Les réactions se multiplient depuis que le gouvernement Legault a annoncé son intention de porter en appel la décision rendue par la Cour supérieure sur les interpellations aléatoires sans motif raisonnable. Sacha-Wilky Merazil, qui avait dénoncé dans Métro le profilage racial du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) dont il avait été lui-même victime, dénonce un changement de discours de la part du premier ministre François Legault.
Sur Twitter, en 2020, ce dernier qualifiait la fin des interpellations aléatoires et du profilage, «chez certains policiers», de «mesure la plus efficace pour lutter concrètement contre le racisme». Et il y a plusieurs semaines, en réaction au jugement de la Cour supérieure, le premier ministre du Québec avait déclaré qu’il «faut laisser les policiers faire leur travail».
Une volte-face que déplore M. Merazil. «Deux ans plus tard, il recule sur ce qu’il avait jugé avant-gardiste. On sait quels sont les problèmes et défis des corps policiers envers les minorités. [Le gouvernement] continue de faire comme s’il n’y avait pas de problèmes. Ce revirement, c’est comme si les minorités pouvaient continuer d’être profilées. Le profilage racial ne devrait pas avoir lieu», martèle-t-il.
En 2020, le SPVM avait sollicité Sacha-Wilky Merazil pour qu’il participe à des groupes de travail pour lutter contre le profilage racial. Qualifiant de regrettable cette décision de François Legault, M. Merazil y voit un signal contraire aux initiatives du corps policier pour lutter contre le racisme, et même à la récente nomination du directeur Fady Dagher, qu’il voit pourtant d’un bon œil.
Le PLQ et QS fustigent l’appel de la décision
Ce n’est d’ailleurs pas la première contradiction de la Coalition avenir Québec (CAQ) quant au profilage racial. Le Groupe d’action contre le racisme (GACR), dont faisait partie cinq élus caquistes, incluant le ministre responsable de la Lutte contre le racisme, Christopher Skeete, avait rendu pour première recommandation de mettre une fin aux interpellations policières aléatoires.
«Encore une fois, la CAQ fait la démonstration de son style de gouvernance improvisée et incohérente. Cette décision est d’autant plus étonnante d’un gouvernement qui disait haut et fort vouloir tout mettre en œuvre pour combattre le profilage racial. Le ministre doit s’expliquer!», laisse tomber la députée libérale Jennifer Maccarone, porte-parole de l’opposition officielle en matière de sécurité publique.
Québec solidaire, par la voix du député Andrés Fontecilla, qualifie la démarche de «honte». «C’est une immense claque au visage pour toutes les personnes racisées, en particulier pour les communautés noires du Québec.» Il croit que maintenir l’article 636 du Code de la route reviendrait à admettre que le profilage racial est acceptable.
Sacha-Wilky Merazil reconnaît le droit du gouvernement à contester la décision de la cour – «c’est une décision légitime», estime-t-il. «Mais ç’aurait été bien de voir comment se sentent les minorités et comment on peut rétablir le lien de confiance envers la police. C’est décevant de voir comment les minorités vont être profilées encore longtemps.»