ça un peu déplorable», laisse tomber la propriétaire de l’établissement, Stéphanie Morin.
«On sent qu’on paie pour une minorité. Je connais beaucoup, beaucoup de propriétaires, et ils sont vraiment top notch.» – Stéphanie Morin
Avec la collaboration d’Alain Couillard, Québec Hebdo.