Le torchon brûle entre le premier ministre Justin Trudeau et les familles des victimes de l’attentat de Polytechnique. Aux yeux de ces dernières, Ottawa manque d’ambition avec son projet de loi C-21 sur le contrôle des armes à feu.
«Comme vous le faites année après année lors de chaque commémoration à la mémoire des victimes, vous dites que vous partagez la peine et la souffrance que nous vivons. C’est faux, monsieur le premier ministre», martèlent dans une lettre une trentaine de proches de la tuerie de 1989.
Adressée directement à Justin Trudeau, la missive lui demande de réviser au plus vite le projet de loi, déposé en février aux communes. Sans quoi, «nous ne serons pas plus en sécurité», arguent les signataires.
Longtemps promis par le gouvernement libéral, C-21 instaure un programme de rachat volontaire des armes d’assaut. Il n’interdit pas non plus la possession d’armes de poing, reléguant cette responsabilité dans la cour des municipalités.
Persona non grata
La lettre intitulée «Le projet de Loi C-21, une trahison pour les victimes, survivants et familles détruites par des fusillades» dénonce directement l’attitude du premier ministre, un double discours selon ses auteurs.
«Nous avons eu le très grand privilège de vous rencontrer à quelques reprises depuis 2014. […] À chaque fois, vous avez exprimé votre compassion devant les événements et le drame qu’ont dû traverser les familles. […] À chaque fois, vous nous avez aussi personnellement manifesté votre intention de faire le travail nécessaire», peut-on lire.
«Si vous poursuivez avec ce projet de loi, plus jamais nous n’accepterons de vous recevoir à nos côtés lorsque nous pleurerons la mort de nos filles, de nos sœurs, de nos amies, lors des commémorations annuelles.» – extrait de la lettre
Les auteurs de la missive se joignent aux critiques entendues depuis le dépôt du projet de loi, en demandant notamment de mettre sur pied un programme de rachat obligatoire, en plus de prendre en main directement l’interdiction des armes de poing.
C-21 est la proie de plusieurs critiques depuis son dépôt. En février, la mairesse de Montréal, Valérie Plante, a vivement dénoncé l’intention d’Ottawa de donner aux municipalités le devoir d’élaborer leurs propres règlements. À Québec aussi, le gouvernement s’était dit «agacé».
En décembre prochain, Polytechnique soulignera 32 ans depuis la mort tragique de 14 des siennes, dans la pire tuerie en milieu scolaire de l’histoire canadienne.