Il était venu pour défendre son plan de relance, il est reparti avec une polémique sur son unilinguisme. Le PDG d’Air Canada, Michael Rousseau est au cœur des critiques au lendemain de plusieurs marques de mépris envers le français.
Nommé à la tête d’Air Canada en avril 2021, le dirigeant de la compagnie aérienne était invité par la Chambre de commerce du Montréal métropolitain mercredi midi pour discuter du plan de relance de la compagnie qui s’amorcera le 15 novembre. Pourtant, c’est un tout autre sujet qui a cristallisé les discussions autour de son intervention.
Si le ton était donné après un discours entièrement en anglais où le PDG d’Air Canada n’a parlé français que quelques secondes le temps d’un bref salut, c’est lors de la mêlée de presse en suivi que M. Rousseau a fauté.
S’il avait affirmé bien comprendre le français durant son discours et avoir seulement des difficultés pour le parler, le PDG a pourtant demandé aux journalistes de lui poser les questions en anglais afin de s’assurer de bien les comprendre.
Interrogé sur le fait de vivre depuis 14 ans à Montréal tout en parlant «un français approximatif», le dirigeant n’a pas bronché et a répondu: «J’ai pu vivre à Montréal sans parler français. Et je pense que c’est tout à l’honneur de cette ville.»
Apprendre le français n’est pas non plus à l’ordre du jour, déclare-t-il par la suite, affirmant manquer de temps et faire de la relance d’Air Canada sa priorité.
«C’est insultant», «propos indignes», «épouvantables et irrespectueux»…
Une sortie qui n’a pas manqué de faire réagir la classe dirigeante, que ce soit au niveau provincial ou fédéral, qui pointe du doigt le mépris pour la langue de la part du PDG d’Air Canada.
Présent à la COP26, le premier ministre François Legault a qualifié le comportement de Michael Rousseau «d’insultant» et a exigé des excuses de la part du dirigeant.
C’est sûr que si c’était quelqu’un de l’extérieur du Québec. Ça arrive qu’on ait Bill Clinton ou, peu importe, Barack Obama ou son épouse qui arrive à Montréal et qui parle juste en anglais, on peut comprendre. Mais le président d’une entreprise qui a un siège social dans un état ou la langue officielle c’est le français…
François Legault, premier ministre du Québec
Le ministre de la Justice Simon Jolin-Barrette a notamment jugé les propos du dirigeant «indignes des fonctions qu’il occupe», exprimant «tout ce que nous avons rejeté il y a des décennies».
Dans une suite de tweets, la ministre fédérale des Langues officielles Ginette Petitpas Taylor a encouragé le PDG à faire l’effort tout en réaffirmant que le service important d’Air Canada doit se faire dans les deux langues officielles et que «ses leaders doivent montrer l’exemple».
Du côté des partis d’opposition, on condamne également le mépris de M. Rousseau. La chef du Parti libéral, Dominique Anglade, qualifie les propos d’«épouvantables et irrespectueux». Le chef du Parti québécois, Paul St-Pierre Plamondon pointe du doigt, lui, que le français n’est qu’«une peccadille optionnelle» pour Michael Rousseau.
Interrogée au micro de Patrick Masbourian dans l’émission Tout un matin, la députée libérale Marwah Rizqy a surtout eu l’impression qu’il s’en vantait et «se dédouanait». Tout en rappelant que son entreprise collectionne les sanctions en matière de bris de service en Français, la porte-parole de l’opposition officielle en matière d’éducation pointe du doigt le «doigt d’honneur» du PDG envoyé aux Québécois, mais aussi aux immigrants.
«Moi c’est venu me chercher parce que quand j’entends un PDG multimillionnaire me dire “je n’ai pas le temps d’apprendre le français”. Non, il n’a pas pris le temps d’apprendre le français.»
Marwah Rizqy, députée libérale de Saint-Laurent
Du côté fédéral, le chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet, pose la question de revoir l’aide et les subventions du Québec à la compagnie aérienne «si le patron n’a aucune considération pour le français».
Le chef conservateur Erin O’Toole a quant à lui réaffirmé qu’une personne occupant un tel poste de direction «devrait veiller à être parfaitement bilingue».