Les messages émis par les entreprises et les gouvernements au courant de la pandémie ont évolué au fur et à mesure que l’on acquérait une meilleure compréhension de l’ampleur de la crise, selon une nouvelle recherche. D’abord portées à minimiser la COVID-19, les entreprises ont vite pris leurs responsabilités, puis tenté de responsabiliser les consommateurs.
C’est ce que constatent les chercheuses de l’École de gestion John-Molson de l’Université Concordia Zeynep Arsel et Aya Aboelenien qui se sont penchées sur le sujet.
«Nous traverserons cette épreuve ensemble» ou «nous sommes là pour vous» sont des exemples de messages émis par les entreprises au tout début de la pandémie de COVID-19.
Au départ, ceux-ci véhiculaient un «souci de la clientèle». «Même des commerçants avec lesquels nous n’avions pas fait affaire depuis des années nous contactaient pour nous dire qu’ils étaient là pour nous», affirme Zeynep Arsel.
Les deux professeures du Département de marketing et leur collègue chercheur Charles Cho, de l’École de gestion Shulich de l’Université York, ont publié récemment l’article «Passing the Buck vs. Sharing Responsibility: The Roles of Government, Firms and Consumers in Marketplace Risks during COVID-19» dans le Journal of the Association for Consumer Research.
Minimisation du virus
Leur recherche montre qu’au premier stade de la pandémie, bon nombre d’organisations et de décideurs politiques faisaient le minimum pour protéger les consommateurs.
Leurs messages relatifs au virus minimisaient involontairement la gravité de la situation.
«En insistant sur le fait que seules les personnes vulnérables étaient à risque, les organisations ont contribué à susciter chez les consommateurs un sentiment d’invulnérabilité», explique Aya Aboelenien.
Par conséquent, les clients ont été lents à changer leur comportement et leurs pratiques.
Changement de ton
Puis, un mois après le début de la crise, le ton a légèrement changé. Les organisations ont réorienté leurs propos pour montrer qu’elles prenaient la situation plus au sérieux.
Elles ont assumé leur responsabilité de gérer les risques de propagation en mettant en vigueur des mesures de santé et de sécurité.
Les messages envoyés exprimaient alors un souci pour leurs clients dans l’espoir d’atténuer les inquiétudes concernant les ruptures de stock et la sécurité.
Toutefois, ces efforts ont éventuellement atteint un plafond.
Responsabilisation
Les organisations ont, une fois de plus, rapidement réorienté leur message. Ainsi, elles ont finalement placé la responsabilité de limiter l’impact du virus sur les épaules des consommateurs.
«Nous avons tous un rôle à jouer afin que la société puisse progresser dans sa lutte contre le virus, note Zeynep Arsel. Il faut absolument que cette notion soit incluse dans le message dès le départ. Sinon, les consommateurs ne se percevront pas comme faisant partie de la solution.»
Même lorsqu’il existe une certaine ambiguïté autour de la connaissance scientifique, comme dans le cas de la COVID-19, les organisations ne doivent pas attendre que les choses deviennent plus claires, concluent les chercheuses.
«N’attendez pas les directives du gouvernement ou des organisations pour tenter “d’agir correctement”, conseille Zeynep Arsel. On ne peut être trop prudent; en temps de crise, l’optimisme ne constitue pas la meilleure approche.»