Le Nouvel Opéra métropolitain (NOM) vient de boucler un tour du chapeau. Dans le cadre du Festival Classica, qui se termine samedi, l’ensemble lyrique a présenté ses trois premiers spectacles, dont les décors sont entièrement propulsés par les nouvelles technologies. Et ce n’est que le début de l’aventure pour cette troupe qui vise la carboneutralité.
Cette année, le NOM a séduit son public à la salle Claude-Champagne avec L’homme qui rit, L’adorable Belboul et Miguela. Pour l’an prochain, trois autres opéras sont dans les plans, cette fois pour deux représentations chacun. Et si tout se déroule comme prévu, la toute première édition du Festival d’opéra métropolitain proposera aussi la version lyrique de Starmania au grand terrain de sport de l’Université de Montréal, qui peut accueillir 45 000 personnes.
«On pense que ça sera de grand intérêt pour beaucoup de gens», dit à Métro Marc Boucher, le directeur général et artistique du Festival Classica.
Plus d’art lyrique, moins d’émissions de carbone
Lui-même baryton, Marc Boucher est bien placé pour savoir que les artistes lyriques n’ont pas le choix d’aller travailler à l’étranger, d’autant plus que le nombre de soirées d’opéra professionnel a considérablement diminué au Québec dans les 20 dernières années. Créer du travail était donc une des premières motivations derrière la naissance du NOM.
Mais l’idée est aussi d’arriver avec un nouveau modèle beaucoup plus écoresponsable. «On est résolument tourné vers la carboneutralité, ce qui implique une dématérialisation des décors rendue possible par les nouvelles technologies. Ce n’est plus possible de produire d’immenses décors pour un opéra et d’ensuite les mettre à la poubelle», croit le directeur artistique, qui précise que les costumes sont faits de tissus recyclés ou proviennent de friperies.
Et les décors numériques servent aussi le propos: on peut s’immerger dans différents endroits en fonction des tableaux beaucoup plus aisément. Si ces projections gagneraient à être faites d’illustrations plus réalistes et avec davantage de mouvement, on peut déjà voir tout le potentiel de la proposition.
«Les nouvelles technologies nous ouvrent des portes incroyables. On peut, par exemple, appliquer à un spectacle d’art lyrique les éclairages d’un concert rock. On peut mettre des lasers, des projections numériques», ajoute Marc Boucher, qui estime que de nouveaux publics peuvent ainsi s’intéresser à l’art lyrique.
Au-delà des décors, ce sont évidemment les voyages qui ne sont pas écoresponsables. «Il y a beaucoup de compagnies qui ont un modèle de fonctionnement basé sur les saisons, c’est-à-dire qu’on engage des gens à la pige et qu’on les fait voyager partout à travers le monde. Ça, ça n’a plus de sens à l’ère des changements climatiques.»
Le NOM a donc une distribution locale: sur les 25 rôles des opéras présentés cette année, 22 ont été interprétés par des artistes québécois.es.
Une troupe tournée vers l’avenir
Préparer des opéras, ça ne se fait pas en criant «soprano»! L’homme qui rit, une adaptation du livre de Victor Hugo actualisée au 21e siècle, est un projet qui a mis trois ans à venir au monde, ce qui est somme toute très rapide. «C’est une création qui demande du temps. Il a fallu que le librettiste, le poète québécois Bertrand Laverdure, écrive le texte. Et il faut écrire la musique», rappelle Marc Boucher.
Même chose avec Miguela, qui a requis cinq ans de travail. «Les partitions étaient à la Bibliothèque nationale de France sous forme manuscrite. Il a fallu les faire éditer. Cet opéra-là a été complètement oublié.» Composé en 1896 par Théodore Dubois, il a été dirigé sur scène par Benjamin Levy.
Des idées pour l’avenir, Marc Boucher et le NOM en ont plein la tête. À court terme, l’objectif est de développer une offre durant le mois de juin, moment où les saisons des autres opéras professionnels sont terminées. Mais le directeur artistique voit déjà le potentiel pour des projets en dehors de la période du festival, comme «une opérette dans le temps de Noël», glisse-t-il.
Il reste quelques spectacles avant la fin du Festival Classica. Le 16 juin, l’ensemble vocal Les Rugissants présente Debussy, Fauré, Duruflé: lumières immortelles à l’église Sainte-Famille de Boucherville. Le festival se terminera le 17 juin à la Cocathédrale Saint-Antoine-de-Padoue de Longueuil avec l’Orchestre symphonique de Trois-Rivières (OSTR) qui rendra hommage à des compositeurs québécois, tandis que les voix de Marc Hervieux et de Suzanne Taffot porteront des chansons d’ici.
Quant aux prochains spectacles du NOM, c’est un rendez-vous en juin 2024.