L’institut de recherche et d’informations socio-économiques (IRIS) révèle dans sa nouvelle note socio-économique qu’un cinquième de la population québécoise n’a pas accès à un revenu viable, c’est-à-dire un revenu qui permet de vivre dignement.
À Montréal, ce revenu viable se situe à 28 783$ pour une personne seule, 39 999$ pour une personne monoparentale avec un enfant en CPE et 61 884$ pour un couple avec deux enfants en CPE.
«En 2021, une personne seule de moins de 65 ans à Montréal doit travailler un peu plus de 35 heures par semaine à un salaire horaire de 18$ pour disposer d’un revenu après impôt à peu près équivalent au revenu viable. Ce n’est donc pas un salaire minimum horaire passant de 13,10$ à 13,50$ en mai 2021 qui réglera la question et qui permettra une sortie de la pauvreté.» – Note socio-économique de l’IRIS
Alors que la mesure du panier de consommation (MPC) permet uniquement de couvrir les besoins de base comme l’alimentation, l’habillement, le transport, le logement et les autres nécessités, le revenu viable est un indicateur pour un niveau de vie exempt de pauvreté.
L’IRIS préconise l’amélioration des revenus du cinquième le plus pauvre de la population. C’est-à-dire la population se situant sous le revenu viable et autour de ce seuil.
«Bien vivre en temps de pandémie comme après la pandémie suppose de pouvoir se retrouver davantage au centre de l’échelle des revenus, ce qui suppose une politique globale de réduction des inégalités de revenus. Le principe de l’amélioration prioritaire des revenus du cinquième le plus pauvre de la population sur ceux du cinquième le plus riche a l’avantage de nous y conduire.» – Note socio-économique de l’IRIS.
L’utilisation de plusieurs indicateurs est nécessaire pour la mise en place des politiques de lutte contre la pauvreté selon Philippe Hurteau, chercheur à l’IRIS.
«Lorsqu’on se situe au-dessus du seuil du MPC, on n’est pas nécessairement sorti d’affaire. Ce que l’on trouve intéressant c’est que le gouvernement devrait utiliser plusieurs mesures comme le MPC ou le revenu viable dans leurs politiques gouvernementales. Présentement, Québec et Ottawa n’utilisent que le MPC et dès que quelqu’un atteint ce niveau-là, c’est comme si le problème disparaissait.»
Le revenu viable intègre des dépenses non discrétionnaires comme les soins dentaires et ophtalmologiques non assurés ou des frais de garde en CPE ou de gardienne.
Avec le concept du revenu viable, un ménage pourra se permettre un repas au restaurant par mois et une activité plus festive ou une alternative équivalente, alors que la MPC s’en tient strictement au Guide alimentaire canadien et peut difficilement permettre une certaine vie sociale ou une marge de manœuvre face à un imprévu.
Alors, qui a accès au revenu viable ?
Environ 80% de la population aurait accès à un revenu viable. L’autre 20%, entre le seuil de la MPC et celui du revenu viable, représente une forte proportion de personnes travaillant à moins de 18$ l’heure.
Il s’agit ici d’un bon nombre de ménages de personnes seules, de ménages dirigés par une femme, de ménages de personnes âgées vivant avec le minimum garanti par la pension pour la vieillesse et le supplément de revenu garanti et de personnes racisées entre autres.
«Très loin en deçà d’un revenu viable, il y a toutes les personnes qui n’atteignent déjà pas le seuil de la couverture des besoins de base indiqué par la MPC, dont les personnes à l’aide sociale, limitées d’office à la moitié de ce seuil, avec toutes les contraintes vitales que cela suppose.» – L’institut de recherche et d’informations socio-économiques (IRIS)
Des mesures concrètes pourraient cibler ce cinquième de la population comme l’augmentation graduelle du salaire minimum, réduire les postes de dépenses les plus lourds notamment le coût du logement et les transports, ou même réajuster l’aide sociale: «le gouvernement du Québec est en défaut par rapport à l’engagement pris en 2017 de leur assurer un revenu disponible correspondant à 55,1% de la MPC», précise M. Hurteau.