Le ministre de l’Économie Pierre Fitzgibbon doit être suspendu de son droit de siéger à l’Assemblée nationale, recommande la commissaire à l’éthique Ariane Mignolet. Ses intérêts dans deux entreprises seraient «en opposition» avec le code de déontologie auquel sont soumis les membres.
Les députés de l’Assemblée devront voter sur la sanction suggérée. Un appui des deux tiers des députés sera nécessaire afin que la suspension soit effective.
M. Fitzgibbon était absent de la chambre de l’Assemblée nationale, mercredi. Le premier ministre François Legault réagira aux recommandations lors d’une conférence de presse, à 13h.
Cette suspension serait effective jusqu’à ce que le ministre retire ses participations dans les sociétés ImmerVision et White Star Capital. On lui soumet une alternative: se retirer du conseil des ministres et placer ses intérêts dans une fiducie sans droit de regard.
Ces deux entreprises font affaire avec le gouvernement du Québec. Par conséquent, M. Fitzgibbon ferait entorse à l’article 46 du Code de déontologie des membres de l’Assemblée nationale, qui proscrit une telle pratique par un ministre.
Cette situation contribue malheureusement à miner la confiance du public envers ses élus et les institutions démocratiques dans leur ensemble, dans un contexte particulier où l’adhésion de la population aux règles est d’une importance capitale. – Rapport de la commissaire à l’éthique
Pour pallier la situation, les pouvoirs et attributions du gouvernement à l’égard des deux sociétés avaient été confiés à la Présidente du Conseil du trésor, Sonia Lebel. Cela n’aurait toutefois «aucun impact sur l’application» du Code de déontologie, a tranché la commissaire.
Il est important pour les élus d’adopter une conduite correspondant à ce qui est attendu d’eux, rappelle-t-elle.
«En refusant de se conformer à une disposition législative, la conduite du Ministre est en opposition avec cet objectif poursuivi par le Code et exigé par ses fonctions», statue-t-elle.
La perte du siège de M. Fitzgibbon a été écartée des recommandations, puisqu’elle est considérée comme «disproportionnée à ce stade-ci.»
Désuet ou pas?
Le manquement a été exposé par un rapport de la commissaire en décembre. Depuis, le ministre aurait eu l’occasion de se départir de ses intérêts, mais ne désirait pas le faire «à escompte.»
Le premier ministre Legault avait défendu M. Fitzgibbon, considérant que le Code de déontologie était désuet, et devait être modifié. Mais ici, l’enjeu n’était pas de déterminer «s’il est injuste envers un ministre au profil d’investisseur», considère la commissaire.
«Plutôt, la présente enquête soulève la question suivante: peut-on choisir de ne pas se conformer à une loi qui nous est applicable? Dans un État de droit, la réponse à cette question devrait toujours être non», détermine-t-elle.
Le député de Québec solidaire Vincent Marissal avait demandé à la commissaire d’émettre un rapport en mars, afin de déterminer si Pierre Fitzgibbon s’était départi de ses intérêts dans les deux sociétés ciblées.