Les conditions imposées aux auteurs présumés d’actes de violence conjugale, sensées offrir une protection de la cour pour les victimes, peuvent devenir un «écran de fumée» si celles-ci ne sont pas respectées, révèle un rapport de recherche.
De nombreux dossiers de violence conjugale se règlent en utilisant l’article 810 du Code criminel. En «signant un 810», l’accusé obtient le retrait des charges criminelles qui pèsent contre lui. Il promet, en échange, de ne pas troubler l’ordre public et de respecter d’autres conditions déterminées. Celles-ci comprennent souvent l’interdiction d’entrer en contact avec la victime ou de s’approcher d’elle.
Conditions non respectées
Or, c’est seulement dans la mesure où ces conditions sont respectées qu’elles deviennent utiles, rapportent des femmes interrogées dans le cadre de la recherche. Celles-ci racontent que leur ex-conjoint déjoue facilement ces conditions.
Ainsi, les conditions assorties deviennent un «écran de fumée» qui peut porter atteinte au sentiment de sécurité, précise la chercheuse principale, Myriam Dubé.
À partir des témoignages recueillis, le collectif de chercheuses recommande notamment que les bris de conditions soient pris beaucoup plus au sérieux, avec des sanctions plus systématiques.
«À l’heure actuelle, on a des femmes qui s’adressent à la police pour dénoncer les bris de conditions et on leur répond qu’on ne peut rien faire», explique Louise Riendeau du Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale.
Pistes d’actions
Les chercheuses demandent des directives claires de la part des autorités à ce niveau. «S’il y a des bris de conditions, ça devrait apparaitre quelque part et ça devrait donner des résultats», suggère Mme Riendeau.
Un autre moyen d’améliorer la réponse du système de justice et des services policiers est d’évaluer les risques de récidive avant de procéder à un «810».
«En ce moment, c’est un peu comme si on prenait pour acquis que quelqu’un à qui on impose des conditions va les respecter», déclare Louise Riendeau. Or, en violence conjugale, cela offre bien peu de protection, souligne-t-elle.
Finalement, Myriam Dubé souligne l’importance de la collaboration intersectorielle et de la consultation des divers acteurs au dossier. Elle propose donc la création d’équipes spécialisées à l’intérieur des services policiers et du système de justice.
«Cela permettrait aux auteurs de violence conjugale d’avoir un meilleur encadrement et aux victimes d’être protégées», affirme-t-elle.