Les agressions visant les personnes asiatiques ont explosé aux Etats-Unis avec la pandémie, alors pour l’équipe de Raya et le dernier dragon, la sortie du dernier film d’animation de Disney arrive à point nommé pour combattre ces préjugés.
Le film, qui sort vendredi, se déroule dans un univers imaginaire inspiré par différents pays d’Asie du Sud-Est, où une jeune princesse doit trouver le dragon qui pourra sauver Kumandra et réunifier ses royaumes, profondément divisés.
Pour doubler les voix en version originale, le numéro un mondial du divertissement a choisi des stars d’origine asiatique comme Sandra Oh, Awkwafina, Kelly Marie Tran et Gemma Chan.
Un paradoxe alors que le nombre des agressions visant des individus asiatiques aux États-Unis a bondi ces derniers mois, alimentées selon certains observateurs par des clichés erronés sur la pandémie et la rhétorique de l’ex-président Donald Trump autour du «virus chinois».
«Nous avons tous vu ces agressions se dérouler, encore, et encore… on finit par se dire parfois que le monde ne tourne vraiment pas rond», a déclaré Kelly Marie Tran, actrice américaine d’origine vietnamienne qui prête sa voix à Raya.
Elle a elle-même été victime d’insultes racistes et misogynes ainsi que de cyber-harcèlement par certains fans de l’univers Star Wars après son rôle dans Les Derniers Jedi en 2017.
Plusieurs autres membres de l’équipe de « Raya et le dernier dragon » se sont publiquement émus de l’hostilité et des attaques visant les communautés asiatiques aux États-Unis.
Même si les motivations racistes sont toujours difficiles à établir avec certitude, le nombre de crimes à connotation raciste, visant des victimes asiatiques, a plus que doublé l’an dernier en moyenne dans les grandes villes américaines, dont New York et Los Angeles, selon une étude publiée par une université californienne.
Le pouvoir des mots
Raya et le dernier dragon propose un remède tout simple à ces maux: pour que les cinq royaumes survivent, il leur faudra en finir avec l’égocentrisme et apprendre à se faire confiance mutuellement.
Au delà de ce message plein de bonnes intentions, l’équipe du film espère aussi que mettre en vedette des princesses et autres personnages caractéristiques d’une culture du Sud-Est asiatique aura un impact concret sur la société et la représentation de ces communautés.
«En grandissant dans les années 1970 et 80, je n’ai jamais rien vu de tel… Et j’ai l’impression qu’en ce qui concerne la représentation (de ces cultures), ça n’a pas bougé pendant très longtemps», a dit Sandra Oh.
«C’est l’exposition qui aboutit à la compréhension, et cette compréhension change à son tour la perception», estime Daniel Dae Kim (Lost, Hawaii 5-0), qui double le père de Raya.
Financièrement parlant, Disney a bien sûr tout intérêt à courtiser le marché asiatique, en particulier le box-office chinois qui se développe à vive allure.
Mais la culture cinématographique venue d’Asie a le vent en poupe à Hollywood, et ailleurs dans le monde.
L’an dernier, le film sud-coréen Parasite a fait sensation dans tous les festivals, décrochant la palme d’or à Cannes puis l’Oscar du «meilleur long-métrage», devenant le premier film tourné dans une autre langue que l’anglais à remporter la récompense suprême.
Cette année encore, Minari, qui met en scène une famille américaine d’origine sud-coréenne, pourrait s’illustrer, tandis que la réalisatrice chinoise Chloé Zhao vient de rafler deux Golden Globes pour Nomadland.
Interrogée après sa victoire sur la recrudescence d’agressions visant les Asiatiques, Zhao a répondu: «Essayer de voir le monde à travers les yeux de l’autre est le seul moyen pour nous de survivre en tant qu’espèce».
«J’ai parfois l’impression que ces gens qui ont tellement de haine en eux se haïssent peut-être tout simplement eux-mêmes», a-t-elle ajouté.
Qui Nguyen, coscénariste de Raya et le dernier dragon, espère que le film contribuera à une prise de conscience pour certains spectateurs. «Au cours de l’année écoulée, il y a eu parfois beaucoup d’images et de mots négatifs sur les Asiatiques», a-t-il relevé.
«Les mots ont un pouvoir. Espérons que ce film soit notre parole et notre message au monde: Soyons unis», renchérit sa collègue Adele Lim.