Pour sa deuxième fin de semaine, le festival d’humour Juste pour rire a accueilli (entre autres) sur scène l’enregistrement du balado Rince-crème, signé les Denis Drolet, ainsi que Le Grand Concert improvisé, délire musical improvisé signé Arnaud Soly, Virginie Fortin et Richardson Zéphir. Deux spectacles à la hauteur des attentes.
«RINCE-CRÈÈÈME»
Bien que Sébastien Dubé, aka Denis barbu, ait demandé au public ce qu’il «câlissait icitte» en montant sur scène, la foule de 3000 personnes, qui portait la merch officielle du balado, n’avait de toute évidence pas envie d’être ailleurs qu’à la salle Wilfrid-Pelletier en ce vendredi soir, à l’occasion de l’enregistrement de Rince-crème.
Le fameux titre du balado, lequel a été créé en décembre 2020 et est accessible sur Patreon, a été hurlé plus d’une fois par le public, autant pendant le spectacle que dans les couloirs de la Place des Arts.
Ainsi, Denis barbu et ses deux fidèles acolytes, Vincent Léonard (Denis à palettes) et Marc-André Fleury (Just-To-Buy-My-Love), ont, comme à leur habitude, exprimé leurs opinions, parfois absurdes, parfois trash, sur certains sujets fournis par le public. On a pu les entendre se prononcer sur les laisses pour enfants, les harems, les parapluies ouverts à l’intérieur, qui sont pour eux un gros non, sauf ceux qu’on met pour décorer les cocktails. «[Les parapluies ouverts], c’est l’affaire la plus importante après nos mères», a d’ailleurs commenté Vincent Léonard.
L’absurdité à son comble
Des révélations-chocs ont aussi été faites lors du spectacle d’environ une heure trente: le public a ainsi notamment appris que Jean-Philippe Wauthier «trippe sur la chaîne de restauration Yuzu», que les lumières de la salle Wilfrid-Pelletier ont été posées par ce dernier, «que les infirmières ont été inventées en 2016»… sans oublier que «Janette Bertrand est, depuis cinq ou six ans, un cactus»!
Les fans d’humour absurde ont été servi.e.s à plusieurs autres moments, notamment lorsque Denis barbu a fait son traditionnel appel au restaurant Mikes afin de semer la confusion, cette fois-ci en demandant à l’employé au bout du fil s’ils avaient ça, «une pizza pompier». Par ailleurs, Vincent Léonard a pu exprimer son amour pour le visage de Marc-André Fleury en lui interprétant une chanson, accompagné d’un pianiste, pour laquelle Just-To-Buy-My-Love a tenu à préciser qu’il ne faisait pas dire merci.
Le clou de l’absurde a sans doute été les quelques minutes psychédéliques au cours desquelles des personnes déguisées en Égyptiens et en Mario Bros, ainsi que Martin Dubé (le frère de Denis barbu, qui écrit habituellement les thématiques du podcast), sont venues sur scène, sur trame sonore, soit pour jaser, faire du breakdance, faire badtripper les gens dans la salle, ou toutes ces réponses. De cette performance livrée devant un public prêt à recevoir une telle proposition a découlé un moment fort de la soirée.
Mona de Grenoble, reine de l’obscénité
Comme pour chaque enregistrement du balado, il y avait une personnalité invitée, et elle n’aurait pu être mieux choisie. C’est la drag-queen Mona de Grenoble, aussi gagnante de la dernière saison de Big Brother Célébrités, qui a rejoint le trio pour la fin du balado, ce qui a amené la vulgarité à un autre niveau, et un vent de fraîcheur à la dynamique sur scène. Elle a en effet lancé à la blague que «les drag-queens vont les avoir, vos jeunes», faisant référence aux manifestant.e.s anti-drag qui ont peur d’une éventuelle conversion, et a apporté sur scène un cadeau d’hôtesse destiné à Marc-André Fleury, soit un sac de doigts, étant donné que ce dernier en a perdu un lors d’une chute dans des escaliers en hiver. On vous a prévenus, c’était trash!
Le Grand Concert improvisé : quand talent musical et humour se rencontrent
Et samedi soir, à la Maison symphonique de Montréal, toujours dans le cadre de Juste pour rire, un Grand Concert improvisé s’est créé devant nos yeux. C’est accompagné de sept musiciens de la troupe des Wonder-Trois-Quatre, qui a l’habitude de l’improvisation sur scène, d’un chef d’orchestre (le fantastique Éric Desranleau) et de LeLouis Courchesne à l’animation que le trio d’humoristes Arnaud Soly, Virginie Fortin et Richardson Zéphir a pris le pari d’improviser des chansons dont les thématiques venaient du public.
Et du mélange entre improvisation musicale et humoristique a résulté un spectacle grandiose d’une heure et demie. Le lieu, d’emblée impressionnant, la qualité des musicien.ne.s et celle des impros ont en effet créé tout un spectacle.
Improviser en chanson
Le trio d’humoriste a en effet été à la hauteur des attentes. Les trois ami.e.s, qui ont plus d’une improvisation dans le corps, ont su s’accorder avec l’orchestre et générer des rires, tout en tenant les notes. L’animateur de la soirée, LeLouis Courchesne, a su puncher ses courtes présentations des thématiques et donner des défis aux humoristes et musiciens, ajoutant une touche de piquant à la prestation. «Les paroles de cette chanson-là sont particulièrement aiguës, et plus ça va, plus ça l’est», a-t-il par exemple exigé, au grand dam de l’expressif Soly.
Le spectacle d’impro s’est ouvert sur une prestation ayant pour thématique le porc effiloché, sur style musical klezmer (tradition musicale instrumentale juive). Cela a donné le ton à la soirée et un aperçu du niveau d’absurdité que le spectacle allait, par moments, déployer.
Les humoristes alternaient, se complétaient et parfois s’accompagnaient dans les paroles. On a aussi eu droit, parmi la dizaine de chansons, à une version longue de la musique de la publicité de Barbies Resto Bar Grill, qui racontait l’histoire de sa création – Barbies était le chihuahua décédé du propriétaire, selon l’imaginaire des humoristes -, un moment incontestablement marquant de la soirée.
Symbiose
Arnaud Soly a su mener le spectacle et se démarquer à quelques reprises, notamment en installant l’histoire de chaque chanson, en surprenant la foule, mais aussi en se déhanchant avec aisance sur scène. Si Virginie Fortin a pu impressionner en imitant Céline Dion et en rockant les refrains des chansons, Richardson Zéphir est celui qui est allé où on ne l’y attendait pas. Interprétant un enfant, un rappeur, un cheval et même un poil, il a su déclencher les rires et élever la barre déjà placée haut par ses collègues. Le trio avait visiblement du plaisir, tout comme le band qui l’accompagnait.
Un tour d’horizon musical a eu lieu, avec entre autres de la musique latine, du rock progressif, du disco, du gospel, du reggae, du country et même de la pop française. L’orchestre au grand talent est une belle découverte de la soirée, dirigée par l’impressionnant Éric Desranleau, qui savait visiblement comment lier la musique à l’improvisation pour que le tout soit en symbiose. Un format de spectacle que l’on risque assurément de revoir dans l’avenir.