Les festivités de Montréal en lumière et celles du 100e anniversaire de Jean Paul Riopelle ont été officiellement lancées, jeudi soir, avec la première du spectacle Riopelle symphonique, présenté à la salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts jusqu’à samedi.
Cocréée par Serge Fiori – un grand admirateur de Riopelle – et le compositeur Blair Thomson, l’œuvre musicale utilise comme matériau de base sept chansons, reconnaissables ou non, tirées du répertoire de l’ancien membre d’Harmonium. C’est d’ailleurs du même esprit qu’avait germé l’idée d’Harmonium symphonique, soit celui du directeur artistique Nicolas Lemieux, responsable également de ce nouveau spectacle.
Sur la scène bien remplie, l’Orchestre symphonique de Montréal (OSM) dirigé par Adam Johnson côtoie les Chœurs des Petits Chanteurs de Laval de même que le chœur de Temps Fort. Au-dessus, trois écrans semblent flotter et affichent ici des extraits du Refus global, cosigné par Riopelle, là des œuvres de l’artiste dont l’influence continue de se faire sentir, plus de 20 ans après sa mort.
Souci du détail
Tout de Riopelle symphonique évoque l’artiste à qui l’on rend hommage. Il y a, bien sûr, nombre de ses toiles et sculptures qui sont projetées sur les écrans, tantôt en défilant, tantôt en s’animant, parfois même en étant filmées et montées pour être vues sous tous leurs angles.
Cette mise en scène signée Marcella Grimaux fait écho à l’habitude qu’avait le peintre d’exposer ses toiles par sa fenêtre, durant son temps passé en France, et est plus réussie que celle d’Harmonium symphonique qui, lors de son passage à la Place des Arts, proposait quelques éléments scéniques qu’on s’expliquait mal.
Il y a également ces cinq actes qui racontent chacun un morceau de la vie de Riopelle: ses débuts à Montréal, ses années parisiennes, son contact avec les peuples autochtones, son temps passé à L’Isle-aux-Grues et la fin de sa carrière, qui culmine avec le chef-d’œuvre plus grand que nature qu’est L’hommage à Rosa Luxemburg, sur lequel on a l’occasion de s’attarder pour y admirer les multiples pochoirs d’oiseaux.
Ces oiseaux si précieux dans certaines phases de l’œuvre inépuisable de Riopelle sont évoqués par les costumes. Ces créations de Marie Saint Pierre présentent les fameuses plumes qui font sa signature. L’inspiration a été puisée d’une conversation avec le peintre lui-même.
Mais c’est aussi dans la musique que l’on rend hommage à Riopelle, qui, ironiquement, préférait travailler dans le silence. Les mouvements de ses pinceaux riment ici avec ceux des projections, mais aussi ceux de la composition, dont plusieurs couches se superposent, à l’image des tableaux de l’artiste. Remplie de leitmotivs et appuyée par un éclairage qui baigne la scène d’une lumière appuyant l’intensité des notes, la partition est entrecoupée de quelques extraits d’une entrevue de Riopelle, homme qui trouvait souvent le mot pour faire sourire et réfléchir à la fois.
En composant, Blair Thomson a travaillé comme le faisait Riopelle, a-t-il glissé quelques heures avant la première, à l’occasion d’un entretien dirigé par Catherine Perrin au Salon urbain de la Place des Arts qui sera rattrapable en ligne à compter de la semaine prochaine. Il n’a mis que deux mois et quelques semaines pour écrire le spectacle de 75 minutes, alors que le peintre avait l’habitude de s’affairer jour et nuit, s’arrêtant seulement lorsque sa toile était terminée.
«C’est une œuvre qui n’est jamais stable», a dit le compositeur durant l’entretien. Une remarque qui s’applique tant à l’œuvre musicale qu’est Riopelle symphonique, marquée par un éclectisme avoué, qu’à l’œuvre de Riopelle lui-même, qui a navigué toute sa vie entre l’abstrait et le figuratif.
Riopelle symphonique
Jusqu’au 18 février
Salle Wilfrid-Pelletier
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