Une nouvelle recherche montre qu’une partie des propriétaires de véhicules électriques et hybrides rechargeables retournent aux véhicules à essence ou hybrides traditionnels, citant certains problèmes. Le Québec résiste toutefois à la tendance.
Les ventes mondiales de véhicules électriques (VÉ) continuent de croître à des niveaux impressionnants à travers la planète. Selon le rapport Global EV Outlook 2020 produit par l’Agence internationale de l’énergie, les ventes de voitures électriques ont dépassé les 2,1 M$ en 2019, une augmentation de 6% sur l’année précédente. Le parc mondial de voitures électriques est désormais de 7,2 millions.
La situation est semblable au Québec. Selon l’Association des véhicules électriques du Québec (AVÉQ), les ventes ont progressé de 7,3% dans la Belle Province. Les Québécois achètent d’ailleurs plus de la moitié des véhicules de ce type vendus au Canada.
Malgré ces chiffres encourageants, une étude récente publiée dans la revue Nature montre que certains propriétaires de VÉ retournent aux véhicules à essence ou aux véhicules hybrides traditionnels.
Des chercheurs de l’Institut d’études sur le transport, à l’Université de Californie Davis, ont retracé les propriétaires de VÉ ayant décidé de s’acheter un véhicule neuf entre 2015 et 2019. Ils voulaient savoir s’ils se procuraient un autre VÉ ou une voiture plus traditionnelle.
Ils ont conclu que le taux d’abandon des VÉ en Californie est d’environ 20% pour les hybrides rechargeables et de 18% pour les véhicules entièrement électriques.
20% – Proportion des propriétaires de véhicules hybrides rechargeables qui sont retournés aux véhicules à essence ou hybrides traditionnels.
Mais pourquoi ce phénomène?
Selon les experts, les facteurs liés à l’abandon sont «l’insatisfaction concernant la recharge malcommode, la possession d’autres véhicules plus énergivores, l’absence de prise de recharge de niveau 2 (240 volts) à la maison, le fait de posséder moins de véhicules à la maison, et le fait de ne pas être un homme».
Au Québec, toutefois, la situation semble bien meilleure. Selon l’AVÉQ, seulement 8% des propriétaires de VÉ considéraient retourner à l’essence en 2019. Un sondage qui n’a pas encore été publié montrerait que ce chiffre se situe près de 7% en 2021.
Avec des informations d’Olivier Robichaud
Pour en savoir plus, Métro s’est entretenu avec Scott Hardman, auteur de l’étude et chercheur au Centre de recherche sur les véhicules électriques et hybrides rechargeables à l’Institut d’études sur le transport de l’Université de Californie Davis.
Qu’est-ce que les constructeurs de VÉ peuvent faire pour garder leur clientèle?
Scott Hardman explique:
-Ils peuvent les soutenir dans l’installation de points de recharge de niveau 2 à domicile. Pour ceux qui ont des revenus plus élevés et qui vivent dans une maison unifamiliale, ce n’est peut-être pas un problème. Mais pour ceux qui vivent en condo ou qui ne peuvent se payer ce type de prise, c’est plus problématique. S’assurer que le plus grand nombre de ménages possible puisse avoir accès à la recharge à domicile est un objectif important pour augmenter l’accessibilité des VÉ.
-La façon de recharger les VÉ peut changer la donne si les ménages peuvent éviter à tout jamais la station service et recharger leur véhicule à domicile de façon efficace et à peu de frais. Plus ça sera la réalité des propriétaires, mieux ça sera.
«L’un des facteurs importants liés à l’abandon des VÉ est la perception que la recharge, c’est malcommode.» – Scott Hardman, chercheur au Centre de recherche sur les véhicules électriques et hybrides rechargeables à l’Institut d’études sur le transport de l’Université de Californie Davis.
-Certains parlent de bornes de recharge publiques comme solution pour ceux qui n’y ont pas accès à la maison. Mais on ne devrait pas considérer la recharge publique comme une option équivalente à la recharge à domicile. C’est beaucoup moins commode et plus cher. Le rôle de la recharge publique dans la transition vers les VÉ, c’est pour les besoins occasionnels et les déplacements sur de longues distances. Ce n’est pas pour la recharge de routine.
Les véhicules électriques avec les plus forts taux d’abandon:
- Fiat 36.9%
- Toyota 24.9%
- Ford 23.9%
- BMW 21.3%
- Nissan 20.8%
- Volkswagen 17.2%
- Chevrolet 14.2%
- Tesla 11.0%
Deux questions pour…
Simon-Pierre Rioux, président fondateur et porte-parole de l’Association des véhicules électriques du Québec
Pourquoi la situation semble-t-elle meilleure au Québec qu’en Californie?
– La période couverte par l’étude, c’était la première génération de véhicules électriques avec une autonomie de 140 km. Il y avait des gens qui n’avaient pas accès à des bornes, les réseaux étaient peu développés. […] Surtout qu’en Californie, les distances en banlieue sont plus grandes. On se retrouvait avec des files d’attente pour les bornes de recharge. […] Le réseau de recharge est beaucoup plus développé au Québec. Le fait qu’il est plus développé, le fait qu’il n’y a pas de panne, le fait que certaines entreprises de bornes ont fait faillite en Californie, des gens arrivaient à une borne qui ne marchait pas. Au Québec, on a le réseau public où, lorsqu’il y a un bris d’une borne, elle est réparée à l’intérieur de 48 heures.
L’étude californienne montre que les bornes publiques n’ont pas de corrélation avec l’abandon des VÉ, mais l’absence de bornes à domicile, oui. Est-ce un frein dans une ville comme Montréal?
– Oui, absolument. C’est pour ça qu’on essaie de travailler avec les syndicats de copropriétés pour qu’ils comprennent les façons de faire. […] Les nouvelles constructions, on leur suggère fortement que le filage au moins soit installé dans chaque espace de stationnement. Comme ça les gens qui en ont besoin pourront y avoir accès selon leurs besoins à eux. Un locataire qui n’a pas de borne dans son édifice ne va pas s’acheter un véhicule électrique sachant qu’il ne pourra pas le recharger.