Bien qu’elle vienne de décrocher un superbe premier rôle dans une importante série de Club illico, Les perles, à venir en 2023, et qu’on la retrouvera dans la deuxième saison des Moments parfaits à l’automne et dans le film 23 décembre en novembre prochain, Bianca Gervais se plait de plus en plus dans le métier de réalisatrice.
Alors qu’elle vient de mettre en images Mixmania: 20 ans plus tard, qui sera disponible mercredi, le 22 juin, sur Crave, l’artiste songe déjà à son prochain documentaire, qui devrait aborder le thème brûlant de la charge mentale, lequel tient énormément à cœur à la maman qu’elle est.
«Je pense que mon futur est peut-être derrière la caméra, a confié à Métro celle qui avait déjà coréalisé la série Format familial et la Soirée Mammouth, pour Télé-Québec. J’y trouve beaucoup de bonheur. L’année passée, j’ai soufflé les chandelles sur mon gâteau, pour mes 36 ans, en me disant que j’aimerais réaliser un documentaire avant mes 40 ans. Je ne savais pas que ça se passerait dans l’année suivante, grâce à Mixmania! (rires) Et je trouve ça le fun…J’aime mettre mes amis devant la caméra, partir avec les techniciens, faire un bricolage, faire un montage…»
«Pas sexy»
Qu’est-ce que la charge mentale vient faire là-dedans? C’est que le grand fil conducteur de la fiction Les perles, que Bianca tournera tout l’été sur la Haute-Côte-Nord, traite justement de cette pression invisible que subissent (ou s’imposent) les mamans.
Dans un texte d’Erika Soucy (remarquée pour sa pièce Les murailles et sa coécriture de Léo) et une réalisation d’Hervé Baillargeon (Six degrés), Bianca Gervais personnifiera Stéphanie, une jeune trentenaire devenue mère à l’adolescence de deux filles… et qui, n’ayant pas vécu grand-chose d’excitant depuis l’arrivée de sa progéniture, ressent le besoin d’une grande bouffée d’air frais. Elle qui n’a jamais pris l’avion met les voiles en secret avec son amant vers un tout-inclus au soleil, en laissant croire à qui veut l’entendre qu’elle se remet d’une dépression, pour ne pas faire mauvaise figure aux yeux de son petit village. Les ragots dans son patelin iront bon train quand le voisinage découvrira le pot aux roses, mais Stéphanie n’en aura cure, encore occupée à se dévouer au bonheur de ses filles, ses perles du titre. L’œuvre soulèvera aussi la notion de sororité, puisque Cynthia (Sharon Fontaine-Ishpatao), sa meilleure amie, sera complice de notre héroïne dans sa cavale.
«C’est comme Léo au féminin, mais avec une couche de drame de plus, a indiqué Bianca au sujet de la série, qui l’emballe vivement. Quand j’ai vu ce rôle-là, je me suis dit que c’était le rôle que j’attendais, après 29 ans de carrière…»
De s’apprêter à jouer le trop-plein familial a donc réveillé démons et fantasmes chez Bianca Gervais. D’un, l’actrice se sent un brin coupable de travailler tout l’été loin de ses propres enfants, Liv (8 ans) et Bowie (4 ans), rejoignant ainsi le propos des Perles. «Ma psy me faisait remarquer que c’est un beau modèle de femme qui ne va pas puncher, un modèle de femme qui aime son travail et qui est une maman aimante. Mais on dirait que les deux sont difficiles à faire coexister…»
Et, de deux, ce projet ravive en elle cette idée de documentaire sur la charge mentale qui la taraude depuis un moment, qu’on lui a souvent suggéré d’abandonner, mais qui, affirme-t-elle, «est en route». Rappelons que Bianca et son amoureux, Sébastien Diaz, ont fondé leur maison de production, Fait Maison Productions.
«On m’a souvent dit que la charge mentale, ce n’est pas sexy, que ce n’est pas télévisuel, que c’est abstrait, a gloussé la principale intéressée dans un rire ironique. Mais est-ce que les femmes peuvent rêver à la hauteur de leurs rêves, ou elles doivent avoir une version édulcorée de leurs ambitions? Moi, en tout cas, je suis pognée là-dedans!»
De mère en fille?
Le fait que son aînée, Liv, aspire déjà à suivre les traces de ses parents contribue également à générer une réflexion chez Bianca Gervais par rapport à sa profession. Ayant elle-même lancé ses premières répliques sur un plateau dans la jeune enfance, notamment dans la comédie dramatique Le monde de Charlotte, la maman protectrice connait les écueils d’une célébrité hâtive.
«Liv veut faire ce métier-là, et on la retient, vraiment, vraiment beaucoup. Sur Instagram, on publie le visage de nos filles aux trois quarts; on essaie de contrôler ce qu’on peut. Idéalement, je préférerais qu’elle joue dans la ruelle, qu’elle se salisse, qu’elle ne soit pas tout de suite à se définir dans le regard de l’autre. J’aimerais que ce que j’ai appris, moi, lui serve…»
«En même temps, les interdits deviennent des obsessions, alors elle fera bien ce qu’elle voudra, a poursuivi Bianca en riant. Je vois qu’elle serait bonne. Mais je ne l’ai pas emmenée à la première de Mixmania : 20 ans plus tard, par exemple, parce que je ne veux pas qu’elle voie juste le beau! Il faut qu’elle voie aussi que maman pleure quand elle ne décroche pas un rôle. Je veux qu’elle voie les deux côtés avant de faire un choix. Pas juste maman magnifiée qui parle devant des gens…»
Le rêve Mixmania
Les aléas du glamour et de la popularité, Bianca Gervais les a de surcroît étudiés de près en mitonnant Mixmania : 20 ans plus tard, que Bell Média lui avait d’abord proposé d’animer, mais qu’elle a tenu à réaliser, sous forme de conventum, de retrouvailles entre six des Mix (seuls Caroline Marcoux-Gendron et Benjamin Laliberté ne sont pas de l’émission spéciale), qui se rassemblent pour faire le bilan de cette aventure plus grande que nature.
«J’ai grandi avec Mixmania, a spécifié Bianca à Métro. J’avais 16 ans lors de la première édition. Je devais l’écouter en cachette et faire croire à mes amis que je ne l’écoutais pas (rires). Mais je connaissais toutes les chansons. C’était l’époque où je faisais Le monde de Charlotte, et je voyais d’autres jeunes de mon âge qui perçaient, qui travaillaient. Qui me disaient que c’était possible. C’était une incursion dans un métier que j’essayais moi-même de creuser.»
Bianca Gervais énumère les faits d’armes de la joyeuse bande du premier Mixmania (2002), sans contredit la plus phénoménale des quatre moutures du concept (les autres ayant été diffusées en 2011, 2012 et 2014) : il s’agissait de la première téléréalité au Québec (si on exclut Pignon sur rue, à Télé-Québec, à la fin des années 1990, qui relevait davantage du docu-réalité), 250 000 albums vendus cette année-là (davantage que U2!), des chansons en français, un Centre Bell rempli à guichets fermés, un an et demi de tournée, des frénésies à s’en faire arracher leur linge…
«Ils ont défriché une forêt, a illustré Bianca Gervais. Dans l’ensemble, Mixmania, c’est très, très positif. Des jeunes chantaient en français, d’autres jeunes s’identifiaient à eux, on les regardait apprendre, faire des erreurs, se tromper, se relever. Personne n’était éliminé. C’est un beau phénomène de culture pop. Franchement, je ne me souvenais plus que ça avait été aussi gros…»