MONTRÉAL — Aux prises avec des retards dans les programmes de ses nouveaux avions, Bombardier (TSX:BBD.B) supprime 1700 emplois, dont la grande majorité à Montréal et Mirabel, afin de tenter de réduire ses coûts.
L’avionneur a fait part de cette décision mardi et les employés concernés devraient être avertis au cours des prochaines semaines.
Quelque 1100 des 22 200 employés canadiens de l’entreprise sont affectés, alors qu’aux États-Unis, cette décision concerne 550 des 5700 travailleurs de Bombardier à Wichita, dans l’État du Kansas.
L’avionneur québécois a justifié sa décision en évoquant l’importance de réduire ses dépenses, notamment dans la foulée des récents retards dans ses programmes de la CSeries ainsi que du Learjet 85.
“Ces contrôles contribueront à contrebalancer les investissements significatifs que nous effectuons dans nos nouveaux programmes de développement de produits”, écrit la vice-présidente responsable des ressources humaines de Bombardier, Sylvie Bourdon, dans une note interne obtenue par La Presse Canadienne.
Les 300 postes éliminés par l’entreprise en décembre dernier sont compris dans les 1700 emplois supprimés.
“Ces postes (…) font partie des fonctions fabrication et assemblage, ingénierie, ventes et services après-vente et d’autres fonctions de soutien, écrit Mme Bourdon. Tant les entrepreneurs que les employés permanents seront touchés.”
Les travailleurs licenciés auront cependant l’opportunité de postuler pour des postes actuellement vacants au sein de l’entreprise.
“Il existe des postes ouverts au sein de l’entreprise; (les) ressources humaines collaboreront étroitement pour aider les employés permanents touchés dont l’expérience, le profil et les compétences pourraient correspondre à ceux de postes à pourvoir au sein de l’entreprise”, souligne Mme Bourdon.
Pour le représentant spécial du Syndicat des machinistes (affilié à Fédération des travailleurs du Québec) qui représente plusieurs syndiqués de Bombardier, David Chartrand, l’annonce semble moins dramatique dans les faits qu’elle ne le paraît à première vue.
“Il y a 300 (emplois) là-dedans qui sont des temporaires embauchés par l’employeur, a-t-il affirmé. La majorité de ces 1100 emplois, ce sont des gens qui sont dans les bureaux, qui sont des ingénieurs embauchés pour une période de temps déterminée.”
Selon lui, les travailleurs syndiqués de Bombardier devraient s’en tirer et même être rappelés plus tard cette année.
“Nous, les employés syndiqués, on parle d’environ 250 personnes qui vont quitter d’ici le mois de mai, de façon temporaire, a-t-il expliqué en entrevue. Là-dedans, il y a beaucoup d’employés qui devraient être rappelés.
“Pour l’instant, il y a des retards dans certains programmes (CSeries et Learjet 85) et il y a actuellement un peu moins de travail”, a ajouté M. Chartrand.
Dans le passé, Bombardier a souvent procédé à des licenciements massifs lors de périodes plus difficiles tout en procédant à d’importantes embauches lorsque la demande était au rendez-vous.
En 2009, l’entreprise avait procédé à 715 mises à pied dans la grande région métropolitaine de Montréal en raison notamment d’une révision à la baisse de la cadence de production de ses avions CRJ.
Selon l’analyste Walter Spracklin, de RBC Marchés des capitaux, les licenciements dans la grande région de Montréal devrait concerner les employés affectés au programme de la CSeries.
“Le programme semble complet en ce qui a trait à la construction alors il y a peu de raison de retenir les services d’ingénieurs mécaniques alors que les problèmes (du programme) concernent l’intégration des logiciels”, écrit-il dans une note envoyée par courriel.
Bombardier a également indiqué que sa décision de mardi ne concernait pas ses travailleurs au Mexique ainsi qu’en Irlande du Nord.
Le ministre des Finances du Québec, Nicolas Marceau, a déploré ces pertes d’emplois, mais a souligné, par voie de communiqué, que le secteur québécois de l’aéronautique offrait des perspectives “encourageantes”.
“À pleine cadence de production, la fabrication des CSeries fera travailler 3500 personnes au Québec sans parler des retombées chez plusieurs fournisseurs, a-t-il souligné. Il est donc fort probable qu’une partie des employés mis à pied seront rappelés.”
Mauvaise série
L’annonce de mardi survient dans la foulée de récentes mauvaises nouvelles pour l’avionneur montréalais.
La semaine dernière, Bombardier a annoncé que les premières livraisons des premiers CS100, prévues à l’automne, n’auraient pas lieu avant la deuxième moitié de l’année 2015, soit plusieurs mois après l’échéancier prévu.
“Même si nous constatons des signes encourageants au niveau de l’économie, l’industrie de l’aviation fait toujours face à des défis”, rappelle Mme Bourdon dans sa lettre.
L’entreprise avait cependant indiqué que les coûts de ce programme étaient toujours estimés à quelque 3,4 milliards $ US et que cette décision ne devrait pas se traduire par des suppressions d’emplois à court terme.
Lundi, on apprenait également que le carnet de commandes de l’entreprise en ce qui a trait aux avions commerciaux et d’affaires avait fondu de 19 pour cent de 2012 à 2013.
Finalement, vendredi dernier, l’agence de notation américaine Fitch avait indiqué qu’elle dévaluait la cote de crédit de Bombardier, la faisant passer de “BB” à “BB-”.
À la Bourse de Toronto, en après-midi, l’action de Bombardier cédait huit cents, ou 1,95 pour cent, à 4,03 $.