Racisme d’État, racisme institutionnel, racisme systémique ou discrimination systémique: quelles sont les différentes définitions et limites de ces termes? Bien qu’il n’y ait pas de consensus autour de la réponse, certains principes des experts consultés par Métro se rejoignent.
Avant de tenter de démêler ces termes, il est important de définir ce qu’est le racisme. Le politologue André Lamoureux et la sociologue Micheline Labelle s’entendent pour dire que le racisme est une «idéologie basée sur l’idée de hiérarchie entre les ‘races humaines’.»
Tous les deux précisent cependant que la notion de «race» est fausse. «Scientifiquement, l’ADN de l’espèce humaine est unique peu importe leur couleur», affirme André Lamoureux.
Selon Micheline Labelle, le racisme peut se traduire par quatre manifestations différentes: les préjugés, la discrimination, la ségrégation résidentielle et la violence.
Racisme d’État
Pour la sociologue, le racisme d’État est le plus haut niveau de gravité du racisme. «On en parle quand il s’agit de politiques adoptées par un État colonialiste, explique Micheline Labelle. C’était la forme de racisme de l’État canadien avant que les mesures de ségrégation officielles soient abolies.
Selon elle, le Canada a perpétué un racisme d’État jusque dans les années 60. «Avant 1965, on avait par exemple dans la politique d’immigration des critères qui faisait que certaines personnes étaient placées en premières et d’autres en dernières», précise Mme Labelle.
Or, elle ajoute qu’on ressent encore aujourd’hui ce racisme d’État avec la Loi sur les Indiens. «On le voit très bien dans la législation. Le fait de passer la Loi sur les Indiens, le fait d’exclure les Autochtones de la citoyenneté, de créer des réserves, etc.»
Racisme institutionnel
Pour André Lamoureux, le racisme d’État, le racisme institutionnel et le racisme systémique sont des termes similaires.
«Le racisme institutionnel, c’est lorsque les grandes institutions publiques, les organismes publics, l’État lui-même soutiennent une orientation raciste dans leur mission, dans leur fonctionnement, dans leurs mécanismes, dans leurs règles», avance-t-il.
Selon lui, seuls les Autochtones seraient victimes de racisme systémique au Canada avec La loi sur les Indiens. «Au Québec, il n’y a aucun organisme public qui est construit sur la base d’une orientation raciste consciente», soutient-il.
Racisme systémique
Micheline Labelle contredit André Lamoureux sur ce point. Elle estime que le racisme systémique se diffère du racisme d’État.
«Le racisme systémique n’est pas l’existence de lois ouvertement racistes, mais plutôt la présence de pratiques dans les institutions qui sont des facteurs de blocage pour l’amélioration des conditions de vie des minorités», explique-t-elle.
Il se traduirait par la présence de racisme dans les différents systèmes de l’éducation, de la justice, de la santé, etc.
«Ce n’est pas parce qu’il y a des individus racistes, mais parce qu’il y a une absence de mesure qui faciliterait d’abolir l’exclusion de certains groupes», indique-t-elle.
Discrimination systémique
Le racisme systémique et la discrimination systémique sont deux choses différentes, pensent les deux experts.
La discrimination systémique peut être à caractère raciste, mais aussi sexiste ou homophobe, indique Micheline Labelle.
«Tandis que quand on parle de racisme systémique, on qualifie bien au départ qu’il s’agit de racisme dans ces différentes manifestations», ajoute-t-elle.
La discrimination systémique peut donc se porter à l’égard de plusieurs types de personnes et non seulement des personnes racisées.
«Il y a eu des cas de discrimination systémique et ça existe encore. Les jeunes peuvent être victimes de discrimination systémique, par exemple. Dès qu’on vise un groupe en particulier, c’est une forme de discrimination systémique», souligne André Lamoureux.